En philosophie, tout est-il affaire de méthode ?

« l'on voit Socrate amener un jeune esclave à découvrir une proposition géo­ métrique).

-Mais cette méthode est liée à la Théorie de la réminiscence (voir ce mot, Voc., sens 3); elle implique que la vérité est innée en tout esprit humain.

Or cette thèse n'est-elle pas discutable? B.

- La «DIALECTIQUE)) PLATONICIENNE.

Platon, lui, préconise Ja méthode (Voc., sens 1) par laquelle l'esprit s'élève des représentations sensibles aux connaissances vraies.

-Mais la « dialectique >> platonicienne ne suppose rien de moins que la théorie des Idées (Voc., sens la), c'est-à-dire la réalité des essences intelligibles.

C.

- LA MÉTHODE CARTÉSIENNE.

L'essentiel de la méthode cartésienne tient dans la troisième règle du Discours : « conduire par ordre mes pensées, en commençant par les objets les plus simples et les plus aisés à connaître, pour monter peu à peu comme par degrés jusques à la connaissance des plus composés >>.

- Malheureusement cette méthode est solidaire de la théorie des «natures simples>>, qui est aujourd'hui très critiquée (Textes, I, p.

180, et II, p.

47).

D.

- LA MÉTHODE « CRITIQUE >> DE KANT.

La méthode philosophique par excellence serait-elle la méthode «critique>> telle que l'a entendue Kant, c'est-à-dire celle qui consiste à partir de !'esprit et de ses exigences propres pour expliquer les lois de la connaissance et de l'action?- Mais le criticisme kantien est encore trop intimement lié à un système qui, en posant des a priori, fait de la raison et de la loi morale de purs donnés, des absolus étrangers à notre expérience et à notre vie réelles (Précis, Ph.

I, § 324, et II, § 137).

E.

- LA MÉTHODE «DIALECTIQUE>> DE HEGEL.

Nous n'insisterons pas sur le développement dialectique tel que le conçoit Hegel et qui est beaucoup moins une méthode que le processus même du devenir de l'Idée, c'est-à-dire du réel (Précis, Ph.

I, § 115 B).

Ici, méthode et système se confondent.

F.

-- L'INTUITION BERGSONIENNE.

On peut en dire autant de J'intuition berg­ sonienne.

Celle-ci n'est pas, à proprement parler, une «méthode>> : elle s'opposerait plutôt à la méthode en tant que celle-ci est discursive et exté­ rieure à l'objet (Précis, Ph.

l, § 326); elle est «sympathie>> qui s'oppose à l'analyse (Textes, II, p.

291).

G.

- LA MÉTHODE PHÉNOMÉNOLOGIQUE.

Beaucoup de nos contemporains pensent que la vraie méthode de la Philosophie, c'est la méthode phénomé­ nologique : par la double réduction, eidétique, puis phénoménologique (épochè), celle-ci nous permettrait d'atteindre à la «vision des essences» (Précis, Ph.

I, § 327; Sc., § 266; Textes, II, p.

295).

-Mais, ici encore, il s'agit d'une conception particulière de la Philosophie sur laquelle il a été fait souvent de graves réserves (Précis, Ph.

I, § 327 fin; Textes, p.

300).

En résumé, toutes ces « méthodes >> sont trop intimement liées à des con­ ceptions particulières pour qu'on puisse voir dans l'une quelconque d'entre elles, même la dernière, la méthode philosophique par excellence.. »