Mort à crédit de Céline
Publié le 05/04/2013
Extrait du document
Publié en 1936, Mort à crédit a eu un succès moins retentissant que le Voyage au bout de la nuit, mais il a confirmé son auteur en tant qu 'écrivain majeur de son époque.
«
EXTRAITS ~~~~~~~-
« Nous deux, Robert et
moi, c'était le moment
qu'on grimpe sur le fourneau de la
cuistance pour assister
au spectacle ...
»
Ferdinand, souffre-douleur
d'une mère médiocre
Ma mère, à force de trembler, elle avait
perdu toute pudeur.
..
Elle allait partout dans
le Passage
et aux environs rabâcher mes
avatars...
Elle sollicitait les
conseils des autres parents..
.
de
ceux qu'avaient aussi des
chtourbes avec leurs moutards
...
qu'ava ient ramassé des bûches
en apprentissage...
Comment
qu'ils s'étaient dépêtrés?
...
« Je suis toute prête, qu'elle
ajoutait, à faire encore des
sacrifices ! ...
Nous irons, tant
pis ! jusqu 'au bout !
...
»
Tout ça c'était bien éloquent,
mais ça me sortait
pas de la
pétasse.
J'avais toujours pas de
boulot.
La vie dans le Passage
Les voisins, ils se passionnaient
à propos de mon drame ...
Les
clients de
la boutique aussi.
Dès
qÛ'ils me connaissaient
un peu,
ma mère les prenait
à témoin ..
.
Ça arrangeait pas les affaires ..
.
Même Monsieur Lempreinte
à la
« Coccinelle » il a fini par s'en
mêler.
..
C'est vrai que mon père
ne dormait plus,
qu'il prenait
une mine d'agonique.
Il arrivait si épuisé,
qu'il chancelait dans tous les couloirs en
transbordant son courrier
d'un étage à
l'autre ...
Il était aphone en plus, il avait la
voix de rogomme à force de hurler ses
conneries ...
Ferdinand au Meanwell College
Moi j'avais fait la connaissance d'un petit
môme bizarre, qui me poignait presque tous
les soirs.
Il me proposait bien d'autres trucs, l'avait
des idées ...
Il faisait marrer toute
la
chambre avec ses drôleries...
Il faisait
le chien ...
Wouf ! Wouf !
qu'il aboyait, il
cavalait comme un clebs, on le sifflait, il
arrivait,
il aimait ça qu'on le commande ...
Les soirs de vraiment grande tempête, que
ça s'engouffrait au plus fort, dans
l'im
passe, sous nos fenêtres, y avait des paris
à propos du réverbère , si le vent l'étein
drait?
Les pensionnaires de la ferme
à Blème-le-Petit
Nos pionniers eux ils prospéraient, ils
profitaient de
l'indépendance! ...
On leur
imposait pas de contrainte, ils faisaient en
somme tout ce qu'ils voulaient!
...
même leur discipline...
eux-
mêmes !
...
Ils se foutaient des ra-
clées terribles ...
Le plus petit,
c'était
le plus méchant, toujours
le Dudule avec ses sept ans
et
demi ! ...
L'aînée du troupeau ça
nous faisait presque une
jeune
fille : la Mésange Rimbot, la
blonde aux yeux verts, avec des
miches bien ondoyeuses
et des
nénés tout piqueurs ...
Madame
des Pereires, qu'était pas extrê
mement naïve elle,
s'en méfiait
bien de
la donzelle ! surtout au
moment de ses règles !
Gallimard, 1951
« Je tombe là sur une horde, des
possédés tout hagards, des brutes
mugissantes écumeuses ...
»
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Céline est difficile à lire : il invente un
style qu'il est seul à pouvoir maîtriser.
Rentrer dans son langage,
c'est déjà voir le
monde avec une autre couleur, des tons gris,
noirs, affreux qui sont
le réceptacle de la
lumière alors vraie, belle, crue.
»
n'est plus la jeunesse que Céline poursuit,
c'est un appendice grotesque qu'il place sur
son parcours.
» Maurice Bardèche, Louis
F erdinand Céline,
Table Ronde, 1988.
cynisme
appuyé (mais les événements
appuient plus fort encore), ses grandes
gueulantes, ses bonnes ou mauvaises
raisons, son double aspect de petit
bourgeois râleur et d'aventurier
correspondent
à un aspect évident du
monde moderne.
Son génie littéraire en
aurait fait un poète dans une autre époque.
V.
Malleret, Sur Céline.
« Mort à crédit est une leçon amère que
Céline tire de sa propre vie.
(
...
)Mais
l'affabulation transforme les personnages,
les situations, les scènes, le langage.
( ...
)Ce
1 Lausat /Ex plorer 2, 3, 4 d ess ins de Tar di, Futuropoli s, 1991
«En fait, son ambition, c'était autre chose
qu'écrire: s'insurger, défendre une cause
au
moyen d'un langage dur et violent, dont il
n'avait pas encore trouvé le secret, bref,
dépasser la littérature.
» Dominique de
Roux,
La Mort de Céline , Pierre Bourgeois,
1966.
« Son pessimisme
chargé de vitalité, son (
...
) Encore une fois, il est très naturel de ne
pas aimer Céline.
Lui non plus n'aime pas
tout le monde.
Le Diable et le Bon Dieu se
disputent très fort à son sujet.
» Roger
Nimier,
Journées de lecture, Gallimard,
1965 .
CÉLI NE03.
»
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