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Cours: THEORIE ET EXPERIENCE (6 de 7)

Publié le 22/02/2012

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theorie

 

III) LA RELATION NECESSAIRE ENTRE THEORIE ET EXPERIENCE

-        Les analyses développées précédemment analysent séparément la théorie et l’expérience, en privilégiant l’une au détriment de l’autre. Comment contester l’inductivisme sans renoncer à donner un fondement sûr à nos connaissances ? Comment échapper au scepticisme, sans pour autant tomber dans le dogmatisme ? Si l’expérience n’est pas un fondement sûr, n’est - elle pas, néanmoins, le seul guide possible faisant du savoir scientifique un savoir exemplaire ? Or, nous allons voir qu’on ne peut pas plus concevoir un rapport à la réalité empirique qui serait indépendant de toute construction rationnelle préalable, qu’une théorie qui se réduirait à son aspect formel, sans aucun souci de penser le réel.

A)   LA THEORIE KANTIENNE

1) Que pouvons-nous connaître ?

-        Pour la TL, la pensée de Kant sera étudiée en profondeur à partir de Prolégomènes à toute métaphysique future…, la troisième oeuvre au programme pour l’oral du second groupe d’épreuves du baccalauréat.

-         Kant, dans la préface de la Critique de la raison pure, montre que notre raison ne peut se borner à l’expérience : elle pose des questions métaphysiques (Dieu, l’âme, le monde). Le scepticisme est intenable : les mathématiques et la physique sont parvenues à des connaissances universelles et nécessaires; si la causalité n’est qu’une habitude, comment se fait-il que les lois découvertes par Galilée et Newton permettent de prévoir les phénomènes sans risque d’erreur . Nécessité de faire la critique de la raison par la raison, de discerner ce que la raison peut faire et ce qu’elle est incapable de faire.

-        Selon Kant, nous ne connaissons la réalité qu’à travers les formes a priori de la sensibilité et de l’entendement :

1.     La sensibilité désigne la capacité de recevoir des représentations grâce à la manière dont nous sommes affectés par les objets ; c’est au moyen de la sensibilité que les objets nous sont donnés ;

  1. L’intuition est le mode par lequel une connaissance se rapporte à des objets ; l’intuition suppose : un objet donné, la manière dont l’objet affecte notre esprit.

-        Les objets qui nous sont donnés par la sensibilité ne peuvent être coordonnés dans l’intuition selon certains rapports que par une forme : la forme est la structure qui ordonne la matière ; la matière est le contenu divers de la sensation. La forme est a priori dans l’esprit : l’espace et le temps sont les formes a priori de la sensibilité : l’espace, forme du sens externe, permet d ‘ordonner les objets hors de nous ; le temps, forme du sens interne, permet à l’esprit de percevoir ses étapes intérieures.

-        Avec la sensibilité, l’entendement est la seconde source de connaissance. L’entendement est le pouvoir de juger, d’organiser, sous la forme de catégories, nos représentations de la réalité.

-        Autrement dit, la faculté de connaître de l’homme se fait par l’intermédiaire de sens, qui ne perçoivent que dans la dimension du temps et de l’espace, et de notre entendement, qui ne peut faire autrement que d’admettre l’antériorité de la cause par rapport à l’effet.

-        Il est donc indifférent qu’il existe ou non une réalité indépendante de l’observation : cette réalité est certes supposée être la cause de nos perceptions et de notre connaissance, nous ne savons et ne pouvons rien savoir sur elle. L’idée d’une réalité en soi n’existe qu’à titre de présupposé logique : objet d’hypothèses, elle relève d’une foi indémontrable.

2) Les jugements analytiques et synthétiques

-        S’il ne peut y avoir de connaissance sans expérience, est-ce à dire que toute connaissance dérive de l’expérience ? L’expérience n’est qu’un matériau brut, un donné épars et chaotique. Elle ne peut nous fournir de connaissances universelles et nécessaires. Kant distingue ainsi deux sortes de connaissances : les connaissances a posteriori qui dérivent de l’expérience (par exemple, mesurer les angles d’un triangle avec un rapporteur), les connaissances a priori qui ne dérivent pas de l’expérience, qui la précèdent et qui en sont la condition (ces connaissances a priori sont nécessaires et universelles : lorsque je démontre, par exemple, que la somme des angles d ‘un triangle est égale à deux droits, je n’ai pas recours à l’expérience, à la mesure des angles avec un rapporteur.

