Devoir de Philosophie

Des Signes et du Langage dans leurs rapports avec la pensée.

Publié le 18/06/2011

Extrait du document

langage

1. La pensée n'a pas pour seules conditions d'existence la sensibilité, la raison, l'activité, mais elle tient encore essentiellement à la parole et aux signes en général. Pour mieux faire comprendre cette liaison et cette dépendance qui forment l'une des conditions les plus remarquables de notre intelligence ici—bas, nous allons indiquer d'abord en peu de mots ce que c'est que l'art ou le langage considérés sous le point de vue purement matériel. 2. On entend par langage ou art tout système de nomes sensibles, de moyens matériels par lesquels l'homme parvient à manifester sa pensée. La pensée c'est la réalité intellectualisée; l'art, le langage, c'est la pensée matérialisée, incarnée ;revêtue d'un corps. Nous n'avons à parler ici que du langage. 3. On distingue plusieurs systèmes de langage : le langage d'action, le langage parlé, le langage écrit. 4. Le langage d'action consiste dans les gestes, les mouvements de la physionomie, les poses et l'attitude du corps, les sons inarticulés et l'intonation de la voix. Tout cela forme ce qu'on appelle les signes naturels. Les signes naturels sont employés instinctivement et compris de même. Il n'est besoin d'aucune convention pour leur donner leur valeur, ni d'aucune étude pour la comprendre.

langage

« transmettent réellement la pensée de celui qui écrit ou qui parle.

Dans ces deux cas, l'art ne peut servir qu'àréveiller des pensées, ou à mettre celui qui écoute ou qui lit à même de le faire par un travail intellectuel.

Lorsqu'onécoute ou qu'on lit passivement, c'est-à-dire sans idées ou sans attention, le résultat se borne à une suite deperceptions de formes et de sons.19.

Nous considèrerons donc la parole sous un autre point de vue, c'est-à-dire comme un moyen, 1° d'acquérir desidées, 2° de les conserver, 3° de les révéler là où elles existent, 4° de les analyser.20.

Nous disons d'abord que le langage est un moyen absolument nécessaire pour l'acquisition et pour laconservation des idées.

Cette vérité est incontestable et facile à saisir si on en fait l'application aux idéesintellectuelles, abstraites, rationnelles, à toutes les idées en un mot qui ne sont pas acquises immédiatement par lessens.

Si l'on essaie de combiner les idées de cette sorte en les séparant des mots qui les expriment, on s'aperçoitque cette tentative est tout à fait impuissante.

Si nous perdions le souvenir de ces mots, les idées dont ils sont lecorps disparaîtraient -à l'instant.

C'est pour cette raison que le mot logos signifiait chez les grecs pensée etdiscours.21.

Une autre preuve de cette même vérité, qui est à la portée de tous les hommes et d'expérience journalière,c'est que l'esprit, lorsqu'il se borne à la méditation et à la réflexion, ne va jamais aussi loin que lorsqu'il emploiel'écriture ou la parole.

On ne parle pas seulement pour dire ce qu'on pense, mais pour arriver à la conscience de sapensée.

De là l'influence du discours sur celui même qui parle, la plus grande clarté des idées à la suite desdiscussions, comme chez l'artiste une conception plus vive de son oeuvre à mesure qu'il l'exécute.22.

La pensée séparée du langage et de toute expression, est quelque chose de vague, d'insaisissable; la parole, lessignes lui donnent une forme, la limitent, lui donnent le caractère propre à notre nature sensible, ils la mettent aujour, si l'on peut ainsi parler.

Car de même que la lumière réfléchie par les corps opaques est seule visible, de même'aussi la pensée réfléchie, c'est-à-dire renvoyée à l'esprit par le langage, frappe seule l'oeil de l'intelligence.23.

Considérée sous un troisième point de vue , ou comme moyen de révéler la pensée, la parole et toute expressionde la pensée nous apparaissent comme remplissant une fonction sociale éminemment grande.

Les artistes, lespoêles, les littérateurs, en créant des formes à la pensée, créent en un sens la pensée elle-même, parce qu'ilsmettent le vulgaire en état d'arriver à la conscience de ses propres idées.

De là la puissance du discours, soustoutes ses formes, de la tribune, des livres, des journaux.24.

