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Vox populi vox dei ?

Publié le 09/01/2004

Extrait du document

Il est vrai que dans les démocraties le peuple paraît faire ce qu'il veut ; mais la liberté politique ne consiste point à faire ce que l'on veut. Dans un État, c'est-à-dire dans une société où il y a des lois, la liberté ne peut consister qu'à pouvoir faire ce que l'on doit vouloir, et à n'être point contraint de faire ce que l'on ne doit pas vouloir. Il faut se mettre dans l'esprit ce que c'est que l'indépendance, et ce que c'est que la liberté. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent ; et si un citoyen pouvait faire ce qu'elles défendent, il n'aurait plus de liberté, parce que les autres auraient tout de même ce pouvoir. Alain Voter, ce n'est pas précisément un des droits de l'homme ; on vivrait très bien sans voter, si l'on avait la sûreté, l'égalité, la liberté. Le vote n'est qu'un moyen de conserver tous ces biens. L'expérience a fait voir cent fois qu'une élite gouvernante, qu'elle gouverne d'après l'hérédité, ou par la science acquise, arrive très vite à priver les citoyens de toute liberté, si le peuple n'exerce pas un pouvoir de contrôle, de blâme et enfin de renvoi. Quand je vote, je n'exerce pas un droit, je défends tous mes droits. Il ne s'agit donc pas de savoir si mon vote est perdu ou non, mais bien de savoir si le résultat cherché est atteint, c'est-à-dire si les pouvoirs sont contrôlés, blâmés et enfin détrônés dès qu'ils méconnaissent les droits des citoyens. On conçoit très bien un système politique, par exemple le plébiscite (1), où chaque citoyen votera une fois librement, sans que ses droits soient pour cela bien gardés.

Cette expression est couramment utilisée pour justifier la prééminence de l’opinion publique. Le peuple parle au nom de Dieu, le peuple veut ce que Dieu veut. C’est le principe fondateur de la démocratie, le peuple est censé être le premier bénéficiaire de l’État. Cela signifie t il que le peuple est celui qui détient la vérité comme étant la seule et unique à l’exemple de Dieu? Le peuple détient il un pouvoir qui le met au dessus de toute autorité politique? Face à la divergence des opinions que l’on peut trouver dans la foule, comment déterminer la légitimation de cette voix qui se veut unique tout en étant d’origine plurielle?

« C'est un adage sérieux et ironique.

Il désigne la voix suprême, à laquelle on ne peut désobéir.

Le tout est dedésigner celui qui émet cette voix.

Si c'est Dieu, le problème n'est pas de son autorité mais de l'écoute de sa voix:le peuple est comme le porte-voix de Dieu.

Il y a un emploi restrictif de cette formule: elle questionne le droit qu'a lepeuple parler pour Dieu, puis d'être lui-même détenteur de l'autorité suprême.

Le peuple, nouvelle entité, a pris laplace de Dieu.

Ce serait alors une manière de désigner la démocratie comme la forme vraie de l'autorité.C'est un adage ironique: comme si la voix du peuple devenait tout aussi insondable, mystérieusement incontestable,que celle de Dieu.

Quelle est donc la signification de la formule dans son usage restreint? Est-il vrai qu'elle puissedésigner pertinemment le fondement démocratique de la politique?I.

(Fondement théologique de la formule).

Prise à la lettre, cette formule peut trouver son sens dans le principe dela formulation du politique.

Le peuple a valeur oppositive, face à ceux qui ont le pouvoir.II.

« Vox populi vox dei » comme fondement de la démocratie.

La formule a ici une expression problématique: par quelle procédure la volonté fondatrice peut-elle être formulée, écoutée, exécutée ? Comment fonder laperformativité de la voix du peuple ? Sous quelles conditions la voix du peuple peut-elle se faire entendre?III. Comment s'exprime la voix du peuple ? Problème des sondages, des idéologies, des partis. I.

La formule désigne une procédure comprise dans un système (fondement théologique): Dieu se manifesteeffectivement par la voix du peuple.

La voix de son maître ! Comment cette voix doit-elle se faire entendre ? C'estune procédure susceptible d'une justification rationnelle, hors de son contexte initial.

