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Traduire est-ce trahir?

Publié le 10/03/2005

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  II-Les paradoxes de la traduction.               Traduire c'est donc apparemment se débattre dans une contradiction : il faut composer avec la souplesse exigée par la volonté de communiquer une oeuvre et avec la rigueur exigée par le respect du modèle. Il faut donc maintenir ensemble la communication et le bien-écrire, il faut que le passage s'opère avec le moindre d'écart possible. Chaque traduction est un cas particulier, il s'agit toujours de trouver la juste mesure entre l'intelligibilité (communication) et le respect du style de l'auteur, pénétré des structures propres à sa langue.             Un second paradoxe apparaît : traduire c'est se heurter aux idiomes d'une langue et à sa spécificité mais en même temps l'entreprise de traduction repose sur l'idée que le sens n'est pas prisonnier de la langue. Traduire ce ne serait donc pas tant composer à la limite de la trahison, mais extraire, n'est-ce pas avant tout le sens qui passe d'une langue à l'autre, un fond ?             Si traduire c'est extraire l'on comprend mieux le statut de l'intraduisible, l'intraduisible c'est lorsque le sens est rivé directement au mot, lorsqu'il n'y a plus de distinction possible entre le mot écrit et parlé et son usage, la philosophie allemande offre des exemples de ce type d'imbrication où le concept est stratifié dans la langue et en paraît inextricable : l'aufheben chez Hegel, le Dasein chez Heidegger (que l'être-là de Sartre ne traduit pas exactement) ou même l'Erscheinung chez Kant (qu'on traduit par phénomène ce qui ne rend pas compte de la dimension de l'apparaître, erscheinen signifiant apparaître). Comment traduire de telles inventions sans inventer à son tour ? Autrement dit traduire est-ce suivre un protocole, s'appliquer à marcher droit dans une allée bordée d'erreurs, ou bien cela n'exige-t-il pas autre chose ?   III-Traduire ce n'est pas une simple répétition.

On emploie traduire dans certaines expressions pour rendre compte de la difficulté d’une opération, par exemple lorsque l’on dit « traduire ses sentiments «. Le sens commun présuppose que traduire c’est toujours trahir, que la diversité des langues exige que le passage entre l’une et l’autre se paie de la perte de certaines richesses, et relève plus de l’interprétation que d’un système idéal de correspondances. Dès lors traduire ce serait toujours composer à la limite de la trahison. Mais n’est-ce pas là une vision purement scolaire de la traduction, puisque la traduction « idéale « est impossible pourquoi toujours rester prisonnier de son ombre ? Traduire n’a-t-il pas plutôt parti liée au sens, à la pensée, qu’à la langue et à ses particularités ? Ne faut-il pas se libérer d’une forme que de toute façon l’on ne pourra restituer idéalement, et viser avant tout à faire surgir un fond ? C'est-à-dire que peut-être traduire exige d’abord d’être entièrement pénétré d’une œuvre pour la faire passer dans une autre langue, et d’être donc libéré du seul souci de la précision, qui condamnerait à la médiocrité.

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