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Faut-il redouter la mort ?

Publié le 17/01/2022

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Épictète, Manuel, vers 130 apr. J.-C. « En s'occupant de philosophie comme il convient, on ne fait pas autre chose que de rechercher la mort et l'état qui la suit. » Platon, Phédon, Ive s. av. J.-C. « Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions tranchées qu'ils ont sur les choses; par exemple, la mort n'a rien d'effrayant, [...] mais c'est l'opinion tranchée selon laquelle la mort est effrayante qui est elle-même effrayante.

Si la peur, se caractérise par la présence ou l'imminence d'un péril; il est légitime, au nom  de l'instinct de conservation -qui nous enjoint de préserver notre intégrité physique et mentale- d'être apeuré par l'idée de devoir mourir hic et nunc ou, a fortiori de se trouver en danger (de mort). En revanche, le sentiment de crainte est plus subtil puisqu'il est une angoisse, une attente tourmentée et anticipatrice à l'égard d'une menace à venir. Aussi, sa raison d'être ne se fonde pas sur l'universalité et la nécessité comme la notion de peur; mais, sur une approche plus personnelle et contingente.
Que l'homme craigne  et anticipe  la mort, voilà un fait. Mais, y a-t-il de droit, un fondement rationnel à cette thanatophobie? La mort est-elle vraiment cet horizon indépassable et tragique? De devoir mourir, un jour,  cela doit-il nous plonger dans les vertiges de l'absurde, du nihilisme notre vie durant? A l'inverse, ne pas redouter de la mort soit par désinvolture, par fuite ou encore par assurance prosélyte, n'est-ce pas éluder un questionnement fondamental et impératif de l'exister humain? N'y a-t-il pas une impérieuse nécessité pour l'homme à réfléchir sur son eschatologie, ses fins ultimes?

« INTRODUCTIONImportance philosophique du problème de la mort: le sens de la vie est lié au sens de la mort. I.

LA MORT EST REDOUTÉE — A — La peur de mourir.Crainte de l'inconnu ou crainte de l'au-delà.

Racines profondes en l'homme (effets physiologiques).

Pas d'expériencede la mort. — B — La mort comme faillite.Parce que nous devons mourir, la vie est absurde.

Mythe de Sisyphe : rien n'a d'importance puisque tout estcondamné à l'échec.

L'homme en sursis. — C - Le désir d'éternité.La mort est le terme de notre existence temporelle, d'où : le Temps ennemi de l'homme et « le désir d'éternité »(Alquié) comme passion fondamentale. Alquié a brillamment illustré la thèse psychanalytique en son « Désir d'éternité ».

Le « désir d'éternité », le « refus du temps » dont parle Alquié à propos des passions, c'est la fixation du passionné à des circonstances de son passé dont il est d'autant plus l'esclave qu'il n'en prend pas une conscience claire.

Les passionnés, « prisonniers d'un souvenir ancien qu'ils ne parviennent pas à évoquer à leur conscience claire sont contraints par ce souvenir à millegestes qu'ils recommencent toujours, en sorte que toutes leurs aventures semblent une même histoireperpétuellement reprise.

Don Juan est si certain de n'être pas aimé que toujours il séduit et toujours refuse de croireà l'amour qu'on lui porte, le présent ne pouvant lui fournir la preuve qu'il cherche en vain pour guérir sa blessureancienne.

De même, l'avarice a souvent pour cause quelque crainte infantile de mourir de faim, l'ambition prendsouvent sa source dans le désir de compenser une ancienne humiliation...

Mais ces souvenirs n'étant pas conscientset tirés au clair, il faut sans cesse recommencer les actes qui les pourraient apaiser. » La conception de Alquié a été discutée par Pradines .

Ce dernier, tout en reconnaissant que nos premières émotions sont parfois susceptibles d'orienter définitivement nos tendances, se refuse à voir en toutepassion l'emprise inconsciente du passé.

Le plus souvent, la passion se présente « plutôt comme l'appétit de sensations inconnues que comme le désir de renouveler d'anciennes expériences ».

La passion charnelle n'est-elle pas « révolte contre l'habitude » ? Sans doute, en sa conscience claire, la passionné aspire à éprouver dessensations nouvelles.

Dans le « coup de foudre », la passion éclate brusquement, s ‘éprouve comme une découverte que rien ne laissait présager.

Mais le témoignage de la conscience du passionné ne nous semble nullement décisif.Les « découvertes », les « révélations » de la passion sont la réponse à une angoisse qui leur préexiste et qui ne trouve sa signification claire que dans les événements de notre passé.

Le « coup de foudre » ne nous introduit pas dans un monde réellement nouveau, mais réveille une ancienne nostalgie.

Si ce visage, inconnu encore de nous il y aseulement quelques instants, nous trouble si fort, n'est-ce pas, comme le dit Alquié , que « nouveau en lui-même, il devient pour nous l'image et le symbole d'une réalité que notre passé a connue » ? Dans le « Phèdre », Platon a parlé de l'émotion amoureuse de l'âme qui tombe en extase devant la beauté.

Mais cette extase soudaine n'est quele retour d'un souvenir.

Réveillée par la présence du Beau, l'âme se souvient moins obscurément de son passélumineux, avant l'incarnation, au paradis des Idées.

Il est permis de reconnaître en ce mythique paradis,magiquement ressuscité par une belle apparition, le symbole métaphysique du « vert paradis » de nos « amours enfantines » dont nos passions adultes ne sont obscurément que la résurrection nostalgique. De la théorie psychanalytique, nous retiendrons essentiellement le caractère inconscient des processus passionnels.L'objet de la passion résulte d'un transfert ou d'une compensation, ou d'une sublimation.

Les vraies causes de lapassion sont en nous-mêmes et non réellement dans les objets qui paraissent les solliciter. « Orientée vers le passé, remplie par son image, la conscience du passionné devient incapable de percevoir leprésent : elle ne peut le saisir qu'en le confondant avec le passé auquel elle retourne, elle n'en retient que ce qui luipermet de revenir à ce passé, ce qui le signifie, ce qui le symbolise : encore signes et symboles ne sont-ils pas iciperçus comme tels, mais confondus avec ce qu'ils désignent.

L'erreur de la passion est semblable à celle où risquede nous mener toute connaissance par signes [...] ; le signe est pris pour la chose elle-même : telle est la sourcedes idolâtries, du culte des mots, de l'adoration des images, aveuglements semblables à ceux de nos plus communespassions ; [...] Il est vain de vouloir détruire un amour en mettant en lumière la banalité de l'objet aimé, car la lumière dont lepassionné éclaire cet objet est d'une autre qualité que celle qu'une impersonnelle raison projette sur lui : cettelumière émane de l'enfance du passionné lui-même, elle donne à tout ce qu'il voit la couleur de ses souvenirs [...].L'erreur du passionné consiste donc moins dans la surestimation de l'objet actuel de sa passion que dans laconfusion de cet objet et de l'objet passé qui lui confère son prestige.

[...] Son erreur est seulement de croire queles beautés qui l'émeuvent et les dangers qu'il redoute sont dans l'être où il les croit apercevoir.

En vérité,l'authentique objet de sa passion n'est pas au monde, il n'est pas là et ne peut pas être là, il est passé.

Mais lepassionné ne sait pas le penser comme tel : aussi ne peut-il se résoudre à ne le chercher plus.

» Alquié , « Le désir d'éternité ».. »

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