Enfin le langage peut être encore considéré comme une méthode analytique.

C'est l'instrument avec lequell'esprit décompose sa pensée.

Penser, c'est combiner des notions; point de combinaisons sans composition etdécomposition ; point de composition et de décomposition sans le langage.

Condillac a dit qu'une science n'étaitqu'une langue bien faite.

Cette expression est parfaitement juste, si l'on entend par là que la langue est l'instrumentnécessaire pour toutes les opérations de l'esprit, et que ces opérations s'exécutent bien ou mal selon quel'instrument est plus ou moins parfait.Ajoutons quelques remarques sur les caractères d'une langue bien faite.25.

La perfection du langage consiste essentiellement dans son rapport avec la pensée.

Or la pensée peut être ouspontanée ou réfléchie, c'est-à-dire poétique ou scientifique : par conséquent le langage qui convient à la penséespontanée ou poétique, ne peut convenir à la pensée réfléchie ou scientifique.

Nous distinguerons donc d'abord lalangue poétique et la langue scientifique.26.

La pensée spontanée étant nécessairement synthétique, suppose dans le langage des formes appropriées à sanature; la pensée scientifique étant essentiellement analytique, suppose des formes contraires.

La clarté, lasimplicité, l'analogie, voilà les caractères fondamentaux de tout langage scientifique; la richesse, l'abondance, lavariété, les formes pittoresques, représentatives, voilà les caractères du langage poétique.

Là où la pensée n'est nipoétique, ni scientifique, le langage n'a aucun caractère déterminé : c'est le langage vulgaire.27.

Chaque peuple a son système de signes spécial qui le constitue peuple ou plutôt nation; ce système de signesprend trois acceptions différentes, selon qu'il est employé par les poètes, les savants ou le vulgaire; chez chaquepeuple il n'y a qu'un langage, mais il y a trois langues.

De là l'extrême difficulté de déterminer la valeur des motsd'une langue.

La pensée étant essentiellement mobile, progressive chez le poète, chez le savant, la valeur desexpressions change perpétuellement ; d'où la contradiction entre la pensée et la langue du vulgaire, et la pensée etla langue des hommes progressifs.

D'un autre côté, la pensée du poète étant toujours synthétique, et celle dusavant toujours analytique, les expressions reçoivent en passant de l'un à l'autre des valeurs en quelque sortecontradictoires.28.

Toutes les langues ne présentent pas le même caractère.

Celles qui ont été créées avant la naissance del'esprit scientifique doivent avoir des propriétés tout autres que celles qui sont nées sous l'influence de cet esprit.Aussi les langues anciennes sont plus poétiques que les langues modernes; elles parlent plus à l'imagination qu'àl'intelligence.

C'est le contraire pour les langues modernes.

La langue la plus parfaite serait celle qui pourrait fournirdes formes assez variées pour être toujours en harmonie avec toutes les facultés intellectuelles.

Buffon a dit, lestyle, c'est l'homme; c'est-à-dire la langue doit être l'expression exacte de toutes les facultés qui existent dansl'homme.

Or les formes de langage qui conviennent à certaines facultés ne peuvent convenir à d'autres qui en sontessentiellement différentes.29.

Le langage scientifique parfait serait celui qui, par la composition et l'analogie des expressions, retraceraitexactement la formation de la pensée.

Ainsi, toute science n'est qu'un système d'idées plus ou moins complexes;ces idées complexes sont elles-mêmes le résultat d'un petit nombre d'idées primitives, simples ou élémentaires.

Or,en supposant que ces idées élémentaires soient désignées par des expressions bien définies, il suffirait, pour arriverà composer la langue de mots qui fussent l'image exacte de toutes les idées de la science, de combiner ces motsélémentaires comme l'esprit dans la formation de la science a combiné les idées élémentaires.

Cette tentative quiavait été indiquée par Descartes, développée par Leibniz, a été appliquée d'une manière très-heureuse à la chimie.Les progrès qu'on a obtenus par la nomenclature chimique ont démontré ce que les philosophes avaient dit del'influence du langage sur les progrès des sciences.30.

La rhétorique a pour objet spécial de traiter des propriétés du langage.

Cette question, pour être résolue, en. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles