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Doit-on renoncer à l'utopie ?

Publié le 14/12/2009

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« Une société sans pensée utopique est inconcevable. Utopie au sens de désir d'un mieux « disait Jean-Claude Carrière dans Entretiens sur la fin des temps. Par ces mots, il veut dire que l’homme est toujours attiré par le progrès. Il ne supporterait pas l’idée de rester au stade actuel sans tenter de passer au suivant. L’homme a toujours besoin de viser plus haut, de faire des projets pour s’approcher du meilleur. L’utopie le permet. En effet, certains rêves, nous le savons bien, resteront toujours irréalisables. Néanmoins, ne pas les abandonner permet, non pas de les réaliser, mais de s’en rapprocher un peu plus. De ce fait, ayant son utopie pour but, l’homme peut franchir quelques étapes pour s’en rapprocher. Ces étapes, si elles ne permettent pas l’accès à l’idéal, peuvent au moins être bénéfiques, et on ne les aurait pas accomplies si l’on n’avait pas nourri l’espoir de réaliser notre utopie.

« une utopie, mais des utopies en réalité.

Et elles seront aussi nombreuses et variées que le sont les sujets pensants.Nous sommes tous différents : nos utopies ne peuvent que l'être elles aussi.

L'utopie de mon voisin ne sera pas lamienne : je ne la verrais donc plus comme une utopie, au sens où ce projet ne me paraitra pas idéal, il necorrespondra pas à mes critères de perfection.

Comment pourrait-on alors prétendre que l'utopie serait idéale,parfaite en tous points ? Une utopie sera forcément parfaite pour quelqu'un, mais du même coup, imparfaite pour unautre.

D'un point de vue politique par exemple, certains estimeront que la monarchie est le modèle le plus idéal pourl'organisation d'une société, d'autres l'abhorreront, et souhaiteront une démocratie, ou tout autre organisationpolitique.

Dans Les Suppliantes d'Euripide, Thésée, roi d'Athènes, débat de l'idée de démocratie avec le Héraut venant de Thèbes.

Il en fait l'éloge : il explique que « chacun reçoit le pouvoir à tour de rôle, pour un an », que « lepauvre et le riche y possèdent des droits égaux ».

La démocratie vise à compenser les inégalités.

Mais rapidement,le Héraut fait des reproches à ce système : c'est le nombre qui l'emporte dans une élection, non la justice desdécisions.

Cela permet à la démagogie (conduire le peuple là où on le veut) de s'installer.

En clair, les deuxpersonnages ne sont pas d'accord : ils ne voient pas la société idéale de la même manière.

L'utopie de l'un estimparfaite pour l'autre.

Et si l'on pousse cette pensée plus loin encore, en sachant qu'une utopie est toujoursimparfaite dans un sens, cela revient à dire que l'utopie n'existe même pas, étant donné qu'être imparfaite va contreson essence même de « projet idéal ».

Pourquoi, dans ce cas, persister à s'accrocher à l'utopie ? Elle ne répond pasà une recherche de perfection et de ce fait, elle est très fragile, voire inexistante.

Il est inconcevable de fonder savie sur de telles chimères. Le rêve d'un homme, s'il est projeté dans la réalité, peut parfois s'avérer dangereux.

S'accrocher à une utopie au point de braver cette règle qui la rend inaccessible et de bouleverser son ordre d'existence en la faisant passerde la fiction au réel (en d'autres termes, lui faire opérer une mutation) révèle que l'on souffre de ce que l'on pourraitqualifier d'obsession.

Or, une obsession est rarement positivement connotée.

Au contraire, elle paralyse en quelquesorte la conscience du sujet qui devient véritablement sujet (au sens servile du terme cette fois-ci) de cette idéeobsessionnelle.

Dans le cas où ce serait une utopie, le sujet esclave de son obsession espèrerait sans cesse pouvoirla faire passer de fictionnelle à réelle et mettrait tout en œuvre pour y parvenir.

Il oublierait les conditions mêmed'une utopie (non emprise sur le réel, inaccessibilité,…) pour ne plus voir que son but ultime, la réalisation en vue delaquelle tous les moyens sont bons.

L'histoire du communisme illustrerait bien cet argument.

A la base, l'idéologie deMarx avait tout à fait de quoi séduire.

Comment ne pas être tenté par une égalité de tous, un partage parfait detous les biens, et autres ? Sa pensée semble tout à fait positive.

Seulement, elle était sûrement utopique et sonapplication à la réalité causa des dommages certains dans l'Histoire.

L'utopie tourna à la dictature en URSS, enChine, et ailleurs encore.

J.

Attali souligne d'ailleurs ce danger de l'utopie lorsqu'il affirme que « l' Histoire moderne a montré que l' utopie est mère de toutes les dictatures », dans son livre Fraternités, une nouvelle utopie .

Ceux qui ont voulu par-dessus tout appliquer à la réalité quelque chose qui était au contraire inapplicable, ceux qui ont vouluforcer le passage pourtant infranchissable entre fiction et réalité ont souvent fait de l'utopie un désastre parfoishautement dangereux. Il semble donc réellement préférable de renoncer à l'utopie, pour s'éviter une perte de temps, une déception, un danger,...

Pourtant, la tâche n'est pas si facile.

En effet, il est impossible de renoncer à l'utopie, et ce pourplusieurs raisons. « Une société sans pensée utopique est inconcevable .

Utopie au sens de désir d'un mieux » disait Jean- Claude Carrière dans Entretiens sur la fin des temps .

Par ces mots, il veut dire que l'homme est toujours attiré par le progrès.

Il ne supporterait pas l'idée de rester au stade actuel sans tenter de passer au suivant.

L'homme a toujoursbesoin de viser plus haut, de faire des projets pour s'approcher du meilleur.

L'utopie le permet.

En effet, certainsrêves, nous le savons bien, resteront toujours irréalisables.

Néanmoins, ne pas les abandonner permet, non pas deles réaliser, mais de s'en rapprocher un peu plus.

De ce fait, ayant son utopie pour but, l'homme peut franchirquelques étapes pour s'en rapprocher.

Ces étapes, si elles ne permettent pas l'accès à l'idéal, peuvent au moinsêtre bénéfiques, et on ne les aurait pas accomplies si l'on n'avait pas nourri l'espoir de réaliser notre utopie.

Decette manière, l'utopie révèle bien l'impossibilité de l'homme à y renoncer, car il ne peut abandonner l'espoir d'unprogrès.

C'est en souhaitant éradiquer le problème de la faim dans le monde, projet visiblement utopiste carimmense, que l'on peut (en attendant, pour le moment) sauver tous les jours quelques vies supplémentaires.

Avoirun projet, certes trop grand pour être mené à terme, permet au moins de réaliser certaines choses plus petites,mais positives.

L'utopie permet le progrès, et l'homme ne pouvant abandonner l'idée de progrès, ne peut dès lors. »

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