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Faut-il vivre pour autrui ?

Publié le 05/01/2004

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Concluons : la connaissance de soi est un plaisir qui n'est pas possible sans la présence de quelqu'un d'autre qui soit notre ami ; l'homme qui se suffit à soi-même aurait donc besoin d'amitié pour apprendre à se connaître soi-même. Aristote     Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne le juge ni ne le blâme, je le vis simplement, je le réalise sur le mode du pour-soi. Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu'un était là et m'a vu. Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j'ai honte. Il est certain que ma honte n'est pas réflexive, car la présence d'autrui à ma conscience, fût-ce à la manière d'un catalyseur, est incompatible avec l'attitude réflexive : dans le champ de ma réflexion je ne puis jamais rencontrer que la conscience qui est mienne. Or autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même : j'ai honte de moi tel que j'apparais à autrui. Et, par l'apparition même d'autrui, je suis mis en mesure de porter un jugement sur moi-même comme sur un objet, car c'est comme objet que j'apparais à autrui. Mais pourtant cet objet apparu à autrui, ce n'est pas une vaine image dans l'esprit d'un autre. Cette image en effet serait entièrement imputable à autrui et ne saurait me « toucher Je pourrais ressentir de l'agacement, de la colère en face d'elle, comme devant un mauvais portrait de moi, qui me prête une laideur ou une bassesse d'expression que je n'ai pas ; mais je ne saurais être atteint jusqu'aux moelles : la honte est, par nature, reconnaissance. Je reconnais que je suis comme autrui me voit.

L’analyse du sujet doit prendre compte plusieurs termes ou expressions. Le terme central semble ici autrui. Autrui désigne en premier lieu l’autre, du latin “alter”. Autrui m’apparaît d’abord comme “celui” qui n’est pas moi. Mais à la différence de “ce” qui n’est pas moi (les choses qui m’entourent), autrui est aussi un autre moi (alter ego). Je ne le conçois pas comme chose mais comme sujet, du fait de sa ressemblance avec moi-même, ressemblance qui se base essentiellement sur le visage, lequel m’ouvre à la sympathie, et sur la communauté du langage. Autrui constitue donc une réalité paradoxale, d’autant plus que je ne peux aborder cette dernière qu’à partir de ma seule conscience. En effet, autrui pose une limite à ce que je suis, il est l’autre en tant que tel, cette conscience qui n’est pas la mienne, mais ce qui me permet de reconnaître cette conscience comme autre, c’est justement le fait de reconnaiître une communauté entre l’autre et moi, la communauté de la conscience.  Considérer autrui, c’est faire l’expérience de l’autre, qui me ramène à ma solitude, et du semblable, qui me ramène à une communauté à laquelle je participe.

« ma propre vulnérabilité.

Ainsi, Rousseau dans l'Émile demande à ce que la fin de l'action humaine soit de ne pas faire à autrui ce que je n'aimerais pas que l'on me fasse .

De même, la maxime chrétienne, aime autrui comme toi-même , ne peut avoir un sens que si l'altruisme prend source dans le rapport que j'entretien d'abord avec moi-même. En cela, Aristote a proposé une vision originale sur cette question, en formulant que l'altruisme est sous-tendu parun égoïsme fondamental et indépassable.

Cet égoïsme est considéré comme péjoratif lorsque mon action estmauvaise, puisqu'à travers elle, je me pénalise tout en pénalisant autrui.

Cependant, si l'égoïsme s'emploie à réaliserpour soi-même un bien, qui ne soit plus de l'ordre de la satisfaction effrénée des desirs mais de l'ordre moral, autruisera touché par ce bien.

C'est ainsi le fait même que l'homme soit toujours social, toujours avec autrui et seconsitue à travers lui qui rend l'égoïsme potentiellement altruiste.

Vivre pour soi selon le bien équivaut parconséquent à vivre pour autrui et à vouloir son bien. 1) Le fait de vivre pour autrui semble une nécessité au sens où je ne peux me constituer en tant qu'homme et en tant que sujet qu'à travers sa présence.

