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ALAIN: Le miracle de la peinture

Publié le 27/02/2008

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Le miracle de la peinture, c'est que ce feu de société, ce reflet d'opinions et de jugements, chose par excellence mobile et décevante, fait un objet durable et désormais immobile. Cette âme, par exemple la Joconde, ou la Vierge du Mariage, cette âme est à saisir ; elle ne se dérobe point ; mais aussi elle ne se divise point ; elle ne s'explique pas, mais elle s'offre. Ce qui au monde est le moins objet est devenu objet ; on le possède en une apparence immuable et suffisante ; c'est à nous, par une sympathie qui ne troublera pas cette image, par une sympathie qui peut hésiter, se tromper, revenir, c'est à nous de comprendre ce langage sans paroles. Cette confidence est sans fin, et éveille en nous un développement parallèle, sans paroles aussi ; non pas une suite d'instants, mais une suite de moments où toute une vie, passé, présent, avenir, est rassemblée. D'où cette contemplation véhémente dont je parlais. C'est le propre de l'apparence qu'elle exprime tout, et qu'elle suffit ; mais seule la peinture fixe l'apparence ; et seule la grande peinture choisit justement l'apparence à laquelle nous avions voulu nous arrêter. C'est ainsi que le vrai peintre, par refus de penser, c'est-à-dire de définir, et par choisir seulement les moments en écartant les instants, a préparé son précieux objet pour une contemplation sans fin.ALAIN

      L’extrait de texte d’Alain qui est proposé a pour objet la peinture et va permettre à Alain de développer une véritable théorie de la peinture. En effet, à travers l’extrait, Alain va chercher à comprendre ce qu’est la peinture et qu’elle est son « miracle «. Autrement dit, il s’agit ici de développer une théorie positive de peinture comme apparence fixe et immuable d’un objet immatérielle. En ce sens, Alain entend redonner ses lettres de noblesse à la peinture qu’une conception et une critique platonicienne lui avait fait perdre ou relativiser. Ainsi, Alain cherchant à comprendre comment la peinture peut saisir dans son objet une âme, ce qu’elle est ; et dès lors ce que cela implique par rapport au sujet à travers notamment la question de la contemplation et du dialogue « sans parole « avec le tableau ; définissant, implicitement, en dernier lieu une typologie ou hiérarchie des arts de l’apparence, ainsi que le vrai peintre.

            Dans ce cas, il semble que l’extrait se structure selon trois moments : le premier allant jusqu’à « elle ne s'explique pas, mais elle s'offre. « portant sur la question du miracle de la peinture et de sa relation avec l’âme ; le second de « Ce qui au monde est le moins objet est devenu objet… « à « D'où cette contemplation véhémente dont je parlais « dont l’objet sera la question de la contemplation et du dialogue paradoxal sans parole, amenant ainsi à un troisième moment, de « C'est le propre de l'apparence qu'elle exprime tout… « à la fin, définissant une hiérarchie des arts et le vrai rôle du peintre.

 

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« II – Matérialité et Apparence a) Ainsi comme on peut le constater, cette seconde partie du texte est structurée par un ensemble de paradoxesapparents, comme nous allons le voir.

Et le premier semble bien être celui autour de l'objet.

En fait ici, Alain résumece qu'il vient de dire à propos de l'âme et de la peinture, mais ici du côté de la matérialité en insistant par le termeobjet.

En effet, l'âme est par excellence d'essence immatérielle comme on l'a déjà tout comme les opinions et lesjugements.

Le spirituel est devenu matériel, la matérialité est donc une apparence.

Or contrairement à la critiqueplatonicienne, Alain déclare que l'apparence est suffisante.

C'est-à-dire qu'il ne faut pas être déçu du simple rapportde reflet de la peinture, dans le sens où il faudrait lui préférer l'original.

En effet, le miracle de la peinture estjustement de saisir et d'offrir ce dont les sens ne peuvent pas nous donner.

Il ne s'agit pas d'une pauvreté et c'estdès lors en ce sens que l'on peut comprendre le rôle de la sympathie chez Alain.

Pour saisir cette âme que nousoffre la peinture il faut donc tisser un lien intime avec l'objet : la sympathie.b) La sympathie peut être ce rapport que nous nouons avec l'œuvre d'art, ici la peinture.

Elle est donc la clé dudéchiffrement de la peinture ; et ce qui explique que la compréhension de la peinture ne soit pas toujours directe.La peinture si elle s'offre à nous reste une énigme et c'est pourquoi on « peut hésiter, se tromper, revenir ».

