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A quelles conditions le mensonge est-il permis ?

Publié le 14/06/2009

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Introduction :

 

            Le mensonge est le fruit d’une parole en vue de dénaturer ou de cacher une vérité. Il est le fruit de l’imagination, de la fantaisie mais aussi du désir, donc des passions. Il est une déformation du réel, généralement en vue de soin propre intérêt. Le mensonge n’est pas l’erreur car un suppose une intention dans l’action de duper. En ce sens, le mensonge semble violer la plus simple et élémentaire règle de justice. Le mensonge produit l’injustice. Moralement, le mensonge apparaît clairement condamnable. Pourtant il semble bien que certains cas permettent un usage bénéfique voire salutaire du mensonge. Y aurait-il rupture entre la théorie et la pratique ? C’est ainsi que la question « à quelles conditions le mensonge est-il permis ? « prend toute son envergure.

            Si pratiquement, on peut permettre le mensonge (1ère partie), la morale le condamne irrémédiablement (2nd partie), pourtant un usage éclairé est-il possible ? (3ème partie)

 

 

I – Valeur éthique et pratique du mensonge

 

a) Le mensonge comme le montre Rousseau dans les Rêveries du promeneur solitaire n’est jamais qu’une fiction qui remplace une vérité. Il nous sert et trompe l’autre. Or si ces fables ne font de tort à personne elle relève alors de la fantaisie et peuvent être permises sans problème dans la mesure à cela ne heurte pas la morale ou les bonnes mœurs. Il s’agit d’un jeu gratuit. « Jamais mensonge prémédité n’approcha de ma pensée, jamais je n’ai menti pour mon intérêt, mais souvent j’ai menti par honte, pour me tirer d’embarras en des choses indifférentes ou qui n’intéressaient tout au plus que moi seul, lorsque ayant à soutenir un entretien la lenteur de mes idées et l’aridité de ma conversation me forçaient à recourir aux fictions pour avoir quelque chose à dire. Quand il faut nécessairement parler et que des vérités amusantes ne se présentent pas assez tôt à mon esprit je débite des fables pour ne pas demeurer muet ; mais dans l’invention de ces fables j’ai soin, tant que je puis, qu’elles ne soient pas des mensonges c’est-à-dire qu’elles ne blessent ni la justice ni la vérité due et qu’elles ne soient que des fictions indifférentes à tout le monde et à moi. Mon désir serait bien d’y substituer au moins à la vérité des faits une vérité morale ; c’est-à-dire d’y bien représenter les affections naturelles au cœur humain, et d’en faire sortir toujours quelque instruction utile, d’en faire en un mot des contes moraux, des apologues, mais il faudrait plus de présence d’esprit que je n’en ai et plus de facilité dans la parole pour savoir mettre à profit pour l’instruction le babil de la conversation. Sa marche, plus rapide que celle de mes idées me forçant presque toujours de parler avant de penser, m’a souvent suggéré des sottises et des inepties que ma raison désapprouvait et que mon cœur désavouait à mesure qu’elles échappaient à ma bouche, mais qui précédant mon propre jugement ne pouvaient plus être réformées par sa censure «.

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« être son intention en mentant, doit répondre des conséquences de son mensonge, même devant les tribunaux civils,si imprévues qu'elles puissent être.

[…] C'est donc un commandement de la raison qui est sacré, absolumentimpératif, qui ne peut être limité par aucune convenance : en toute déclaration, il faut être véridique.

»b) Ce que Constant reproche à Kant c'est cet absolu de vérité, car selon lui toute vérité n'est pas bonne à dire, etsi la vérité est un devoir absolu, alors toute société humaine semble être impossible.

Constant évoque ainsi un« droit à la vérité » et dans l'exemple de Kant, celui qui ment au meurtrier ne commet pas un manquement au devoirétant donné que le meurtrier n'a pas droit à cette vérité.

Mais Kant reste fidèle à sa définition du devoir dans Fondements , à savoir qu'un devoir n'en serait pas un s'il ne valait que pour certains hommes et dans certaines circonstances.

Il répond ainsi à Constant par six arguments : Il n'y a pas de conflit entre sauver son ami et celui dedire la vérité car le 1 er n'est pas un devoir inconditionné.

En général sauver la vie d'un homme et la sienne n'est pas un devoir.

La bienveillance à l'égard d'autrui n'est qu'un devoir indirect large .

La maxime du mensonge bienveillant est contradictoire.

Le mensonge peut mener au contraire du résultat attendu : perdre son ami ; il y a en droit égaleprobabilité qu'on atteigne son but en mentant.

Elle ne peut donc être acceptable, ni comme impératif catégorique bien sûr, mais ni comme impératif hypothétique .

En disant la vérité quoiqu'il arrive on ne peut être tenu responsable des conséquences, ce qui nous met dès l'abord à l'abri de tte poursuite judiciaire .

Elle disculpe toujours les effets néfastes qui peuvent en découler.

En revanche mentir nous rend responsable des conséquences qui résultent dumensonge.

En disant sa vérité (c'est-à-dire ce que l'on croit sincèrement être vrai, ce qui ne l'est peut-être pas en vérité, pour Kant dire sa vérité est indépendant de la vérité objective qu'on est jamais sûr de posséder.

