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Examinez cette pensée de Valéry : « On sait bien qu'on est le même, mais on serait fort en peine de le démontrer. Le moi n'est peut-être qu'une notation commode. » ?

Publié le 10/10/2009

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CONSEILS PRELIMINAIRES    Paul Valéry n'écrit pas au hasard. Il faut faire attention au choix des mots qu'il emploie, bien qu'ils ne soient pas faciles à expliquer, souvent. Qu'entend-il par une notation commode ?  Le plus délicat est évidemment le terme «le même«. Ici, tel qu'il est employé, il garde assez de vague pour contenir aussi bien l'identité auquel on songe directement que l'unité qui s'y relie. Un candidat, qui a lu les poèmes ou les essais de' Paul Valéry, se souviendra utilement que ce problème a préoccupé Valéry, d'une façon constante, comme d'ailleurs beaucoup d'écrivains de sa génération. « Beau ciel, vrai ciel, regarde-moi qui change «, dit le cimetière marin. Mais il faudrait faire attention de ne pas donner un tour trop littéraire à la dissertation.    PLAN    Introduction.  Savoir que l'on est le même est un sentiment d'immédiate certitude. Et pourtant nous changeons.  I. — Comment savons-nous que nous sommes le même :  a) un sentiment vécu ;  b) une intuition :  — notre corps ;  — la vie sociale ;  — la mémoire.  II. — Les obstacles qui s'opposent à une identité absolue :  — Comment nous voyons les autres.  — Comment nous nous voyons nous-mêmes, réflexivement.  — Les maladies de la personnalité.  III. — Identité et vie dans le temps : '  — Unité et identité.  — Peut-on «démontrer« notre identité..  — Identité et changement.  Conclusion. — Notre identité n'est pas donnée une fois pour toutes. Notre mémoire, reliant passé, présent et avenir, en vue de Faction, assure notre identité vivante.

« identité biologique et mon identité sociale se confondent dans le travail incessant de ma mémoire, véritableinstrument qui me réajuste sans cesse, véritable chaîne sur laquelle court les diverses modifications et dessins de latrame du moi.Mon corps, ma mémoire, mais je sais aussi que mon corps change, que ma mémoire se transforme et que j'oublie, etque je me ressouviens de ce que j'avais oublié.

J'ai la certitude d'être le même à travers le temps, et je n'aperçoistoujours pas cette réalité permanente, cette identité profonde et absolue.Alors que tout me suggère un changement.

Il me suffit de regarder les autres.

C'est vrai que parfois j'ai du mal àreconnaître ceux que je rencontre.

Sur la foi de la notation commode d'un nom, j'arrive à relier l'image que j'avaisconservée de Paul-il-y-a-quelques-années au Paul-d'aujourd'hui.

Parfois, en dépit du nom que l'on me rappelle, jereste sceptique...

« comme il a changé ! ce n'est plus le même...

».

Il n'y a plus d'identique en lui que la relation quinous unit, je viens le trouver parce qu'il peut me rendre le même service qu'il m'a déjà rendu, et qu'il peut seul me lerendre encore.

Mais est-ce bien sûr qu'il peut me le rendre encore ? Ainsi nous interrogeons-nous perpétuellementsur l'identité des êtres, sur laquelle, en fin de compte, nous ne nous basons qu'avec circonspection.

Nous savonsbien qu'un homme jeune n'est pas identique à un vieillard et que les êtres changent avec les situations sociales quiles changent.Et pour nous-mêmes ? Si nous y réfléchissons, nous nous sentons fragiles, sans cesse atteints dans notre identité.Les objets qui nous entourent, les amis que nous fréquentons font partie de notre moi.

Les objets se brisent, lesamitiés parfois se détériorent, et nous ressentons ces pertes et ces séparations comme des bouleversements denotre être profond.

Quand nous comparons alors ce que nous étions et ce que nous sommes, nous nous sentonssoudainement différents, comme si deux êtres avaient successivement vécu notre vie.

Les retours sur soi sonttoujours des retours sur d'autres moi que nous fûmes, des étrangers peut-être.

Mais il faut évidemment se mettredans l'attitude de quelqu'un qui assiste au spectacle de soi-même, c'est-à-dire, dans une certaine mesure à undédoublement volontaire, comme l'exercice attentif de l'introspection l'exige.

Nous avons prononcé le terme dedédoublement.

On le retrouve dans les maladies mentales touchant à la pathologie de la personnalité.