Autrui est constitutif de ma vie en tantqu'être humain et en tant que sujet. Apprendre à se connaître est très difficile [...] et un très grand plaisir en même temps (quel plaisir de seconnaître !) ; mais nous ne pouvons pas nous contempler nous-mêmes à partir de nous-mêmes : ce qui le prouve,ce sont les reproches que nous adressons à d'autres, sans nous rendre compte que nous commettons les mêmeserreurs, aveuglés que nous sommes, pour beaucoup d'entre nous, par l'indulgence et la passion qui nousempêchent de juger correctement.

Par conséquent, à la façon dont nous regardons dans un miroir quand nousvoulons voir notre visage, quand nous voulons apprendre à nous connaître, c'est en tournant nos regards versnotre ami que nous pourrions nous découvrir, puisqu'un ami est un autre soi-même.

Concluons : la connaissancede soi est un plaisir qui n'est pas possible sans la présence de quelqu'un d'autre qui soit notre ami ; l'homme qui sesuffit à soi-même aurait donc besoin d'amitié pour apprendre à se connaître soi-même.

Aristote Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne le juge ni ne le blâme, je le vissimplement, je le réalise sur le mode du pour-soi.

Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu'un était là etm'a vu.

Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j'ai honte.

Il est certain que ma honte n'est pasréflexive, car la présence d'autrui à ma conscience, fût-ce à la manière d'un catalyseur, est incompatible avecl'attitude réflexive : dans le champ de ma réflexion je ne puis jamais rencontrer que la conscience qui est mienne.Or autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même : j'ai honte de moi tel que j'apparais à autrui.

Et,par l'apparition même d'autrui, je suis mis en mesure de porter un jugement sur moi-même comme sur un objet,car c'est comme objet que j'apparais à autrui.

Mais pourtant cet objet apparu à autrui, ce n'est pas une vaineimage dans l'esprit d'un autre.

Cette image en effet serait entièrement imputable à autrui et ne saurait me «toucher Je pourrais ressentir de l'agacement, de la colère en face d'elle, comme devant un mauvais portrait demoi, qui me prête une laideur ou une bassesse d'expression que je n'ai pas ; mais je ne saurais être atteintjusqu'aux moelles : la honte est, par nature, reconnaissance.

Je reconnais que je suis comme autrui me voit.Sartre Autrui, en figeant mes possibilités, me révèle l'impossibilité où je suis d'être objet, sinon pour une autre liberté.

Jene puis être objet pour moi-même car je suis ce que je suis; livré à ses seules ressources, l'effort réflexif vers ledédoublement aboutit à l'échec, je suis toujours ressaisi par moi.

Et lorsque je pose naïvement qu'il est possibleque je sois, sans m'en rendre compte, un être objectif, je suppose implicitement par là même l'existence d'autrui.Car comment serais-je objet si ce n'est pour un sujet? Ainsi autrui est d'abord l'être pour qui je suis objet, c'est-à-dire l'être par qui je gagne mon objectivité.

Si je dois seulement pouvoir concevoir une de mes propriétés sur lemode objectif, autrui est déjà donné.

Et il est donné non comme être de mon univers, mais comme sujet pur.

Ainsice sujet pur que je ne puis, par définition, connaître, c'est-à-dire poser comme objet, il est toujours là hors deportée et sans distance lorsque j'essaie de me saisir comme objet.

Et dans l'épreuve du regard, en m'éprouvantcomme objectivité non révélée, j'éprouve directement et avec mon être l'insaisissable subjectivité d'autrui.

Jean-Paul SARTRE 2) Cependant, autrui est ici considéré comme un simple moyen.

C'est "par lui” que je vis et non "pour lui”.

Cependant, il y a une autre approche d'autrui possible, qui fait de son existence la sourcede l'existence morale.

C'est en effet à travers l'expérience d'autrui que je prends conscience de laportée de mes actes et de ma responsabilité vis-à-vis de la vulnérabilité de l'autre.

Autrui est ainsià l'origine de mon existence en tant qu'être libre et moral.

Il est dès lors la fin de la moralité.

Vouloirle bien d'autrui, c'est s'assurer non plus la vie mais une vie bonne. Je pense plutôt que l'accès au visage est d'emblée éthique.

C'est lorsque vous voyez un nez, des yeux, un front,. »

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