Devoir de Philosophie

Faut-il selon vous vivre d'abord et philosopher ensuite ?

Publié le 27/02/2011

Extrait du document

       • Cela signifie-t-il qu'il faut (que Ton peut?) philosopher seulement si « on a le temps « ? Après les « urgences « (vitales ?).    Cf. Aristote (Métaphysique, I).    Entreprise purement spéculative, philosopher ne pourrait apparaître que lorsque les besoins les plus urgents de la vie ont été satisfaits et sous la condition que l'on dispose déjà « de presque tout le nécessaire «.    La philosophie exigerait des loisirs sérieux et Aristote voyait une condition de la philosophie dans la possession d'esclaves, et d'un intendant qui puisse décharger le maître de la tâche de les diriger (cf. Politique, I, 7, 1255 b 33-37).    • Cela signifierait-il que la nécessité de la philosophie ne serait point absolue mais conditionnelle?    Philosopher supposerait résolu le problème de sa propre existence biologique et économique. Elle serait non nécessaire absolument, elle se proposerait comme une tâche à accomplir, non parce que nous y serions amenés par une contrainte ou une nécessité « vitale «, mais comme ce qu'il nous appartiendrait de mettre en œuvre pour être de « vrais hommes «.    • Cela signifierait-il que philosopher devrait être la suite d'un certain nombre d'expériences existentielles? Que « philosopher « ne saurait avoir de sens si cet exercice ne se référait à notre propre existence, à nos propres expériences existentielles?

« A.

Il semble que si le mot vivre est pris au sens strict, on ne peut qu'admettre la vérité du proverbe. La pensée et l'exercice de cette pensée dépendent de l'existence et de la vie du corps.

Nous ne sommes pas depurs esprits, mais des esprits unis à un corps.

La première condition pour pouvoir penser, réfléchir, philosopher, estdonc déjà de vivre ; c'est une vérité trop évidente pour qu'il soit besoin d'y insister.C'est, de plus, un fait d'expérience journalière que les exigences de la vie priment celles de la pensée.

Ce quipréoccupe l'homme avant tout c'est de vivre ; la plus grande partie de son activité, pour ne pas dire sa presquetotalité, est dirigée vers ce but : obtenir de la nourriture, des vêtements, du confort, etc.

Pourquoi l'hommechercherait-il tant à gagner de l'argent, sinon pour pouvoir vivre ? Et comment philosopher (et je n'emploie pas cemot au sens strict, mais même au sens large) si l'on est tiraillé par la faim, si l'on grelotte de froid, si l'on est inquietpour sa subsistance du lendemain ? Demandez donc à quelqu'un qui vient de dépenser ses derniers sous pouracheter un morceau de pain, à un naufragé qui se débat au milieu des vagues de se livrer à une méditationdésintéressée, à un pur jeu de l'esprit.

L'homme, quand sa vie n'est pas assurée, ne pense qu'à une chose :comment agir pour ne pas mourir.

La première et indispensable condition pour philosopher est donc de ne pas avoird'inquiétudes au sujet de notre vie quotidienne, sans quoi l'action s'impose à nous, l'action immédiate et totale.C'est ce que confirme l'histoire des peuples.

A quel moment assiste-t-on à l'essor et à la floraison de la penséedésintéressée, de la méditation, de la philosophie, de l'art ? C'est aux époques où les conditions essentielles de lavie semblent assurées : la paix, l'ordre, la prospérité, règnent, et les hommes, n'ayant plus à s'occuper de larecherche de leur pain quotidien, peuvent donner leurs loisirs à la pensée : siècle de Périclès, d'Auguste, de LouisXIV.Philosopher est donc bien une occupation de l'esprit à laquelle on ne peut s'adonner que dans la mesure où il restedu temps après les actions primordiales qui doivent assurer la vie. B.

Mais si l'on prend le terme vie au sens large, la maxime « vivre d'abord » ne semble pas moins exacte. Que serait, en effet, une philosophie qui ne prendrait pas son point d'appui, sa base, dans l'expérience de la vie ?Philosopher, sans se référer au réel, n'aboutirait qu'à d'inconsistantes et folles élucubrations d'une pensée quin'aurait de pensée que le nom, à des « rêves de visionnaires », comme dit Kant, semblables à ces productions quisont l'apanage des asiles d'aliénés.