-        Il convient, à partir de là, de distinguer trois catégories de jugements : les jugements analytiques par lesquels on se contente d’expliciter un concept, d’analyser son contenu; ce jugement ne nous apprend rien; il est a priori puisque nous n’avons pas besoin de recourir à l’expérience (par exemple, lorsque j’affirme que tous les corps sont étendus : le prédicat “étendue” est lié au mot “corps” de façon nécessaire). Les jugements synthétiques : le prédicat n’est pas contenu dans le sujet, c’est un jugement d’expérience (ex : tous les corps sont pesants : le prédicat “pesant” est différent de ce que l’on pense habituellement dans le simple concept d’un corps en général). Les jugements synthétiques a priori qui ne s’appuient pas sur l’expérience mais qui nous apprennent quelque chose de nouveau (ex : les jugements mathématiques (“ 2 + 3 = 5) sont des jugements synthétiques a priori, ainsi que les principes scientifiques (“ tout phénomène a une cause “).

-        Kant se demande alors comment les jugements synthétiques a priori sont possibles, ce qui l’amène à envisager deux sources de la connaissance. Kant part de la possibilité des jugements synthétiques a priori qu’on constate essentiellement en mathématiques pour affirmer que notre raison a des structures innées, des formes a priori préexistant dans l’esprit à tout donné concret, à travers lesquelles elle appréhende le monde (a priori veut dire ce qui est antérieur à l’expérience), dispose les données sensibles dans un certain ordre, les lie entre elles par des rapports nécessaires.

-        Les jugements synthétiques a priori sont des jugements qui ne dérivent pas de l’expérience et qui pourtant nous apprennent quelque chose de nouveau (par exemple : tout changement a une cause : j’affirme l’universel et le nécessaire sans recourir à l’expérience, mais j’ajoute à l’expérience quelque chose de nouveau qui est la capacité d’anticiper). Cette possibilité d’ajouter quelque chose au donné nous vient de la présence innée en notre esprit des formes a priori de l’entendement, c’est-à-dire des catégories (les catégories comme celles de la causalité, de la quantité, de la nécessité, de la dépendance, etc.) : les objets doivent être pensés, organisés intellectuellement par l’entendement, faculté reliant les sensations grâce aux catégories. Il y a aussi les formes a priori de la sensibilité (l’espace et le temps), c’est-à-dire des structures intuitives issues du sujet et permettant d’ordonner les objets hors de nous et en nous.

-        A travers nos formes a priori, nous n’appréhendons le monde que sous forme de “phénomènes”, et les choses telles qu’elles sont en dehors de nous (“les choses en soi”), indépendamment de la connaissance que nous pouvons en avoir, nous sont définitivement inaccessibles. Nous ne pouvons qu’en poser l’existence, condition de notre perception, mais nous ne pouvons pas en connaître la nature. Temps, espace et catégories concernent le mode d’appréhension des objets. Sans eux, aucune connaissance ne serait possible. En clair, on ne peut parler des choses que telles qu’elles m’apparaissent et non telles qu’elles sont en elles-mêmes. Je ne peux donc saisir que ce qui s’offre à mon champ perceptif dans le cadre des formes pures de la sensibilité, l’espace et le temps, et dans le cadre des catégories. Ce sont les phénomènes, c’est-à-dire tout objet d’expérience possible, ce que sont les choses pour nous, relativement à notre mode de connaissance, par opposition au noumène, la chose en soi, que l’esprit peut penser, non point connaître. Dieu, par exemple, est un noumène, une réalité possible, mais que nous ne pouvons atteindre.

-        En somme, avec Kant, la connaissance devient une soumission de l’objet au sujet. L’esprit construit lui-même grâce à ses principes a priori l’ordre de l’univers. Notre faculté de connaître est législatrice : elle est ordonnatrice et structurante. L’expérience n’est qu’une construction, c’est l’entendement qui fournit à l’expérience ses cadres, ses formes, ses concepts.

