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Peut-on parler d'un gouvernement des juges aux États-Unis ?

Publié le 25/09/2011

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Introduction: Le 7 novembre 2000, ont lieu aux États-Unis les élections présidentielles opposant Albert Al Gore et George W. Bush. Le 8 novembre, en Floride, après le dépouillement, Bush obtient la majorité, mais seulement avec 0,5% du nombre de votant. Selon le Code électoral de l'État, il faut alors recompter les votes. Le pays va connaître trente-six jours de tension politique intense. Les opérations de recomptage devenant une véritable bataille juridique autour de la validité du vote, faisant surgir un débat sur les conditions de son organisation et sur la performance des machine à voter utilisées. C'est finalement un arrêt de la Cour suprême des États-Unis (l'arrêt Bush versus Gore), le 12 décembre 2000, qui met fin aux contestations en déclarant le candidat républicain vainqueur des élection.  Ce fait d'actualité, nous amène à nous interroger sur l'étendue et les limites du pouvoir judiciaire aux États-Unis. En France, ou en Europe, une telle situation aurait été impossible. De quel droit la Cour Suprême, représentante du pouvoir judiciaire, a-t-elle pu prendre la décision de choisir le futur président de la République? Dans un système pourtant attaché à la séparation des pouvoirs - le président détient le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif appartient au Congrès (Sénat et Chambre des représentants), et comme nous l'avons dit, la Cour Suprême a le pouvoir judiciaire- on remarque donc que certaines institutions ont tendance à empiéter sur d'autres, une idée présente dans la notion de «gouvernement des juges«.  L'expression «gouvernement des juges« désigne une «situation dans laquelle les juges sont en mesure de substituer leurs choix à ceux exercés par le pouvoir politique, soit en censurant ses décision, soit en menaçant ses titulaires de poursuites« (Lexique de Science Politique, d'Olivier Nay) autrement dit un État où les juges ont la main mise sur le pouvoir législatif et/ou exécutif.  Le système des États-Unis accorde-t-il trop de pouvoir à sa Cour Suprême, et plus généralement, à ces juges, de là à ce que l'on puisse vraiment parler d'une tyrannie du pouvoir judiciaire exercée sur les autres pouvoirs affaiblis? Si oui, ce «gouvernement des juges« est-il à craindre? Ou au contraire, doit-on considérer positivement un fort pouvoir attribué aux juges tant que celui-ci connait des limites et que par conséquent, il est exagéré d'employer le terme critique de «gouvernement des juges«?  Après avoir décrit l'organisation du système judiciaire des États-Unis et le rôle essentiel que joue la Cour Suprême au sein de celui-ci, nous verrons qu'en effet, le pouvoir des juges est renforcé en comparaison notre mode de fonctionnement en France, ce qui pourrait laisser croire à un «gouvernement des juges« que l'on pourrait considéré comme contraire à la démocratie. Mais nous conclurons tout de même en rappelant qu'un fort pouvoir judiciaire présente des avantages certains, tant que celui-ci ne détient pas le pouvoir absolu, comme c'est le cas aux États-Unis.

« divers tribunaux, sans jamais aboutir à la même conclusion.

Dans ces cas précis, le rôle de la Cour d'Appel est detrancher à la place de toutes les tribunaux qui n'y sont précédemment pas parvenus.

La Cour Suprême incarne doncbien le pouvoir judiciaire du fait qu'elle soit chargée de régler en dernière instance des affaires «in-réglables».

Maisson pouvoir ne s'arrête pas là...

Le 24 février 1803, la Cour suprême déclare l'arrêt dit Marbury versus Madison.Cette date restera historique, puisque par le biais d'une affaire, il permettra à la Cour Suprême d'exercer unenouvelle fonction : celle de contrôler la constitutionnalité des lois.

En 1810, elle s'est également attribué le droitd'apprécier la conformité des lois des États fédérés par rapport à la Constitution dans un arrêt Fletcher v.

Peck.C'est, selon elle, une extension de sa mission de «dire le droit» et de trancher les litiges Par ces deux arrêts, la CourSuprême octroie le rôle d'apprécier la conformité de loi fédérale ainsi que de la loi des Etats fédérés par rapport à laConstitution.

Ce contrôle s'effectue de façon concrète (c'est-à-dire à l'occasion d'affaires -case studies-) et aposteriori (c'est-à-dire après que la loi ait été votée et appliquée).

Il est également dilué, puisque contrairement aufonctionnement européen, où seul le Conseil Constitutionnel a le droit d'exercer le contrôle de la constitutionnalité,aux Etats-Unis, toute juridiction peut et doit l'exercer.

Les juges de la Cour Suprême Le Congrès est chargé dedécider le nombre de juges qui siègeront à la Cour Suprême : ils étaient sept au départ, ils sont aujourd'hui neuf (unprésident, dit le Chief Justice, et huit autres juges, dits Associate Justice) depuis 1869.

Ces juges sont nommés parle président des Etats-Unis, avec l'accord nécessaire du Sénat.

Chaque juge est chargé d'une ou plusieurs cour(s)d'appel fédérale(s).

Ainsi pour chaque affaire, le juge compétent est celui chargé de la cour d'appel d'où vientl'affaire.

A partir de là, il peut choisir de soumettre ou non l'affaire à la Cour Suprême dans son intégralité.4 Lesjuges actuels : Le Chief Justice actuel est John G.

Roberts JR, nommé en 2005 par George W.

Bush Les AssociateJustice : Antonin Scalia, nommé par Ronald Reagean en 1986 Anthony Kennedy, nommé par Ronal Reagan en 1988Clarence Thomas, nommée par George H.

W.

