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Henri Bergson L'énergie spirituelle

Publié le 20/01/2013

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Henri Bergson L'énergie spirituelle Texte : [I] Qu'arrive-t-il quand une de nos actions cesse d'être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s'en retire. Dans l'apprentissage d'un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des mouvements que nous exécutons, parce qu'il vient de nous, parce qu'il résulte d'une décision et implique un choix, puis à mesure que ces mouvements s'enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. [II] Quels sont, d'autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux et plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l'aurons fait ? [III] Les variations d'intensité de notre conscience semblant donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sous notre conduite. Tout porte à croire qu'il en est ainsi de la conscience en général. Si conscience signifie mémoire et anticipation, c'est que conscience est synonyme de choix. Introduction : [Problématique] [a] Une observation rapide portée sur les notions de conscience et de choix semble conduire à refuser qu'on les dérive l'une de l'autre. En effet, la conscience est traditionnellement définie comme la faculté par laquelle un être vivant acquiert le savoir de ce qui l'environne et de ce qu'il est. Les objets appartenant au monde extérieur lui parviennent sous la forme d'informations sensibles par l'intermédiaire de son système perceptif, et sa propre activité ne lui est plus inconnue mais il la conçoit dans son esprit par réflexion. Être conscient de, c'est donc savoir que, c'est passer de la simple existence à l'expérience, c'est être arraché au cours des choses et au tout de la nature auquel nous étions confondu par la possibilité nouvelle de la contempler (theorein en grec), d'adopter une sorte de point de vue extérieur ( meta en grec), d'être un regard distancié sur la marche de l'histoire. Choisir, au contraire, c'est sortir de la contemplation, de la simple conscience pour entrer dans le domaine de l'action (praxis en grec). Etre conscient que nos avant-bras se vident de leur sang, ce n'est pas encore appeler les urgences. Etablir l'état d'une situation dépend de la conscience, déclencher l'action dépend de la volonté. La conscience est en nous la faculté qui livre l'information, la volonté celle qui lui donne un prolongement pratique. La conscience qui sait et la volonté qui choisit semblent donc s'opposer comme le domaine théorique et le domaine pratique, comme la connaissance et l'action : savoir n'est pas pouvoir. [b] Et pourtant, 1 n'est-il pas tout aussi évident que notre liberté disparaît avec l'effacement de la conscience ? Nous respirons par exemple de façon mécanique tant que nous n'y pensons pas. Mais sitôt que notre attention se porte sur les mouvements de l'expiration et de l'inspiration, nous sentons qu'il est possible d'agir sur le rythme de leur succession et, par exemple, de retenir notre souffle ou de passer en hyperventilation. Que l'on se mette à réfléchir aux mouvements qui sont nécessaires pour la marche, et alors le mouvement naturel de nos jambes ralentit, son exécution devient moins aisée, nous sommes bientôt contraint de nous arrêter : la conscience a pris le relais du mécanisme, elle contrôle l'exécution spontanée de l'action. C'est désormais en plein conscience, c'est-à-dire volontairement, et non plus mécaniquement, que nous levons une jambe, puis l'autre, puis de nouveau la première, etc. On remarque de la même manière qu'il est plus difficile, voire impossible de manipuler une personne éclairée, c'est-à-dire qui est consciente des voies empruntées pour l'obtention de son obéissance. Connaître les stratégies commerciales de vente, par exemple, nous protège contre le risque de succomber à leurs attraits. Une plus grande vigilance stoppe le pouvoir que les choses ont sur nous et par suite augmente celui que nous avons sur ou contre elles. La conscience augmenterait donc bien notre liberté. [Question] Simple éclairage impuissant de notre action, ou faisceau lumineux qui l'oriente, la dirige et la rend possible, quel rapport y a-t-il entre la conscience et le choix ? La conscience est-elle synonyme de choix ? Sommes-nous d'autant plus libre que nous sommes plus conscient ? Question corrélée : est-ce parce que nous sommes conscient que nous sommes libre ? La conscience est-elle en nous la cause matérielle de notre liberté ? [Plan] [I] La conscience disparaît-elle quand nos actions deviennent automatiques ? [II] Inversement, constatons-nous qu'elle augmente lorsque nous sommes confrontés à un problème, à une rupture dans l'ordre de l'habitude ? [III] Enfin, si nous constations qu'il existe une corrélation entre la conscience et la faculté de choisir, comment préciser la nature de ce lien ? Avons-nous affaire à un lien causal ? I Passage de la spontanéité à l'automatisme : de la conscience à l'inconscient . 1. Automatisme et spontanéité : Pour montrer le rôle que joue la conscience dans les processus de choix, Bergson s'appuie sur l'expérience très ordinaire du passage de la spontanéité à l'automatisme dans nos actions. Comment interpréter ces deux termes ? On aurait tendance à qualifier de spontané tout type d'action que nous effectuons naturellement, par réflexe ou par instinct, sans y réfléchir, aveuglément, peutêtre du fait de quelque règle innée de réaction aux données transmises par les sens. Spontané serait ici le contraire de l'action volontaire et consciente. Nous disons par exemple : « Si on m'avait posé la question, j'aurais répondu spontanément que la guillotine était un outil pénal propre au 19 e siècle «, alors qu'elle fut utilisée en France jusqu'en 19771. Ou : « Quand j'ai appris que le cours de 1 En juillet 1974, Hamida Djandoubi, manutentionnaire tunisien et proxénète notoire, kidnappa Elisabeth Bousquet, sa maîtresse, la conduisit chez lui et lui infligea pendant des heures d'affreuses tortures. Puis il la transporta (nue et sans 2 philosophie allait être supprimé en terminale, j'ai spontanément eu envie de me me jeter par la fenêtre «. Si tel était le sens de « spontané « dans le texte, on verrait mal quel sens donner à « automatique «, qui renvoie précisément à l'idée d'un être gouverné dans ses mouvements par des règles internes de fonctionnement exécutables en dehors de toute intervention consciente et volontaire d...
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« n'est-il pas tout aussi évident que notre liberté disparaît avec l'effacement de la conscience ? Nous respirons par exemple de façon mécanique tant que nous n'y pensons pas.