B) LA DEMARCHE EXPERIEMNTALE : CRITIQUE DE L’INDUCTIVISME

-        Si la théorie n’est pas soumission passive à l’expérience, nous allons voir, à travers l’étude de la méthode expérimentale, que le fait expérimental est tout entier imprégné de théorie, de sorte que la démarche expérimentale, contrairement à la thèse empiriste, ne consiste pas tant à tirer l’idée du fait que le fait de l’idée.

1) Critique du raisonnement inductif

-        On peut, dès lors, faire la critique du raisonnement inductif et de l’empirisme. Aucune connaissance inductive ne peut être considérée comme certaine : les observations n’étant pas reproductibles à l’infini, il est toujours à craindre qu’une nouvelle observation vienne démentir les précédentes. De plus, la « répétabilité « n’est pas une propriété de la démarche scientifique : un savant ne répète jamais deux fois une même expérience; il s’efforce de faire varier les données et les paramètres pour apporter à la loi des confirmations toujours nouvelles.

-        Bertrand Russell a mis en évidence le cercle vicieux du raisonnement inductiviste. Rien ne garantit la certitude de l’inférence permettant de passer d’un énoncé singulier (“l’eau de mon petit déjeuner a bouilli ce matin à 99, 3 ° ”) à des énoncés universels (“toute eau bout à 100 ° “). Rien ne garantit que mon eau bouillira demain à 100 °, que le soleil se lèvera à nouveau; il n’y a aucune nécessité logique à ne pas concevoir le contraire. Russel donne l’exemple d’une dinde « inductiviste « amenée à une ferme d’élevage : le premier jour, on la nourrit à 9 h du matin; elle note l’énoncé d’observation : “un tel jour, j’ai été nourri à 9 h du matin”. Idem pour les 2ème, 3ème, 4ème jours. Elle fait alors varier les conditions expérimentales : qu’il neige ou qu’il fasse beau, que ce soit un homme ou une femme, on lui donne toujours à manger à 9 h du matin. Elle se croit donc autorisée le principe général: “on me donne toujours à manger à 9 h du matin”. Le lendemain est jour de Noël et à 8 h, on lui coupe la tête.

-        Pour prouver la valeur du raisonnement inductif, il faudrait utiliser un syllogisme du type: le cours de la nature est uniforme; j’ai toujours constaté que tel objet a été accompagné de telle ou telle propriété; je peux donc généraliser et prévoir que d’autres objets de même nature seront accompagnés des mêmes effets ou propriétés. On aboutit alors à une aporie, une impasse logique, un cercle vicieux : comment établir la vérité d’une proposition “le cours de la nature est uniforme”, qui est elle-même une proposition générale, sinon par induction ?

2)     Le fait et l’hypothèse

-        Sans l’idée et la théorie, le fait expérimental n’aurait aucune existence. Cela se vérifie à plusieurs niveaux : au niveau de l’observation proprement dite (nécessité d’un protocole expérimental et de la mesure), au niveau théorique (unification des lois dans une synthèse générale) ; il s’agit de faire voir (stade descriptif), de mesurer (stade quantitatif), de faire apparaître la loi (stade théorique).

-        Exemple, la loi de Galilée :

1.     Faire voir : expérience de la tour de Pise ; utilisation de deux boulets, de masse très différentes, offrant néanmoins la même prise à la résistance de l’air ; lâchés en même temps du sommet, ils atteignent le sol simultanément ;

2.     Mesurer : construction de plans inclinés de 14 mètres de long, afin de ralentir la chute et des clepsydres (les quantités de temps sont évaluées à partir des masses d’eau écoulées) ; la loi est quantitativement déterminée ;

3.     Faire apparaître la loi : cette mesure présuppose une théorie plus générale qui est celle de l’action d’une force constante sur un corps matériel (avec la notion d’accélération ou modification de la vitesse d’un corps en mouvement).

-        En réalité, l’établissement des lois qui fait passer une science de la phase inductive à la phase déductive suppose l’élaboration d’une hypothèse et la vérification de cette dernière par l’expérimentation (physique, biologie) et par l’observation (astronomie). Il faut préciser que seules les sciences de la nature et les sciences humaines sont susceptibles d’utiliser l’expérimentation : les sciences formelles (logique, mathématiques) sont indépendantes de l’expérience, elles ne contiennent aucune information sur le monde et sont un pur langage permettant d’organiser les connaissances. La possibilité d’expérimenter dépend beaucoup de l’objet et de l’état d’avancement de la science. 