Dans cesmaladies, le malade assiste en spectateur aux événements de sa vie psychique, avec indifférence.

C'est d'abord lemonde extérieur qui est frappé d'une sorte d'étrangeté, puis, sur ses impressions, sur le continu déroulement de savie consciente, le malade ne reconnaît plus sa marque.

Rien ne peut venir à bout de son apathie.

Toute sourced'émotion est éteinte en lui.

Si le malade ne se reconnaît plus comme étant le même qu'autrefois, du même coup ilaccepte que des êtres différents se soient succédés dans sa propre enveloppe corporelle qui, dès lors, n'est plusqu'un lien commun des différents êtres qui y habitent.Il nous faut comprendre que la multiplicité des apports qui constituent le moi peuvent apparaître, à certainsmoments, comme contradictoires, inconciliables.

Il y aurait là un effort considérable à faire pour surmonter le conflitou la contradiction.

Parfois, l'individu préfère accepter l'idée d'une dualité qui se manifeste dans le temps par uneperte d'identité.

Néanmoins, il nous faut remarquer qu'un malade de cette sorte n'ignore pas radicalement, saufexception, l'autre qu'il était hier et qu'il n'est plus aujourd'hui, tant le sentiment d'une unité fondamentale subsistede façon tenace.Ainsi, Valéry, après tant d'autres, n'a-t-il pas tort de mettre le doigt sur une difficulté importante, sur le paradoxepermanent que constitue notre vie psychologique» On ne peut pas démontrer que nous sommes le même; lesconstatations les plus communes démentent cette ambition.

D'un triangle, je puis dire qu'il est identique à lui-même;cette identité se démontre et il en est de même de toute idée abstraite, de tout concept dont la définition eststable.Il est vrai que nous nous heurtons à l'impossible quand nous" essayons de définir le singulier.

Précisément, lesentiment de singularité est l'un des constituants du sentiment du moi.

Au sens logique, notre compréhension estinfinie.

Nous ne pouvons pas formuler l'idée générale et abstraite, ni de nous-mêmes, ni d'autrui.

Il nous estimpossible, nous « serions bien en peine » de le démontrer.Le terme « démontrer » est donc assez inattendu dans ce domaine.

Il se heurte à une impossibilité logique.

De plus,nous évoluons, nous baignons dans le temps.

Nous sommes dans la situation d'être dans le temps, et la remarqueest ancienne que nous ne nous baignons pas deux fois dans le même fleuve.

Nous vivons dans un continuelchangement, et il est stérile d'opposer identité absolue et changement.

Il n'en reste pas moins que l'unité de notre être est en conflit avec la multiplicité des apports différents qui sourdentsans cesse en nous, de la même façon que le sentiment de notre identité est en conflit avec la diversité successivede notre moi.

Il faut bien que nous avions conscience de notre identité, pour sans cesse l'admettre.

Nous n'entrouverons les preuves qu'en nous-mêmes, et dans les rapports qui nous lient au monde qui nous entoure.

Lesconcepts d'unité et d'identité, nous les avons forgés par abstraction, au contact des objets extérieurs, et leuravons donné une définition qui correspond à la nature des êtres géométriques.

La conscience que nous avons denotre identité n'a pas comme contenu celui du terme d'identité.

Si bien que nous sommes contraints d'user demétaphores pour saisir cette identité changeante.

Faisons appel au spectacle du fleuve, qui n'est jamais de mêmeeau et n'offre pas le même spectacle, ni par sa couleur, ni par ses reflets, et auquel pourtant nous donnons le mêmenom.L'essentiel ici, c'est que le fleuve conserve toujours le môme lit, la même direction.N'en est-il pas de même pour notre identité personnelle.

Notre identité n'est pas absolue, elle n'est pas donnée unefois pour toutes.

Elle est à chaque moment notre œuvre.

Nous savons bien que du moi que nous étions il y aquelques années bien des caractères physiques ou psychologiques se sont estompés.

Des désirs que nous avions,quelques uns n'ont pas connu même un commencement de réalisation.

Mais nous savons aussi que nous avonspoursuivi les directions dominantes de notre effort, dans le même sens.

C'est ici notre propre ténacité qui nousprouve notre identité.

Autrement dit, ce sont nos actes qui nous identifient à nous-mêmes, dans la mesure où cesactes ont leur continuité.

Le sentiment que nous avons de rester le même dépend des constantes de notre action,. »

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