Ainsi seulela véracité subjective est un devoir.) on se montre digne de l'humanité en sa personne.

Le mensonge rend en plus ledroit , qui repose sur des contrats et des promesses impossibles, et donc toute société impossible aussi.

De plus, le devoir de Vérité à une fonction sociale essentielle.

Il garantie la communication entre les hommes.

Une sociétéfondée sur le mensonge érigée en loi ne pourrait se maintenir.c) La controverse de Kant et Constant sur la licéité du mensonge révèle deux acceptions différentes de la vérité etdu mensonge.

Kant reproche enfin à Constant de confondre l'acte par lequel on nuit à autrui en disant la vérité avec l'acte par lequel on commet une injustice.

Or l'injustice morale qui porte atteinte à la dignité de l'homme est pireque la nuisance physique.

Quoiqu'en fait ces deux maux ne sont pas comparables car ils ne relèvent pas du mêmeplan.

La morale ne doit donc reposer que sur les principes pratiques purs.

Je ne dois pas avoir égard au résultat del'action, mais seulement à la forme universalisable de la maxime.

Aucun conflit de devoir n'invalide donc le principede la morale kantienne.

Et c'est bien ce que l'on peut voir dans la définition de la morale rigoriste que développeKant dans les Leçons d'éthique : « L'éthique peut proposer des lois de moralité qui sont indulgentes et qui s'ordonnent aux faiblesses de la nature humaine, et ainsi elle s'accommode à cette nature en ne demandant rien deplus à l'homme que ce qu'il est en mesure d'accomplir.

Mais l'éthique peut aussi être rigoureuse et réclamer la plushaute perfection morale.

En fait, la loi morale doit elle-même être rigoureuse.

Une telle loi, que l'homme soit enmesure ou non de l'accomplir, ne doit pas être indulgente et s'accommoder aux faiblesses humaines, car ellecontient la norme de la perfection morale, laquelle doit être stricte et exacte.

La géométrie donne par exemple desrègles strictes, sans se demander si l'homme peut ou non les appliquer et les observer : le point qu'on dessine aucentre d'un cercle a beau ne jamais être assez petit pour correspondre au point mathématique, la définition de cedernier n'en conserve pas moins toute sa rigueur.

De même, l'éthique présente des règles qui doivent être les règlesde conduite de nos actions ; ces règles ne sont pas ordonnées au pouvoir de l'homme, mais indiquent ce qui estmoralement nécessaire.

L'éthique indulgente est la corruption de la mesure de perfection morale de l'humanité.

Laloi morale doit être pure » [1]. Transition : Ainsi le mensonge est absolument interdit par la morale.

On ne peut pas sous un quelconque prétexte justifier unmensonge quelles que soient nos raisons.

Le droit de mentir n'existe pas.

Cependant, cela supposerait que tout lemonde agisse moralement.

Or face à cet optimisme, force est de constater que nous ne sommes encore dans unmonde moralisé qui ne peut pas rendre compte d'une véracité absolue.

Dans ce cas, mentir n'est pas permis maisreste un moyen en dernier recours d'une poursuite du bien malgré les circonstances.

Le mensonge est alors cetteinstance amorale en vue du meilleur.

III – Nécessité et limite du mensonge a) Or c'est bien ce que l'on peut voir chez Platon par l'existence de ce que l'on peut nommer le pieux mensonge.

Il doit être produit en vue du bien de tous, donc pour la cité.

Dès lors, seul le roi-philosophe ou le philosophe-roi quiest sage peut faire usage de ce mensonge.

D'une certaine, c'est à cet être parfaitement morale de dévier de celle-ci pour le bien.

Il s'agit d'un sacrifice éthique.

Ainsi dans le livre III de la République on peut lire : « C'est donc aux magistrats qu'il appartient exclusivement de mentir pour tromper l'ennemi ou les citoyens, quand l'intérêt de l'Étatl'exige.

Le mensonge ne doit jamais être permis à d'autres, [ 389c ] et nous dirons que le citoyen qui trompe les magistrats est plus coupable que le malade qui trompe son médecin, que l'élève qui cache au maître qui le forme lesdispositions de son corps, que le matelot qui n'informe pas le pilote de ce qu'il fait lui ou son camarade à l'égard duvaisseau et de l'équipage.

[…]En effet, la perversité ne saurait à la fois se connaître elle-même et la vertu, mais lavertu, dans son développement naturel, finira par se connaître elle-même et connaître le vice.

Ainsi donc, selon moi,[409e ] c'est à l'homme vertueux et non au méchant qu'il appartient de devenir habile.

Ainsi tu établiras dans l'État une médecine et une judicature, telles que nous l'entendons, à l'usage de ceux de nos citoyens [ 410a ] qui seront bien constitués de corps et d'âme; et quant aux autres, on laissera mourir ceux dont le corps est mal constitué, eton mettra à mort ceux dont l'âme est naturellement méchante et incorrigible.

C'est évidemment ce qu'il y a de mieuxà faire et pour eux-mêmes et pour l'État.

Mais il est clair que le jeune homme élevé dans les principes de cettemusique simple, qui, disions-nous, fait naître la tempérance, évitera sans peine d'avoir recours aux juges ».. »

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