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Le fanatisme est-il une peur de la vérité ?

Publié le 30/10/2005

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La première réside dans l'inanité de la volonté fanatique à vouloir changer la réalité. La deuxième réside dans la possible discordance entre nos aspirations et la réalité.   Première partie : Le fanatisme a foi dans une vérité.   1.1 Le fanatique défend sa vérité.   « Il leur suffit de trouver une hypothèse quelconque sur une matière donnée, et les voilà tout feu tout flamme pour elle, s'imaginant qu'ainsi tout est dit. Avoir une opinion, c'est bel et bien pour eux s'en faire les fanatiques et la prendre dorénavant à coeur en guise de conviction. Y a-t-il une chose inexpliquée, ils s'échauffent pour la première fantaisie qui leur passe par la tête et ressemble à une explication; il en résulte continuellement, surtout dans le domaine de la politique, les pires conséquences. » Nietzsche Humain trop humain §635   1.2 Comment une erreur devient une vérité ou de la naissance d'une illusion   « C'est une superstition intéressante que la foi puisse transporter les montagnes, qu'un certain degré élevé de conviction transforme les choses conformément à cette loi, que l'erreur devienne vérité pourvu qu'il ne s'y trouve pas un grain de doute : c'est-à-dire que la force de la foi comble le manque de connaissance ; le monde devient tel que nous nous le représentons.

Le fanatisme réunit en son sein l'illusion, l'intolérance et l'enthousiasme. Le fanatique vivra dans l'illusion, il sera donc dans l'erreur sans en avoir conscience, prendra le vrai pour le faux et le réel pour l'imaginaire ou l'idéal. On parle à ce propos notamment de fanatisme religieux ou politique, la réalisation d'un idéal est visée alors même qu'elle s'oppose à la réalité. Ainsi les hommes dits fanatiques sont aveuglés par un idéal qui s'oppose à la réalité à tel point qu'ils considèrent cette réalité comme étant une erreur ou devant être changée. La vérité alors se trouve du côté de l'idéal et non du côté de la réalité. Le fanatique, le religieux enthousiaste ou l'homme politique zélé, a pour but de la réaliser et pour ce faire doit faire de son idéal une réalité qui remplacera la réalité existante. D'autre part le fanatisme a pour caractéristique d'être intolérant c'est-à-dire que la seule cause qui vaille est la sienne et toute personne ne se ralliant pas à sa cause est un ennemi et est dans l'erreur. Enfin le zèle est inhérent au fanatique. Ce dernier est un passionné, il n'agit pas avec sa raison mais avec son coeur, c'est la conviction, qui l'anime, qui oriente ses actions. Ces trois caractéristiques du fanatisme nous permettent de mieux cerner l'écart qu'il y a entre le fanatisme et la vérité. En effet la définition de la vérité s'oppose trait pour trait à la définition du fanatisme. La vérité s'oppose à l'illusion puisque cette dernière est une erreur inconsciente et que loin de rechercher la réalisation d'une autre réalité, la vérité s'accorde avec la réalité présente. D'autre part la vérité, pour être, doit pouvoir recevoir l'assentiment de tous, elle ne peut donc être le privilège de quelques uns. Enfin la vérité est en accord avec la raison humaine et s'oppose aux passions qui ont tendance à plonger l'homme dans l'erreur. Cette opposition justifie-t-elle une identification du fanatisme à une peur de la vérité ? Pourquoi le fanatisme devrait-il craindre la vérité ? La vérité est objet de crainte pour le fanatisme puisqu'elle est en mesure de saper ses fondements. Elle peut dénoncer l'illusion sous-jacente. Mais si la vérité est accessible comment le fanatisme peut-il exister ? Comment peut-on préférer l'illusion à la vérité ? La vérité serait rendue inacceptable par la discordance de nos aspirations avec la réalité. Le fanatisme alors serait une façon de compenser l'impuissance de la réalité à répondre à nos attentes, une façon de la fuir dans l'attente d'une autre réalité que nous aurions le devoir de bâtir. Nous retrouvons alors la troisième caractéristique du fanatisme à savoir le zèle. Les passions, en son sein, peuvent se manifester librement, elles en sont même le moteur. La volonté de changer ce qui est, ce qui nous entoure, permet de donner à l'action une fécondité particulière. La vérité, qui est en accord avec la réalité, trouve dans le fanatisme un adversaire de taille qui tend à la remplacer par une autre vérité, celle d'un idéal à construire. Mais ce remplacement est un leurre puisque la vérité fanatique est une illusion, elle ne permet au fanatique que de se réfugier dans un monde imaginaire. Ainsi nous sommes en face de deux impasses. La première réside dans l'inanité de la volonté fanatique à vouloir changer la réalité. La deuxième réside dans la possible discordance entre nos aspirations et la réalité.