Et vraiment, on ne peut appeler cela : philosopher.

Car, même si le philosopheest dans les « Nuées », s'il est un rêveur et semble se désintéresser de l'action pratique et immédiate, ce n'est pasun fou.

Ce Socrate, dont Aristophane nous fait un portrait grotesque dans sa comédie, était, au contraire, l'hommequi était le plus près de la vie et de ses réalités.

Il suffit pour s'en rendre compte de lire les dialogues socratiques dePlaton.C'est, en effet, au contact de la vie, de ses exigences et de ses difficultés, que la réflexion prend naissance et quese posent les sujets de méditation et de philosophie.

Car la vie n'est pas un jeu, un luxe, on ne peut prendre à sonégard une attitude de dilettante.

Elle nous prend à la gorge et nous pose des problèmes auxquels nous devonsréfléchir : « nous sommes embarqués ».

Si le philosophe se retire dans sa tour d'ivoire pour y méditer, ce n'estqu'après avoir parcouru en tous sens le « grand livre du monde », dont nous parlent un Montaigne et un Descartes.Plus on vit, plus on est aux prises avec les difficultés de l'existence, plus les problèmes s'imposent nombreux etobsédants à notre méditation, problèmes réels ceux-là et angoissants, car il y va de notre vie elle-même.Enfin, ce ne peut être que la vie qui suggère à la réflexion des éléments de solution des grands problèmes qu'ellepose.

Si philosopher a un but, ce ne peut être qu'un but concret et pratique.

La Morale, que la réflexionphilosophique doit bâtir, est une morale qui rende, non les anges, mais les hommes heureux.

Comme le dit Descartes,dans le « Discours de la Méthode », c'est l'expérience seule qui dit si les produits de la réflexion et de la pensée sontde pures imaginations, ou sont marqués du sceau de la réalité.

C'est par la confrontation avec la vie que lephilosophe connaîtra la valeur de sa pensée et de ses méditations.Il semble donc bien que ce qui prime d'abord, ce qui doit avoir la première place dans nos préoccupations, c'est devivre.

Philosopher ne peut et ne doit venir qu'après.

L' « homo faber » est antérieur à l' « homo sapiens » ; « aucommencement, était l'action ». III.

- VIVRE EST-IL POSSIBLE SANS PHILOSOPHER ? La conclusion de ce qui précède donne donc raison à ce que nous disions au début : les proverbes expriment sousune forme condensée la sagesse populaire.

Mais la sagesse populaire est-elle la vraie sagesse ? Ce qui apparaîtévident au simple bon sens, est-il évident en réalité ? Il n'est pas besoin de beaucoup d'expérience pour se rendrecompte que le sens commun s'en tient le plus souvent aux apparences, qu'il ne va pas au fond des problèmes et queles jugements qu'il porte sont d'une vérité assez superficielle.

Avant donc de donner raison à la maxime : « d'abordvivre, ensuite philosopher », il convient d'examiner plus profondément les termes du problème.De quelle vie s'agit-il dans l'expression « vivre d'abord » ? La vie est, en effet, le partage des végétaux, des animauxet des hommes.

Or la deuxième partie de la maxime « ensuite philosopher » montre évidemment qu'il ne peut s'agirque de la vie humaine, car ni le végétal ni l'animal ne peuvent philosopher n'ayant pas en partage la raison.

Mais lavie humaine ne consiste pas seulement dans la satisfaction des besoins du corps, les exigences de la vie de l'espritne sont pas moins impérieuses.

« L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui tombe de labouche de Dieu ».

Vivre pour la pensée, c'est réfléchir, méditer, c'est philosopher, et un homme qui prétend menerune vie d'homme ne peut pas plus se passer de philosopher, c'est-à-dire d'exercer son esprit, que de donner desaliments à son corps.

Vivre sans philosopher, ce serait donc mener une vie semblable à celle d'une plante ou d'unanimal.

Or, dit Stuart Mill : « J'aime mieux être un Socrate mécontent qu'un pourceau satisfait ».

Si donc l'hommeveut mener une vie d'homme, il doit, non pas vivre d'abord et philosopher ensuite, mais unir intimement vie et. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles