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Peut-on prouver qu'une oeuvre d'art est belle ?

Publié le 21/12/2005

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Les oeuvres sont des manifestations sensibles de l'Idée, manifestations dont la forme évolue avec les civilisations. Ainsi  Hegel voit-il dans ce qu'il nomme l'art classique, c'est-à-dire l'art grec, une parfaite adéquation entre fond et forme, synonyme de beauté. De plus, il opère une classification des arts selon le degré de matérialité qu'ils mobilisent, de l'architecture à la poésie. L'oeuvre d'art acquiert sa noblesse dans le délaissement progressif de la matérialité au profit de son contenu spirituel.   DOIT-ON PROUVER QU'UNE oeUVRE D'ART EST BELLE ? Se demander s'il est possible de prouver qu'une oeuvre d'art est belle apparaît comme une question moralement problématique. L'art est un domaine où la liberté humaine s'éprouve : liberté de créer, je juger, d'apprécier. A vouloir prouver, le risque est réel de sombrer dans une censure artistique qui ne serait pas sans rappeler les limitations infligées à l'art dans les régimes totalitaires. Le Troisième Reich avait ainsi voulu évacuer sur des critères pseudo-scentifiques les dégénérescences de « l'art juif » et imposé aux artistes des compositions « pures ». Une éducation du regard qui serait déterminée et imposée par une seule instance apparaît dangereux.

L’appréciation de la beauté est le plus souvent considérée comme un jugement absolument subjectif. Se demander s’il est possible de prouver la beauté d’une œuvre d’art, c’est-à-dire de la mettre en lumière par des raisonnements incontestables, cela revient à poser le problème de la nature du sentiment esthétique et celui de sa communicabilité. Le contemplateur reste-t-il isolé dans un solipsisme ou peut-il espérer tendre à une universalité ? L’œuvre d’art ne s’apprécie-t-elle que sur des critères sensibles ?

Mais c’est également donner des « critères « à cette beauté, identifiables par la raison. Quelle est celle dont nous parlons ? Beauté de l’exécution, de la composition ?

« Hegel rompt avec Kant, pour qui la beauté naturelle tient une large part.

Lacontemplation de la belle nature accordemystérieusement l'imagination et l'entendement.

Hegel rejette la beauténaturelle, car la beauté artistique étant un produit de l'esprit lui estnécessairement supérieure.

C'est pour nous et non en soi et pour soi qu'unêtre naturel peut être beau.

L'imitation de la nature n'est donc pas de l'art,tout au plus un exercice d'habileté, par lequel on imite le Créateur.

Il y a plusde plaisir à fabriquer des outils ou des machines qu'à peindre un coucher desoleil.

La valeur de l'art est tout autre : c'est l'esprit à l'oeuvre, qui s'arrachede la nature en la niant.

Au moyen de l'art, l'homme se sépare de la nature etse pose comme distinct.

L'art peut donc faire l'objet d'une science, penseHegel, il suffit d'en montrer la nécessité rationnelle dans l'histoire del'humanité.

L'oeuvre d'art ne décrit pas une réalité donnée, elle n'est pas faitepour notre plaisir, mais l'art est en son essence une intériorité qui cherche às'exprimer, à se manifester ; c'est un contenu qui cherche une forme, un sensqui veut se rendre matériel.

On ne peut le condamner pour son apparence,car il faut bien à la vérité une manière de se montrer.

L'art étanthistoriquement la première incarnation de l'esprit, il se confond d'abord à lareligion : la religion grecque est l'art grec lui-même.

Ce sont Homère etHésiode qui ont inventé les dieux grecs.

Cet âge d'or de l'art, que Hegeldéfinit comme "classique", sera dépassé par l'art romantique avec l'apparitiondu christianisme.

La religion chrétienne est essentiellement anthropomorphique : le divin est le Christ, soit une pure individualité charnelle, qui a souffert et qui est morte encroix.

Seul l'art peut ici donner une représentation charnelle de ce divin, dont le passage historique a été fugitif, etsi l'art est mort dans notre société moderne, c'est probablement pour la raison que la spiritualité chrétienne ne suffitplus tout à fait aux besoins de l'esprit. Le beau est une idée, soit l'unité d'un concept et de la réalité.