Bush en 1991 Ruth Bader Ginsburg, nommé par Bill Clinton en 1994Stephen Breyer, nommé par Bill Clinton en 1994 Samuel Alito, nommé par Georges W.

Bush en 2006 SoniaSotomayor, nommée par Barack Obama en 2009 Elena Kagan, nommée par Barack Obama en 2010 Les principalesactions de la Cour Suprême Les grandes étapes de l'Histoire de la Cour Suprême sont tracées par sa jurisprudence,soit par l'ensemble des arrêts et jugements qu'elle a rendu.

Intéressons nous seulement à l'histoire récente...exemples d'arrêts : -elle impose l'égalité raciale, par l'arrêt brown versus board of education of topeka, en 1854 -elleimpose le droit de tout inculpé à l'assistance d'un avocat durant l'interrogatoire de police, par l'arrêt Miranda versusArizona, en 1966 -elle impose le droit des femmes au contrôle des naissances (Grisworld versus Connecticut, 1965)et l'avortement (Roe versus Wade, en 1973) → sera modifié sans être renversé en 1992.

-elle impose auprésident au président le refus du privilège de l'exécutif, ce qui conduira Nixon à la démission (United States versusRochard Nixon) - elle impose au Congrès le respect du droit de véto (Chadha, 1953) -elle impose les droitsfondamentaux des étrangers illégalement entrés au Etats-Unis (1982) A partir de 1986, la Cour, présidée par WilliamRehnquist puis John Roberts, prend un tournant plus conservateur.

Par exemple, elle accepte la peine de mortcontre les handicapés mentaux (Texas versus Penry, 1989), mais change heureusement sa jurisprudence sur cepoint avec l'arrêt Simmons versus Roper, en 2005.

Par ces exemple d'arrêts, on remarque à quel point le rôle desjuges, notamment le rôle des juges de la Cour Suprême, dépasse la simple prise de décision juridique.

La plupart deces arrêts ont en effet une portée politique.

II/...

favorise un accroissement du pouvoir du juge que l'on peutcraindre...

A/ Le fort pouvoir judiciaire spécifique aux États-Unis permet le «gouvernement des juges» Toutd'abord, les juges ont le pouvoir d'interpréter la loi Le théoricien Ronald Dwokin attribue au juge le pouvoird'interpréter la loi.

En effet, le rôle du juge ne s'arrête pas à appliquer une loi sur une affaire, ce qui est très difficile,puisqu'il s'agit de mettre en œuvre un texte théorique sur une situation concrète.

Ainsi, en jugeant des casparticuliers par des textes généraux, il n'applique pas une règle neutre, mais son interprétation de cette règle.

Dufait qu'il soit intermédiaire, le juge ne peut éviter d'ajouter son «grain de sel» dans toute application de la loi.

Maisils ont également le pouvoir de rendre une loi inapplicable Analysons ce processus : Une fois l'audience terminée, laCour se donne un délai pour établir sa décision définitive qui, contrairement aux décisions des coursconstitutionnelles européennes, a en principe une valeur «inter pare», autrement dit, limitée à l'affaire traitée.

L'idéeque la portée de la décision de la Cour est ainsi limitée relève pourtant du mythe.

Ce qu'a bien vu Tocqueville, dansDe la démocratie en Amérique, lorsqu'il note que : «quand le juge attaque la loi dans un débat obscur et sur uneapplication particulière, il dérobe en partie l'importance de l'attaque aux regards du public.

Son arrêt n'a pour butque de frapper un intérêt individuel; la loi ne se trouve blessée que par hasard» En pratique, la «loi blessée», si elleexiste encore, n'est plus applicable.

Ce qui donne officieusement à la Cour Suprême le même rôle qu'ontofficiellement les Conseils Constitutionnels européens.

Cette fiction selon laquelle la Cour Suprême n'aurait qu'unpouvoir sur des affaires précises et occasionnelles, est devenue au fil du temps de moins en moins crédible.

Eneffet, la Cour Suprême, lors d'une audience, entend les témoignages des personnes concernées par l'affaire, etéventuellement, le Sollicitor General, qui représente le gouvernement.

De plus, il est possible pour les citoyens,même s'ils ne sont pas directement en rapport avec l'affaire, s'ils le souhaitent ou sur invitation de la Cour, deprésenter leurs opinions par la procédure dite «amici curiae».

Avec la multiplication des class actions (actionscollectives), ces interventions sont devenues de plus en plus importantes et nombreuses.

Ce phénomène ajouté à lanature des problèmes évoqués semble rendre clair que l'écho des décisions prises par la Cour à l'issue du procès nepourra se limiter à celui-ci.

On ne peut pas considérer par exemple, que les décision sur la ségrégation scolaire ou ledécoupage électoral ne concernaient qu'un certain M.

Brown ou un autre anonyme Mr.

Carr...

Les décisions desjuges semblent incontestables et il est difficile de les influencer Le «gouvernement des juges» est aidé par leséléments suivant : -les juges de la Cour Suprême sont nommés à vie.

De ce fait, ils sont indépendants : ils n'ont pasbesoin de tenter de «plaire», que ce soit à des électeurs, ou à un président, dans le but d'être nommé une secondefois.

-Une fois nommés, le seul et unique moyen de les destituer est le jugement du Congrès, par la procédured'impeachment, une procédure rare et exceptionnelle.

-depuis la loi Evarts de 1891, la Cour suprême dispose dupouvoir discrétionnaire de juger.

Elle peut choisir ou non de traiter une affaire.

-il est très difficile de contester unedécision prise par la Cour Suprême, car sa décision est sans appel.

Pour revenir sur une de ses décision, il faut soitque la Cour Suprême elle-même change d'avis soit avoir recourt à l'amendement de la Constitution.

Ainsi, le pouvoir. »

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