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Troglodytes

Publié le 07/05/2013

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Lettre XII - Lettres Persanes, Montesquieu « Qui pourrait représenter ici le bonheur de ces Troglodytes ? «. C'est par cette question rhétorique, mais surtout essentielle, que débute cet extrait de la Lettre XII des Lettres persanes. Montesquieu répond immédiatement à cette question : c'est « le peuple « qui gouverne cet Etat. L'emploi du conditionnel, les caractères imaginaire de ce peuple et utopique de cet Etat en font un idéal politique. Il est fondé sur le principe démocratique de la vertu. Etymologiquement la démocratie vient du grec ancien demos le peuple et cratein commander, diriger : le pouvoir démocratique émane du peuple. Dès lors, en quoi la démocratie permet-elle aux Troglodytes d'atteindre le bonheur ? Pour Montesquieu, la vertu politique permet au peuple de vivre dans le bonheur (I). Ce principe de gouvernement s'appuie sur une organisation politique particulière (II). Le principe de vertu politique contribue au bonheur La primauté à l'intérêt général : l'idéal de la vertu républicaine A la ligne 24, Montesquieu nous explique qu'après l'anarchie « des premiers Troglodytes, et leurs malheurs « décrite dans la Lettre XI, le « nouveau peuple « [chante] « la vertu renaissante et sa félicité.« Dans le Livre IV, chapitre 5 de De l'Esprit des lois, près de trente ans plus tard, Montesquieu donnera une définition précise de la vertu politique : « La vertu politique est un renoncement à soi-même, qui est toujours une chose très pénible. On peut définir cette vertu, l'amour des lois et de la patrie. Cet amour, demandant une préférence continuelle de l'intérêt public au sien propre, donne toutes les vertus particulières. « Le principe de vertu politique consiste donc tout d'abord à privilégier l'intérêt général sur les intérêts particuliers. Ainsi, toutes les décisions sont prises en « assemblées «, les repas sont pris en commun, le travail est mis en commun pour l'intérêt général. Usbek emploie les pronoms « ils « ou « on « qui désignent l'ensemble des Troglodytes et non l'individu : « ils instituèrent «, « on faisait ensuite des festins «, « on allait au temple «, « les boeufs ramenaient la charrue,  ils s'assemblaient «, « ils chantaient «, « ils célébraient «, « bientôt, ils s'abandonnaient au sommeil «, et « ...

« leurs sentiments sont donc vrais, ce ne sont pas des mariages arrangés, comme cela était fréquent à l’époque de Montesquieu.

Ce souci de l’intérêt général doit être aussi permanent.

Le texte présente une journée de la vie des Troglodytes : Usbek les décrit du lever au coucher.

Le réveil : « dès qu’il ouvrit les yeux », le déjeuner : « on faisait ensuite des festins », « le soir », le travail agricole : « lorsque les troupeaux quittaient les prairies », le dîner : « dans un repas frugal », et enfin la nuit : « ils s’abandonnaient à un sommeil ».

Cela donne l’impression d’une journée habituelle, que chaque jour se déroule de la même manière.

Cela montre donc la permanence de l’intérêt général. 2.

D’autres vertus essentielles L’intérêt général se traduit aussi par l’amour de la patrie et le renoncement à soi- même.

Usbek écrit que les Troglodytes « ne savaient désirer que pour leurs compatriotes ».

L’amour de la patrie est une notion centrale.

L’abnégation de soi en est corrélative : « Les filles venaient y apporter le tendre sacrifice de leur cœur ». Le principe de vertu politique repose ensuite sur la justice.

La tournure intensive « si juste » insiste sur la justice du peuple Troglodyte.

Les mots « ils chantaient les injustices des premiers Troglodytes » laissent entendre qu’ils sont désormais justes.

Usbek parle aussi du « bonheur d’une condition toujours parée d’innocence ».

Le terme innocence se rattache au champ sémantique de la justice.

Les balancements dans le deuxième paragraphe « jeunes filles … jeunes garçons », « donner … recevoir », « père … mère » expriment enfin l’idée du juste équilibre. Platon voyait en la justice « l’harmonie qui résulte du fait que chacun accomplit la tâche qui lui a été dévolue en fonction de ses aptitudes dans une société idéalisée ».

Ainsi, la notion de justice est liée avec celle d’harmonie, qui est suggérée dans ce texte par les « accords » de la musique, les danses et les chants. Le peuple des Troglodytes croit en la justice divine : « Ils célébraient les grandeurs des Dieux, leurs faveurs toujours présentes aux hommes qui les implorent, et leur colère inévitable à ceux qui ne les craignent pas.

» D’ailleurs, le fait qu’ils craignent des êtres supérieurs, les dieux, témoignent de leur humilité.

Seul un être divin peut dominer ce peuple : aucun Troglodyte ne peut dominer les autres, ils sont égaux. Enfin, l’amour de l’intérêt général aboutit à l’établissement de vertus particulières à la fois civiques et morales : celles qui transparaissent ici sont la charité et la frugalité. La charité est par définition la vertu qui porte à faire ou à désirer le bien d’autrui.

Ainsi, les Troglodytes « ne savaient désirer que pour leurs compatriotes ».

La répétition dans tout le troisième paragraphe de la tournure « ne…que » à trois reprises insiste et amplifie à la fois cet altruisme.

La charité est aussi exprimée dans la phrase « ils se faisaient des présents où celui qui donnait croyait toujours avoir l’avantage » : le don leur apporte plus de bonheur que de recevoir.

Ils en viennent même à « s’abandonner à un sommeil que les soins et des chagrins n’interrompaient jamais » ils pensent à leurs compatriotes même dans leur sommeil.

Le bonheur des Troglodytes s’accompagne aussi d’une volonté de ne pas nuire au bonheur d’autrui.

Ainsi, le mot « innocence » peut être aussi interprété au sens étymologique du terme : innocent vient du latin in-noceo : ne pas nuire.

Le Troglodyte veille à ne pas nuire à son prochain.

Cette vertu sera reprise par l’Assemblée Constituante de 1789 dans l’article 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ».

Le respect de cette vertu assure la liberté chez les Troglodytes.. »

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