-        Selon Claude Bernard (Introduction à la médecine expérimentale), il faut distinguer observation et expérience : l’observation est passive, l’expérimentation est une investigation active. Dans l’expérience, la nature répond aux questions qu’on lui pose. L’expérience suppose l’existence préalable de problèmes et la formulation d’hypothèses (solution anticipée et conditionnelle des problèmes posés). L’expérience est alors la vérification de l’hypothèse; sans hypothèses préalables, pas d’expérimentation scientifique. L’observation est le résultat d’un raisonnement expérimental. Claude Bernard subdivise la démarche expérimentale en trois étapes : 

1.     formulation d’une hypothèse;

2.     expérimentation;

3.     contrôle de l’hypothèse par l’observation des phénomènes expérimentalement provoqués.

-        Les théories ne sont pas des reflets mais des tremplins. Antériorité du point de vue théorique : si l’observation et l’expérience n’étaient pas guidées par des projets théoriques préalables, un scientifique ne saurait jamais quels faits recenser lors de l’expérimentation. L’observation est elle-même tout aussi active que l’expérimentation : elle suppose des instruments complexes (télescope, microscope…) qui sont la matérialisation de théories; l’observation est toujours motivée par un ensemble de découvertes antérieures et de recherches en cours (personne d’autre qu’un physiologiste n’aurait pu observer la couleur anormale de l’urine des lapins à jeun dont parle Claude Bernard).

-        C’est dire que le constat brut n’apporte pas grand – chose à la connaissance : l’huissier, par exemple, peut toujours constater des faits prétendus magiques ; mais cela n’a pas grand sens s’il n’est pas compétent dans le domaine de l’illusionnisme. Il faut, en effet, connaître les procédés pour pouvoir les représenter. Je ne sais pas ce que je vois si je ne sais pas ce que je dois voir.

-        D’où la notion bachelardienne de “faits polémiques”. Le point de départ de la recherche n’est pas le fait empirique considéré à part, mais le problème posé par le fait, la contradiction entre le fait découvert et les conceptions théoriques antérieures. Exemple : en octobre 1772, Lavoisier soumet un morceau de plomb à la chaleur du soleil, concentrée par une lentille, et fait brûler le plomb. Le plomb calciné a augmenté de poids. Ce fait est en contradiction avec la théorie du phlogistique acceptée par les chimistes du XVIIIe siècle : on pensait, depuis l’Antiquité, que lorsqu’un corps brûle, une certaine substance s’échappe de lui sous forme de flamme (le phlogistique d’après Stahl). Lavoisier refuse cette conception issue de la physique d’Aristote : c’est parce qu’il était libéré de cette physique que le fait de l’augmentation du poids du métal calciné prenait pour lui la valeur de problème.

-        Ainsi l’hypothèse est-elle le fondement d’une proposition, elle relève, selon Bachelard, de l’imagination rationnelle : effort de l’intelligence pour résoudre la contradiction posée par le fait-problème; le savant ne répond pas directement à la question “pourquoi ?”; il procède par le détour d’une question nouvelle : “pourquoi pas ?”

-        Exemples. En 1643, les fontainiers de Florence, tirant l’eau d’une citerne avec une pompe aspirante, constatent qu’au-delà de “18 brasses” (10,33 m) l’eau ne monte plus dans la pompe vide. L’hypothèse de la pression atmosphérique de Torricelli permet de comprendre ce phénomène. Mais l’hypothèse n’a de signification scientifique que si elle est vérifiable, soumise à l’épreuve de l’expérience. De même, pour rendre compte des perturbations de la planète Uranus, le Verrier fait l’hypothèse d’une planète inconnue (qu’il appelle Neptune) dont la force d’attraction expliquerait les perturbations d’Uranus. Cette hypothèse est vérifiée le en 1846 par l’astronome Gall qui l’aperçoit effectivement. Ici c’est l’hypothèse de la planète possible qui donne l’idée de chercher dans le ciel. Ce n’est pas le fait qui suggère l’hypothèse, c’est l’hypothèse qui, guidant l’esprit, provoque et dirige l’expérience : elle joue un rôle à la fois théorique (proposer une explication possible) et un rôle pratique (diriger l’expérience qu’elle jugera).

