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Des Causes de nos Erreurs et des moyens d'y remédier.

Publié le 18/06/2011

Extrait du document

1. Nos facultés intellectuelles ont pour fin la connaissance du vrai; et nous devons admettre comme axiome que leur bon emploi ne saurait nous conduire à l'erreur. Car en contestant cette proposition, on conteste par là même qu'il nous soit en aucun cas permis de croire que nous avons raison de croire, chose que nul homme ne pense et que le genre humain n'a jamais pensé. Nous partons donc de ce principe que l'erreur vient généralement du mauvais emploi de nos facules intellectuelles. D'où le remède général à l'erreur est de nous servir convenablement de ces mêmes facultés.

« des sens, sont compensées de reste par un grand nombre de circonstances où la même rapidité de jugement hmsert à souhait.16.

Parmi les signes que les sens nous fournissent, il faut remarquer particulièrement ceux qui ont pour destinationde nous faire connaître les dispositions morales des autres hommes, savoir : la physionomie, le langage, le ton, etc.Ici les erreurs sont assez fréquentes, par la raison que chaque homme a le pouvoir, en vertu de sa liberté, dedénaturer plus ou moins les signes des choses morales, soit en dissimulant ceux qui conviendraient à tels ou telsétats de l'âme, soit au contraire en joignant ces signes aux dispositions précisément contraires à celles qu'ilsdénotent naturellement.17.

La dissimulation et l'hypocrisie des autres hommes rendent donc cette sorte d'interprétation difficile ; sans êtremisanthrope, on peut affirmer que le champ des méprises de cette espèce est immense et que le commerce (leshommes apprend combien il faut retenir souvent l'interprétation naturelle de certains signes qui nous feraientaffirmer la franchise, la droiture, le dévouement, l'amitié, etc., là ou rien de semblable n'existe en réalité.18.

Mais cependant il est bien des cas où nous pouvons, sans risque d'erreurs, nous en rapporter à ces signesnaturels; et, dans les cas où cette confiance nous trompe, d'une part la faute n'en est pas aux lois de la nature,mais à la perversité des hommes, et d'autre part, en examinant l'erreur de près, on voit qu'elle n'était pasabsolument inévitable.19.

Ainsi, les données des sens sont, il est vrai, d'une interprétation quelquefois difficile ; mais la difficulté vientseulement de notre ignorance, elle ne nous induit du reste que rarement en erreur, et ce petit nombre d'erreurs nedoit point nous faire regretter la confiance que nous mettons dans notre interprétation, parce que cette confianceest indispensable à notre commerce avec les corps et avec nos semblables.20.

Au lieu de ce reproche banal fait aux sens qui, en réalité, ne nous trompent jamais, puisqu'ils nous donnenttoujours avec fidélité les signes des choses, et qu'ils ne sont pas tenus à faire davantage, il vaut mieux faire uneremarque d'une grande importance, savoir : que la vie des sens est tellement positive et entraînante, qu'elle nouséloigne constamment des choses spirituelles pour nous ramener aux corporelles.

Il y a là un vrai danger, auquel lamasse des hommes succombe.21.

Celui qui veut réfléchir, ne peut s'empêcher de trouver effrayante la propriété qu'ont les sens de nous faire vivreau milieu des corps avec une telle familiarité qu'il semble que nous-mêmes ne soyons que des corps.

De là l'oubli oudu moins la négligence de ce qui tient au monde spirituel, ou, ce qui est encore pis, la subordination du mondespirituel au monde matériel.22.

S'il y a au monde une erreur funeste, la voilà; et il est d'autant plus indispensable de la signaler, que ceuxmêmes à qui on la montre ne la voient souvent pas, à plus forte raison ceux à qui jamais personne n'en a parlé, etque l'exemple, le cours des idées reçues laissent dans une absolue ignorance.

Rien n'est rare comme un espritvraiment éclairé, si ce n'est peut-être une âme véritablement vertueuse '.23.

Dans les sociétés où malheureusement l'entraînement des sens s'érige en système, le bien-être se fait le centrede la vie humaine et le but de toute activité, et l'industrie, qui ne devrait jamais être qu'une esclave intelligente etsoumise, devient la reine des esprits, seule en droit de distribuer les droits, les honneurs, et même le mérite.24.

A l'expérience personnelle et directe se joint l'indispensable auxiliaire du témoignage et de l'autorité.

Les erreursauxquelles ces deux nouveaux moyens donnent lieu sont de même nature que celles des sens, elles dérivent d'unexcès de confiance.25.

Mais une erreur autrement grave serait de renoncer au témoignage en général à cause des erreurs nées dutémoignage, et à l'autorité en général à cause de l'abus de l'autorité.26.

La chose n'est pas possible entièrement, et tout homme est bien forcé, en dépit de lui, de faire avec confiancede fréquents recours au témoignage et à l'autorité, tout comme à ses sens et à sa conscience.

Cependant uneprévention systématique injuste peut avoir pour effet de nous faire récuser l'intervention du témoignage et del'autorité dans certains cas où cette intervention serait très-légitime et souvent fort utile.

C'est là une desinclinations les plus fortes de notre époque.27.

Sans doute nulle autorité n'a le droit de se faire entendre qu'elle n'ait avant tout montré ses titres et prouvé savéracité ; mais à ces conditions, nul n'a le droit non plus de la récuser au nom de l'examen personnel.

Car, la véritéénoncée par d'autres que par nous , à des conditions qui préviennent leurs égarements, est tout aussi digne decroyance que la vérité découverte par nous-mêmes, laquelle doit, après tout, recevoir des garanties pareilles.

Jeserais aussi peu pardonnable de refuser de croire à une proposition reconnue comme vraie par les hommescompétents, après examen notoire et contrôle mutuel, sous prétexte de la non-valeur de l'autorité en général, que(le refuser d'y croire après l'avoir découverte, et vérifiée moi-même, sous prétexte d'une suspicion générale contreles facultés humaines.28.

Pour compléter la revue que nous venons de faire, il faut parler encore de la mémoire, de l'imagination, del'association des idées, de l'abstraction, et enfin du raisonnement, facultés secondaires qui concourent dans larecherche du vrai et dont chacune par conséquent est également sujette à l'erreur.

Les erreurs particulières auraisonnement (et ce mot embrasse ici l'induction et la déduction), sont désignées sous le nom de sophismes et sontle sujet du paragraphe suivant.

Quant aux quatre autres facultés, ne pouvant entrer dans un long développement,bornons-nous à mentionner comme sujet suffisant de méditation utile le peu de remarques suivantes.29.

La mémoire donne lieu à deux sortes d'erreurs.

La première consiste dans les faux souvenirs, et dérive encored'une confiance trop hâtive, en somme peu dangereuse et facile à corriger.

L'autre sorte d'erreurs est plus grave.Elle consiste dans la prédominance que la mémoire prend sur le jugement et le raisonnement.

Le dicton vulgaire quela mémoire tue le jugement est fondé, en ce que la mémoire ne porte sur les idées qu'au moyen de mots; les motssont son objet immédiat ; elle s'y attache et rend l'esprit esclave de ses formules.

Plus la mémoire est grande, plusdonc il est nécessaire de ne point laisser la faculté de juger s'engourdir.

Cette recommandation est d'une portéeconsidérable dans l'instruction, où la méthode des mots doit sans cesse être subordonnée à la méthode des choses30.

On a dit de l'imagination qu'elle est la folle du logis.

C'est dire qu'elle se mêle à tout le cours de la vie poursubstituer l'idéal au réel.

Ses deux formes les plus générales sont l'optimisme et le pessimisme, causes directes de. »

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