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INTRODUCTION A L'ETUDE DE LA MÉDECINE EXPERIMENTALE DE CLAUDE BERNARD (fiche de lecture)

Publié le 05/07/2011

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L'Introduction à l'étude de la médecine expérimentale parut en 1865. Claude Bernard la composa pendant les temps de repos et de solitude que le rétablissement de sa santé lui imposa à cette époque. Ce livre fit l'admiration des esprits cultivés qui y retrouvèrent avec bonheur, réduites en formules, ordonnées avec art et éclairées par des exemples, les règles de la méthode expérimentale qui avaient déjà fait faire à Claude Bernard tant de découvertes intéressantes. Il lui valut l'entrée de l'Académie française, et, en le recevant, M. Patin put lui dire : « Vous avez créé un style. «

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« l'observateur ne contribue pas à la production des phénomènes comme l'expérimentateur.

Mais l'activité manuelle del'observateur n'est pas un principe de différence, il y a des observations actives, c'est-à-dire avec idée préconçue,et des expériences pour ainsi dire passives.D'autres savants disent que l'observation existe toutes les fois que l'on n'apporte aucun trouble à la productionnormale du phénomène; il y a expérience quand le phénomène naturel est intentionnellement troublé.

Mais cettedistinction n'est pas fondée, parce que l'activité intentionnelle de l'opérateur peut être remplacée par un accident.§ II.

— Pour résoudre la question, il faut distinguer l'investigation des faits et le procédé intellectuel qui les met enœuvre.

Acquérir de l'expérience et s'appuyer sur l'observation n'est pas la même chose que faire des expériences etfaire des observations; dans le premier cas, l'observation est le point d'appui de l'esprit qui raisonne, et l'expériencele point d'appui de l'esprit qui conclut.

Tout raisonnement expérimental suppose ces deux éléments.§ III.

— Il faut tout d'abord obtenir des faits par une investigation exacte et rigoureuse; la plupart des erreursscientifiques ont pour origine des erreurs de faits.

Chaque science a un genre d'investigations qui lui est propre etun attirail d'instruments et de procédés spéciaux; ceci est vrai surtout de la médecine.§ IV.

— Il y a des sciences d'observation et des sciences d'expérimentation, selon qu'on raisonne sur des faitsd'observation, tels que la nature les offre, ou sur des faits d'expérimentation obtenus dans des conditions quel'expérimentateur a créées et déterminées lui-même.

Mais le raisonnement expérimental y est toujours le même :c'est toujours une comparaison entre deux faits dont l'un contrôle l'autre.

La médecine ne doit pas être une scienced'observation, elle doit devenir science expérimentale.§ Y.

— L'expérimentateur fait toujours son expérience dans un but de contrôle; or, pour raisonnerexpérimentalement il faut en général avoir une idée et invoquer ou provoquer des faits, afin de contrôler cette idéepréconçue.

L'idée sera plus ou moins bien définie suivant la perfection de la science ; si elle ne se dégage passuffisamment, comme en médecine, il faut tâtonner, faire des expériences pour voir ; une observation imprévuepourra suggérer une idée.En résumé, l'investigateur est celui qui invoque ou provoque des faits pour en tirer l'enseignement qu'il désire;l'observateur obtient de» faits et juge s'ils sont bien établis et constatés.

L'expérimentateur comprend l'un etl'autre.§ VI.

— Tout expérimentateur a deux choses à faire : 1° préméditer les conditions de l'expérience en s'appuyant surune idée préconçue et les réaliser; 2° constater les résultats obtenus, mais les constater sans idée préconçue, telsqu'ils sont.Voici comment se résume tout le travail scientifique : « 1° le savant constate un fait; 2° une idée naît dans sonesprit, à propos de ce fait; 3° en vue de cette idée, il raisonne, institue une expérience, en imagine et en réalise lesconditions matérielles; 4° de cette expérience résultent de nouveaux phénomènes qu'il faut observer, et ainsi desuite.

» Il n'est pas toujours facile d'analyser ainsi ces opérations, mais elles existent toujours, et elles existenttoujours ensemble; pratiquement on ne peut pas séparer l'observateur de l'expérimentateur, parce qu'à l'observationcomme à l'expérience, il faut l'idée.

CHAPITRE II.

— De l'idée à priori et du doute dans le raisonnement expérimental. Chaque homme a une tendance à juger par avance ce qu'il voit, l'esprit commence toujours par une idée à priori.

Leraisonnement expérimental a pour but de faire de cette idée préconçue une interprétation à posteriori, en lasoumettant au contrôle de l'expérience.

Le sentiment engendre l'idée, la raison la développe et l'expérience lacontrôle.§ Ier.

— Les seules vérités susceptibles d'être soumises à cette méthode expérimentale sont des vérités objectivesou extérieures.

Ces vérités sont relatives au nombre d'expériences et d'observations qui ont été faites, en cela ellesdiffèrent de celles qui nous sont fournies par la conscience.§ II.

— Une idée anticipée ou une hypothèse est le point de départ nécessaire de tout raisonnement expérimental.Cette idée n'est point innée, elle ne vient qu'à la suite d'une observation.

Elle doit être fondée sur une observationantérieure, elle doit être aussi probable que possible et vérifiable expérimentalement.

On ne peut pas assigner derègles pour faire naître l'idée; l'idée vient d'une manière personnelle de sentir les choses et varie avec l'état del'esprit.

Une découverte n'est que la manifestation d'une idée neuve et féconde qui surgit à propos d'un fait trouvépar hasard ou autrement.

Aussi n'y a-t-il pas de règles pour faire les découvertes; mais une bonne méthode peutfavoriser le génie de l'invention.§ III.

— L'expérimentateur doit toujours garder une entière liberté d'esprit, assise sur le doute ; car les vérités qu'ildécouvre sont partielles et provisoires; elles n'ont pas la nécessité des vérités mathématiques.

« Il ne faut croire ànos observations, à nos théories, que sous bénéfice d'inventaire expérimental.

» Il faut se garder des idées fixes etaccepter les résultats de l'expérience tels qu'ils se présentent, avec tout leur imprévu et leurs accidents.§ IV.

— La méthode expérimentale doit être indépendante, indépendante de toute idée formée à l'avance, commedes idées des autres.

Le respect mal entendu de l'autorité personnelle constituerait un véritable obstacle auxprogrès de la science.

Dans les sciences expérimentales, les grands hommes ne donnent pas de vérités absolues etimmuables, ils aident et guident la marche de la science, et la portent en avant.§ V.

— Les philosophes admettent deux raisonnements : le raisonnement déductif et le raisonnement inductif.

Enpratique il est bien difficile de séparer la déduction de l'induction.

Il n'est pas exact de dire que la déductionn'appartient qu'aux sciences mathématiques.

« Les deux formes appartiennent à toutes les sciences possibles,parce que dans toutes les sciences il y a des choses qu'on ne sait pas et d'autres qu'on sait ou qu'on croit savoir.».

Quand on étudie des sujets qu'on ne connaît pas on induit, et en ce sens les mathématiciens font des inductionspour arriver aux principes dont ils tirent ensuite les conclusions.

L'esprit, en quelque science que ce soit, procèdetoujours instinctivement d'un principe qu'il a acquis ou qu'il invente par hypothèse, et ainsi il va toujours du général. »

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