Le concept est l'âme tandis que la réalité en estl'enveloppe charnelle.

Le beau est donc la manifestation sensible de cette unité ; il exprime une réconciliation.

Il estnaturel qu'il échappe à l'entendement qui sépare et qui divise, de même qu'à la volonté qui cherche à soumettrel'objet à ses propres intérêts.

Tout ce qui est libre, indépendant, infini, conforme à la seule nécessité de sonconcept, peut être dit beau.

De plus, un bel objet est vrai, puisqu'il est conforme à son être.

Cela implique qu'aucunorganisme vivant ne pourra être beau, parce que soumis au besoin, il n'a pas de véritable liberté.

Seule la beautéartistique peut être accomplie : elle représente l'idéal.

L'idéal est soustrait de la vie quotidienne imparfaite etinauthentique.

Il incarne l'universel dans l'individualité absolument libre et sereine : le symbole en est l'individualitéapollinienne, perfection d'harmonie et de forme, sérénité conquise sur la douleur.

En un sens, cette beauté idéaleest hors du temps et de l'histoire, symbole de l'éternité.

Si cet idéal de beauté est désormais révolu, alors qu'ilculminait dans l'art grec, c'est que l'organisation sociale et la production économique sont devenues prévalentes,soudant les individus dans des rapports de besoin, d'échange et de travail complexes et étroits.

L'Idéal ne peut pluss'incarner dans l'art, il s'est incarné dans l'État et la politique à la fin du xixe siècle et au cours du xxe siècle.

Onpeut toutefois remarquer qu'à notre époque présente, ces deux formations ne semblent plus animées par lesaspirations spirituelles les plus hautes des individus et de la collectivité.

Nous vivons dans l'ère du nihilisme queNietzsche avait diagnostiquée à la fin du xixe siècle. DOIT-ON PROUVER QU'UNE oeUVRE D'ART EST BELLE ? Se demander s'il est possible de prouver qu'une oeuvre d'art est belle apparaît comme une question moralementproblématique.

L'art est un domaine où la liberté humaine s'éprouve : liberté de créer, je juger, d'apprécier.

A vouloirprouver, le risque est réel de sombrer dans une censure artistique qui ne serait pas sans rappeler les limitationsinfligées à l'art dans les régimes totalitaires.

Le Troisième Reich avait ainsi voulu évacuer sur des critères pseudo-scentifiques les dégénérescences de « l'art juif » et imposé aux artistes des compositions « pures ».

Une éducationdu regard qui serait déterminée et imposée par une seule instance apparaît dangereux.De plus, en introduisant l'oeuvre dans le domaine de la science, de la technique, dans la mesure où nous lasoumettons à des évaluations exclusivement rationnelles, n'est-ce pas vouloir assujettir le mystère qu'est l'oeuvreau même titre que tous les autres étants ? Cette vanité incessante de toujours vouloir ‘avoir raison' révèle unevolonté de maîtrise absolue des choses qui s'apparente à une mauvaise lecture du cartésianisme.

Comme l'écrit Alaindans son Avant-propos au Système des Beaux-Arts : « Et l'on peut remarquer que les éclairs de beauté de la vraie prose offrent une vérité sans preuves, au sens où la belle musique est sans preuves et la Vénus de Milo sanspreuves.

»Le sentiment de la beauté, s'il est subjectif, porte en lui l'espoir de joindre l'universalité.

Ainsi, si nous avons vu qu'ilest possible de prouver qu'une oeuvre d'art est belle en l'incorporant à une perspective plus large –manifestationsensible du développement de l'Esprit par exemple, la beauté ne peut se prouver selon des critères scientifiquesdéterminés, mais dans une écoute et une volonté commune d'ouverture.

Le danger, à vouloir ‘prouver', serait desoustraire à l'expérience esthétique, tout comme à la réflexion morale, son caractère désintéressé.

Contempler uneoeuvre, c'est aussi laisser pleine liberté au jeu de ses facultés : dès lors qu'une instance ordonnerait le jugement degoût, la contemplation ne serait plus synonyme de dialogue entre une oeuvre et un individu, mais entre un devoir-. »

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