Cf Machiavel contre cette idée (les hommes sont « bêtes » et « méchants »).

Cf.

textes cours sur l'Etat. II.

Sortant du système initial, la formule peut être prise comme une sorte d'anticipation de ce qui deviendralégitimité démocratique du pouvoir.

Rousseau , « Contrat social », III, 17: il y a conversion subite de la souveraineté en démocratie: « pouvoir du peuple ».

La voix du peuple joue le rôle que jouait la voix de Dieu.

Il y a destitution de Dieu (par l'éloge du suffrage universel), substitution.

Il y a donc ressemblance et possibilitéd'assimiler.

Derrière l'altérité, on découvre une identité.Il y a une sorte de vérité implicite oraculairemet délivrée dans le vote populaire alors qu'autrefois, la voix était celled'un autre.

Néanmoins, le peuple entend encore sa propre voix comme si c'était celle d'un autre.

La voix du citoyen,son suffrage (expression de la « volonté générale ») n'est plus la voix du sujet, sa suffisance...

Du politique au religieux il y a une ressemblance structurale en dépit de la rupture historique.

Le principe démocratique a commehérité du principe théocratique : le politique a reconduit, sur son terrain, les exigences et les modes de pensée dureligieux.

III. Comment cette voix du peuple va-t-elle être entendue? Dans I, la voix de Dieu est transmise par les prêtres, les vicaires, les princes, les rois.

Mais les voix du Seigneur étant impénétrables.

Alors quand il y a indécision, lerecours était au peuple: que dit alors la voix de Dieu?Mais est-ce si clair que le peuple a une voix? C'est le problème que toutes les volontés démocratiques ont tenté derésoudre.

Il n'y a pas qu'une seule bouche et l'on aboutit vite à la cacophonie.

Les plus éloquents, les plus« grandes gueules » l'emportent (cf.

la démocratie athénienne et la sophistique).

Rousseau , « Essai sur l'origine des langues » : toutes les langues ne sont pas capables de démocratie.

Le problème de la voix du peuple, ce qu'elle est et comment elle s'exprime, est fondamental, car c'est sur cette voix (et ces voix) que repose ladémocratie.Inversement, le peuple est sans voix.

On le fait toujours taire.

Faites taire cette voix que je ne saurais entendre...Quand il ouvre la bouche, c'est pour crier.

Clameur, chant, mais aussi coups physiques, violence.

Voix de faits !..

Enquelle langue s'exprime-t-il? Il y a peut-être des niveaux de langue; s'il y a des niveaux c'est qu'il faut traduire ceque le peuple dit, sinon c'est incompréhensible.

Il faut transcrire ce qu'il veut.

Quand bien même cette langue neserait pas à traduire, on dira que le peuple s'exprime dans la langue disponible, déjà là.

Ou bien on lui pose desquestions: sondages.

(Les sondeurs sont les oracles des temps présents, des prêtres laïques (cf.

I), mais aussi voixde sirènes (cf.

Jacques et l'Assemblée !)Il y a des voix ventriloques (ce sont les idéologies), c'est-à-dire des voix déjà marquées, préordonnées à uneidéologie dominante, qui « imposent » une réponse.

N'est-il pas difficile de faire parler la voix du peuple ? Le peupleprêtait sa voix à Dieu.Il faut que quelqu'un parle, issu du peuple (c'est-à-dire « au nom de »); mais parle-t-il vraiment au nom du peuple ?Se pose le problème de la délégation de parole, et celui du parti : cf le parti léniniste, c'est-à-dire celui qui sait ceque veut le peuple; il y a retard de la conscience du peuple et savoir du Parti; le Parti doit la fois suivre et précéderle peuple.

(cf.

Lénine ). Aujourd'hui, il y a le problème de l'opinion publique: est-ce l'expression immédiate de la volonté générale, ou unefiction élaborée pour justifier une politique? Hegel , « Principes de la philosophie du Droit », 301, 303, 315, 317:l'adage est vrai et faux.

Il est faux si l'on veut dire que l'opinion est le substantiel de l'Etat; il est pourtant vraicar il est normal que la voix du peuple ne soit pas censurée.

Problème du technocratisme: la technique de manchecontre la technique de Maastricht.... »

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