« Deuxième partie : Le fanatisme obscurcit la vérité. 2.1 Le fanatisme a pour conséquence de rendre étrangère la vérité. « Voyons-les tous sortir du temple, et, pleins du dieu qui les agite, répandre la frayeur et l'illusion sur la face de la terre.

Ils se partagent le monde, et bientôt le feu s'allume aux quatre extrémités; les peuples écoutent,et les rois tremblent.

Cet empire que l' enthousiasme d'un seul exerce sur la multitude qui le voit et l'entend, la chaleur que les esprits rassemblés se communiquent, tous ces mouvements tumultueux, augmentés par le trouble dechaque particulier, rendent en peu de temps le vertige général.

C'est assez d'un seul peuple enchanté à la suite dequelques imposteurs, la séduction multipliera les prodiges, et voilà tout le monde à jamais égaré.

L'esprit humain, une fois sorti des routes lumineuses de la nature, n'y rentre plus; il erre autour de la vérité, sans enrencontrer autre chose que des lueurs, qui, se mêlant aux fausses clartés dont la superstition l'environne,achèvent de l'enfoncer dans les ténèbres .

» VOLTAIRE, Dictionnaire philosophique, art.

Fanatisme. 2.2 Le fanatisme dresse un voile sur la vérité.

Max Weber distingue deux éthiques : une éthique de la conviction (fanatisme) et une éthique de la responsabilité.

Le fanatique semble viser la vérité tout en se privant desmoyens d'y parvenir en faisant appel à sa conviction et à ses passions. « Il y a enfin un devoir de vérité.

Il est, lui aussi, inconditionnel du point de vue de l'éthique absolue .

On en a tiré la conclusion qu'il fallait publier tous les documents, principalement ceux qui accablent son propre pays, pourmettre en évidence, sur la foi de ces témoignages à sens unique, l'aveu d'une culpabilité unilatérale, inconditionnelleet sans égard aux conséquences.

L'homme politique trouvera que cette façon de faire, à la juger sur son résultat,loin de faire la lumière sur la vérité, l'obscurcira à coup sûr par les abus et le déchaînement des passions .

» WEBER, Le savant et le politique . Les passions ne peuvent servir la recherche de la vérité. Transition : Le fanatisme s'éloigne volontairement de la vérité mais nous pouvons nous interroger sur la source de cet éloignement.

La question de la peur de la vérité trouvera peut-être une élucidation une fois cetteinterrogation menée à bien. Troisième partie : L'échec fatal du fanatisme ou la révélation inévitable de la vérité. 3.1 L'illusion n'est que provisoire. « Il ne faut surtout pas oublié qu'à la révolution pleine d'enthousiasme succèdera toujours la routine quotidienne d'une tradition et qu'à ce moment-là le héros de la foi abdiquera et surtout la foi elle-même serésignera ou encore elle deviendra - et ce sera là son plus cruel destin – une élément de la phraséologie conventionnelle des cuistres et des techniciens de la politique.

» WEBER, Le savant et le politique. 3.2 Le fanatisme ne peut donc que craindre la révélation de la vérité puisqu'elle coïncide avec son extinction. « Cela ne saurait être autrement, tandis que la force de la persuasion est établie pour cause de croire, et qu'on regarde la confiance d'avoir raison comme une preuve de la vérité de ce qu'on veut soutenir.

Saint Paul lui-même croyait bien faire, et être appelé à faire ce qu'il faisait quand il persécutait les Chrétiens, croyant fortementqu'ils avaient tort.

Cependant c'était lui qui se trompait, et non pas les Chrétiens.

Les Gens de bien sont toujours Hommes, sujets à se méprendre, et souvent fortement engagés dans des erreurs qu'ils prennent pourautant de Vérités Divines qui brillent dans leur esprit avec le dernier éclat. » LOCKE, Essai sur l'entendement humain , IV 19 12. La vérité est révélée quand l'illusion devient erreur mais alors le fanatisme devient sans fondement puisque l'illusion qui le soutenait a été dévoilée.. »

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