Eneffet si la peinture s'offre à nous, son langage, en tant qu'il rend compte de l'immatériel ne peut pas se lire commeun rébus.

En ce sens, la contemplation artistique ne doit pas être passive, mais bien active, puisque « c'est à nousde comprendre », c'est-à-dire qu'il ne faut demander à la peinture de nous dire ce qu'elle veut dire, mais c'est ànous d'en découvrir la clé d'où ce travail de retour sur l'œuvre.

D'où ce paradoxe d'un langage sans parole qu'il fautdéchiffrer.c) Et c'est bien là tout le jeu de contemplation artistique puisque l'œuvre, relativement à son objet, semble du pointde vue du sens inépuisable.

Autrement dit, il y a une interaction entre le spectateur et l'œuvre d'art et ce dialoguesans parole est bien la contemplation esthétique.

Ce rapport à la contemplation éveille en nous ce qu'Alain appelleun « développement parallèle ».

Que faut-il entendre par là ? Sans doute Alain a en tête l'idée de ce rapportdialogué sans parole avec l'œuvre d'art.

Le développement parallèle s'explique par le fait que cette contemplationn'est pas une succession d'instants ; elle ne se résume pas à la vue du tableau et à cette quête de sens ; mais il ya développement parallèle dans ce sens où l'art me place quelque peu hors du temps, ou plus exactement mobiliseen moi des souvenirs ainsi que toute ma vie par rapport à ce dialogue avec l'œuvre d'art.

En ce sens, il y arencontre entre mon histoire et l'histoire du tableau créant ce dialogue créateur se développant sur une double lignede fond esthétique et créatrice ; d'où la véhémence de la contemplation.

Transition : Pourtant, l'apparence et ce dialogue ne semble pas être l'apanage seul de la peinture.

En effet, on peut dire quetous les arts sont des arts de l'apparence.

Or c'est sans doute pour éviter ce type d'objection qu'Alain vadévelopper et caractériser dans cette troisième partie le rapport spécifique qu'entretient la peinture avecl'apparence ; faisant de la peinture un paradigme en art et l'objet d'une contemplation sans fin.

III – Apparence, peinture comme paradigme et contemplation a) Cette confidence est sans fin dans la mesure où l'apparence exprime tout.

Ce tout est une totalité designification car elle exprime l'âme avec toute son histoire et l'histoire de son temps.

Or dans ce cas, la peinture n'arien de spécifique par rapport aux autres car ils sont aussi des apparences.

Et c'est pourquoi Alain insiste sur lamatérialité de la peinture : « elle fixe l'apparence ».

En effet, contrairement à la musique par exemple, l'art n'est paséphémère, il ne s'évanouit pas, le tableau est toujours le même une fois fixé.

En ce sens, Alain produit implicitementune classification.b) Et la grande peinture, celle que l'on retient, c'est celle qui a la capacité de nous interpeller.

Autrement dit, Alainthématise la différence entre les chefs d'œuvre et la peinture en général.

La grande peinture est celle qui permetune interrogation sans fin, un dialogue qui se passe de parole.

C'est-à-dire que la grande peinture est celle qui estpropre à offrir une âme, à nous la dévoiler et cela de façon immuable et suffisante.

La grande peinture est donc lamatérialisation du spirituel et doit se donner au spectateur.c) De là il s'ensuit la définition du peintre : le vrai peintre, c'est-à-dire celui qui est à la hauteur de son art, qui nefait pas tant œuvre de penseur que de fixateur sous forme d'apparence d'une âme, c'est-à-dire du feu de lasociété.

Le peintre ne doit pas penser à la place du spectateur, il doit simplement façonner son objet afin qu'ilproduise un dialogue à travers une sympathie qui deviendra une « contemplation sans fin ».

Et c'est pourquoi lepeintre ne doit pas penser, ni définir, mais seulement fixer l'apparence au risque sinon de rendre impossible ledialogue en le faussant.

Conclusion : Ainsi, à travers cet extrait, Alain développe une véritable théorie de la peinture, comme paradigme de l'apparence,développant une dialogue sans parole avec le spectateur définissant une contemplation sans fin qui nous offrel'accès à l'âme, objet par essence immatérielle que la peinture permet de fixer dans la matière sans la trahir ; unepeinture qui est un miracle et se définit comme feu de la société.. »

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