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En quel sens peut-on dire que les morts gouvernent les vivants ?

Publié le 28/08/2005

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Cette question n'est pas sans faire penser à certaines formules d'Auguste Comte qui disait que le monde était plus peuplé de morts que de vivants. Cette formule qui guide votre sujet peut paraître étrange. En effet, prêter aux morts une capacité de gouverner revient à leur accorder un pouvoir que leur état semble incapable de leur donner. Néanmoins, il faut s'attarder un peu sur le sens qu'on peut accorder à cette phrase. Dire que les morts gouvernent les vivants, c'est noter que le passé, ce qui n'est plus, détermine fortement, en histoire le présent et les orientations vers l'avenir. Tout d'abord parce que certains morts peuvent servir de modèle. Pensez à la manière dont on envisage parfois le présent au regard d'événements passés. Il faudra ainsi vous interroger ici sur le poids de l'histoire. Vous pouvez penser à l'importance que peut avoir aussi le devoir de mémoire. Par exemple, lorsqu'on va faire des procès, de nombreuses années plus tard, de crimes contre l'humanité afin de faire parler le droit, on considère aussi qu'il s'agit alors de ne pas oublier les morts. On entend dire parfois qu'il est trop tard pour réveiller de vieux conflits, mais la force du droit réside alors dans la capacité à ne pas faire mourir les morts une deuxième fois. C'est sans doute aussi pourquoi après l'holocauste a pu se poser la question de l'impardonnable et ceci parce qu'on ne peut pas pardonner à la place d'un autre. Notez également que l'histoire présente n'est aussi que le résultat de l'histoire passée. Il vous faudra alors préciser quel sens accorder au verbe gouverner ici. Ce verbe signifie avant tout diriger. Se pose alors le problème suivant : si les morts gouvernent les vivants, faut-il remettre en cause la possibilité de se gouverner soi-même ? Vous pouvez alors montrer en quoi la liberté suppose aussi la reprise de son passé.

« culturel, chaque génération est redevable à celles qui l'ont précédée.

La seule façon de s'acquitter, pour unebien modeste part, de cette dette, que ce soit pour l'individu ou pour la société tout entière, c'est decontribuer pour sa part et à la mesure de ses forces et de ses talents, à accroître le patrimoine de l'humanité.La société présente vit aux dépens des morts, et, en l'absence d'un Dieu dont l'homme a jadis pensé qu'il luidevait la vie, c'est désormais aux grands hommes du passé, et à travers eux, à l'humanité tout entière, qu'ilconvient de rendre culte et hommage.

Comte était habité par le projet d'ériger une « religion de l'humanité »,l'humanité étant la seule divinité à qui l'individu ait lieu de rendre un culte, et d'imposer un nouveau calendrierdans lequel les saints traditionnels du catholicisme seraient remplacés par les grands hommes du passé(scientifiques, philosophes, grands hommes politiques du passé).

La philosophie de Comte proclame doncadvenue l'ère de la raison dans tous les domaines de la connaissance et de l'existence.

De même que toutesles sciences viennent s'inscrire pacifiquement dans un grandiose système de la science, de même tous lesindividus sont appelés à venir prendre leur part à la vie sociale, unis les uns aux autres par le seul amour duprochain et par l'exigence de vivre les uns pour les autres.

Chacun étant redevable envers tous, il apporte sapierre à l'édifice de l'humanité à la mesure de ses moyens, et contribue par là au progrès indéfini des sociétéshumaines. [Les morts ne peuvent plus avoir aucune influence sur les vivants.

Chaque génération se démarque decelles qui l'ont précédée.

Il n'y a pas d'évolution sans remise en cause de l'héritage que les hommes du passé nous ont légué.] On s'affranchit des mortsComment les morts pourraient-ils gouverner les vivants? Le monde dans lequel ils vivaient n'est plus le nôtreet chaque génération fait table rase du passé.

Les lois sont sans cesse réformées.

Les mœurs évoluent versplus de tolérance et de liberté.

Gouverner consiste donc bien plutôt à s'affranchir des morts.

Sartre, dansl'Etre et le Néant dira: «Être mort, c'est être en proie aux vivants.» Les morts sont ignorésLes grands hommes du passé n'ont pas vraiment d'influence.

La plupart des gens n'ont qu'une vagueconnaissance d'Aristote ou de Périclès.

Leurs modèles seraient plutôt les stars du show-business, bienvivantes, elles.

Certaines féministes américaines, au nom du politiquement correct, refusent de lire desauteurs classiques parce qu'ils sont «mâles et morts».

C'est là un exemple extrême de cette ignorance dupassé érigée en principe. Les ancêtres sont oubliésEn ce qui concerne la famille, les ancêtres ont aujourd'hui peu de pouvoir sur leurs descendants.

Sauf danscertaines familles aristocratiques ou qui se veulent telles, il est rare que l'on suive encore l'exemple de sesaïeux.

Nous ne pratiquons plus de culte des ancêtres ou de culte des morts, comme c'est la cas danscertaines cultures non européennes.

Nous avons plutôt tendance, au contraire, à rompre avec les traditionsfamiliales. Il n'est que de jeter un coup d'œil aux plaques de noms des rues pour se rendre compte à quel point les mortssont encore présents à nos yeux, ou du moins à ceux de nos responsables communaux et municipaux.

LaRépublique a érigé un culte des morts très particulier, qui consiste à glorifier les grands hommes et lesnotables du passé en les officialisant en quelque sorte.

Est-ce suffisant pour prétendre que les morts nousgouvernent? A l'échelle de la société, il est peut-être exagéré de le dire.

Ces morts illustres ne sont que desimages qui font partie des mythes rassembleurs dont toute société a besoin.

Mais, à l'inverse de ce qui sepasse dans certaines cultures primitives ou traditionalistes, il est rare que nous fassions comme si cesancêtres étaient encore vivants et nous commandaient.

En revanche, à l'échelle personnelle, la psychanalyserévèle que l'on peut subir l'influence de ses parents ou grands-parents bien après leur mort.. »

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