L'oeuvre d'Apulée
Publié le 18/04/2012
Extrait du document
APOLOGIE ou DE LA MAGIE
FLORIDES
SUR LE DÉMON DE SOCRATE
SUR PLATON ET SA DOCTRINE DU MONDE
LES MÉTAMORPHOSES OU L'ANE D'OR
ŒUVRES PERDUES
POÈMES
DISCOURS
DIVERS TRAITÉS, etc.
«
tieuses; le monde gréco-romain était envahi par les astrologues et les thaumaturges, et les miracles
d'Apollonius de
Tyane concurrençaient ceux d'un nouveau dieu venu de la Judée.
Apulée se fit
initier à
de nombreux cultes; il étudia les sciences naturelles, en même temps, il lut sans doute
nombre de « fables milésiennes », avant-goût des Mille et une Nuits, qu'inspiraient le merveilleux,
l'aventure et l'amour.
..
Muni de cet imposant bagage, il eut le bon esprit de ne pas demeurer à
Rome,
où la percée était plus laborieuse, et reprit le chemin de Carthage, qui lui fit fête.
Il y
enseignait depuis plusieurs années,
quand, vers la trentaine, repris par son amour du voyage, il
partit pour l'Egypte, dans l'espoir, sans doute, d'y découvrir de l'inconnu.
Et c'est alors que se
place l'événement qui nous l'a fait le mieux connaître, car il lui a donné l'occasion de parler de
lui-même :
je veux dire son mariage.
En cours de route, la maladie le força de s'arrêter à Oea,
l'actuelle Tripoli.
Il y retrouva un jeune homme, Pontianus, qu'il avait connu à Athènes.
Plein
d'admiration pour Apulée, Pontianus l'engagea à descendre chez lui et le présenta à sa mère, qui
depuis quatorze ans languissait dans le veuvage.
Ce qui devait arriver arriva: Pudentilla, tel était
son nom, que tourmentaient le retour d'âge et l'appel des sens insatisfaits, ne put résister aux
charmes d'Apulée; il était jeune, beau, spirituel, galant sans doute; elle résolut, sur les conseils
mêmes
de sop fils, paraît-il, de l'épouser.
Pour complaire à l'une comme à l'autre, Apulée, magna
nime, y consentit.
En vue d'éviter les commérages, le mariage se fit discrètement, à la campagne.
Mais la famille de la dame, frustrée des droits qu'elle croyait avoir à son héritage, entreprit
d'accuser Apulée d'avoir usé de magie pour séduire son épouse; on songea même un moment à
lui
imputer la mort de Pontianus, que la maladie avait emporté peu après la noce.
Je ne puis
rappeler tous les détails savoureux et pittoresques de cette campagne qu'Apulée rapporte tout
au long dans son plaidoyer.
Il prononça lui-même sa défense, qu'il rédigea par la suite et qui
nous est parvenue sous le titre d'Apologie ou de la magie : livre doublement précieux,
document d'époque qui nous révèle l'extension de la croyance aux forces surnaturelles; document
humain où Apulée nous apparaît avec tous les aspects de son talent, verve, facilité, amour de la
digression et de l'amplification, esprit de repartie, subtilité dans la chicane, usage parfois absusif
de toutes les ressources de la rhétorique; où il nous dévoile aussi tous les aspects de sa personne et
de son caractère : un parfait contentement de soi, un cynisme ingénu, qui ne craint pas de se
contredire et fait tourner à sa propre louange les pires accusations dont il est l'objet.
De quel
ton condamne-t-il l'audace criminelle de ses adversaires! Ce n'est point seulement sa
propre cause qu'il défend, mais celle de la philosophie, dont la majesté s'offense du plus léger
reproche comme du grief le plus grave.
On l'accuse d'immoralité : mais sa vie est chaste, si parfois
ses écrits le sont moins.
Du reste n'a-t-il pas d'illustres précédents? Et le voilà qui fait défiler,
avec citations à
l'appui, toute une liste d'écrivains qui ont encouru le même blâme.
Sa magie?
Pauvres ignorants qui en ignorent la véritable nature, et qui, de plus, ont pris dans le cas présent
pour une opération magique ce qui n'était qu'une recherche scientifique.
Et c'est un cours sur les
poissons.
De cupidité? Ne s'est-il pas contenté d'une dot des plus modestes, réservant aux fils de
Pudentilla la fortune qui leur revenait? Ainsi s'effondre sous ses coups redoublés le fragile édifice
construit
par ses adversaires.
Et que valent ces adversaires? Qu'on lise les portraits qu'il en trace :
celui
du beau-père de Pontanius, l'horrible Rufinus, « entrepreneur de toute espèce de procès,
inventeur de toute espèce de mensonges, architecte de toute espèce de simulations, pépinière
de toute espèce de vices, réceptacle, bauge, lupanar de débauches et de tripots, ...
se prêtant
dès l'enfance à toutes les turpitudes de ceux qui l'avaient émasculé, puis, jeune homme, pantin
sans os et sans nerfs, dansant les mimes avec une mollesse dépourvue d'art et de science, car de
l'histrion, il n'avait, dit-on, rien que l'impudeur».
Et, après avoir prostitué sa femme, le voilà qui
livre à Pontianus sa fille : « Elle s'en vient donc, nouvelle mariée, chez son époux, sans crainte et
sans émoi, dépouillée de toute pudeur, flétrie dans sa fleur, parée d'un voile défraîchi, redevenue
vierge après une récente répudiation, se parant du nom de pucelle sans en avoir la pureté ...
»
L'issue du procès ne semble pas douteuse.
Du reste, s'il eût été condamné, Apulée n'aurait pas
songé à livrer.
au public sa plaidoirie.
Mais l'acquittement n'avait pas convaincu tout le monde
de son innocence.
Apulée, suivi de sa femme, reprit le chemin de Carthage où les ragots de la
province avaient moins d'audience, où il comptait bien trouver un public nombreux et prêt à
l'applaudir.
Son attente ne fut pas trompée.
La ville le combla d'honneurs, lui dressa des statues,
fit de lui son grand prêtre, son orateur et son poète officiel, et s'il n'exerça pas de magistrature.
»
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