-        Qu’est donc un fait scientifique ? La réalité scientifique n’est pas la réalité spontanément et passivement observée. C’est une réalité construite. Le fait n’a de signification scientifique que lorsqu’il est transposé de façon à pouvoir nous livrer des caractéristiques objectives, mesurables. Par exemple, la température devient un fait scientifique lorsqu’elle n’est plus sentie sur la peau mais lue sur le thermomètre. Apprécier une température, c’est mesurer la dilatation d’une colonne de mercure sur une échelle graduée. L’observation scientifique. L’observation scientifique suppose des instruments, elle requiert une manipulation. L’instrument suppose lui-même une théorie (par exemple, le thermomètre suppose la théorie de la dilatation) : “un instrument, c’est une théorie matérialisée” (Bachelard).  

-        Ainsi le fait scientifique ne prend-il tout son sens qu’en fonction des théories dont la science dispose au moment où le fait est observé. Donnons un exemple. En 1856, la mise au jour de la partie supérieure d’un étrange crâne près de Dusseldorf, dans la vallée dite Néanderthal, est loin d’avoir passionné les esprits. Virchov la considérait comme une “anomalie de conformation relevant de l’idiotisme” et si quarante ans plus tard une calotte crânienne de même type, celle de Trinil, suscite des discussions autrement fructueuses, c’est qu’entre-temps la publication de De l’origine des espèces de Darwin a posé le problème des origines de l’homme, a sensibilisé les esprits à l’hypothèse transformiste.  

-        La science substitue au monde perçu un monde construit. Cette construction est à la fois conceptuelle et technique. Elle va des techniques opératoires les plus abstraites du mathématicien jusqu’aux manipulations matérielles de l’expérimentateur. Plus la science progresse, en somme, et plus le fait scientifique s’éloigne du fait brut, c’est-à-dire du fait tel qu’il est donné à la perception vulgaire. L’univers de la science élargit prodigieusement l’univers de la perception. Le monde scientifique est un monde transposé et reconstruit à travers tout un réseau de manipulations techniques et d’opérations intellectuelles. C’est presque comme si le fait était fabriqué par le savant. Certes, les constructions théoriques des savants sont “objectives” puisqu’elles se vérifient les unes par les autres et prêtent à des applications pratiques. Mais cette objectivité, conquise contre les illusions subjectives, n’est atteinte que par une médiation, un détour théorique et technique dont la complexité s’accroît sans cesse.  

-        En effet, la conquête de l’objectivité scientifique exige d’abord l’exclusion de la subjectivité sensible (l’impression thermique est remplacée par la lecture du thermomètre). La subjectivité sensible, point de départ de la connaissance empirique, obstacle à la connaissance scientifique, devient l’objet d’une analyse scientifique. On peut parler de “désubjectivation” de la connaissance. Le fait est, en réalité, “refait”; il est toujours un résultat, obtenu dans des conditions déterminées, précises, elles-mêmes instaurées à partir d’un capital de savoir et de technique. L’activité scientifique suppose à la fois des théories et des instruments, c’est-à-dire des relations étroites qui unissent la science et la technique, relations que nous allons essayer de comprendre.

3)     La méthode hypothético-déductive

-        La science n’est donc pas inductiviste; elle ne procède pas par généralisations à partir de faits, sans formuler d’hypothèses ni être guidées par des points de vue et des principes théoriques. La recherche scientifique porte toujours sur un objet limité, un sujet circonscrit; elle vise à répondre à une question précise et suit une méthode qui procède en quatre temps : 

1.     construire un objet d’étude et poser une question;

2.     problématique : cadre théorique de référence ( par exemple, le paléontologue qui recherche les filiations entre les grands primates élabore ses travaux dans le cadre de la théorie de l’évolution) + hypothèse (réponse anticipée à une question initiale);

3.     l’observation et ses techniques (expérimentation, analyse comparative, enquêtes, sondages, etc.);

4.     traitement et interprétation des données (interpréter les faits, voir si les informations correspondent aux hypothèses de départ, ouvrir sur de nouvelles connaissances et interrogations).

-        Cette méthode est la méthode hypothético-déductive qui semble la plus universelle en science.

 

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