Mais sitôt que notre attention se porte sur les mouvements de l'expiration et de l'inspiration, nous sentons qu'il est possible d'agir sur le rythme de leur succession et, par exemple, de retenir notre souffle ou de passer en hyperventilation.

Que l'on se mette à réfléchir aux mouvements qui sont nécessaires pour la marche, et alors le mouvement naturel de nos jambes ralentit, son exécution devient moins aisée, nous sommes bientôt contraint de nous arrêter : la conscience a pris le relais du mécanisme, elle contrôle l'exécution spontanée de l'action.

C'est désormais en plein conscience, c'est-à-dire volontairement, et non plus mécaniquement, que nous levons une jambe, puis l'autre, puis de nouveau la première, etc.

On remarque de la même manière qu'il est plus difficile, voire impossible de manipuler une personne éclairée, c'est-à-dire qui est consciente des voies empruntées pour l'obtention de son obéissance.

Connaître les stratégies commerciales de vente, par exemple, nous protège contre le risque de succomber à leurs attraits.

Une plus grande vigilance stoppe le pouvoir que les choses ont sur nous et par suite augmente celui que nous avons sur ou contre elles.

La conscience augmenterait donc bien notre liberté.

[Question] Simple éclairage impuissant de notre action, ou faisceau lumineux qui l'oriente, la dirige et la rend possible, quel rapport y a-t-il entre la conscience et le choix ? La conscience est-elle synonyme de choix ? Sommes-nous d'autant plus libre que nous sommes plus conscient ? Question corrélée : est-ce parce que nous sommes conscient que nous sommes libre ? La conscience est-elle en nous la cause matérielle de notre liberté ? [Plan] [I] La conscience disparaît-elle quand nos actions deviennent automatiques ? [II] Inversement, constatons-nous qu'elle augmente lorsque nous sommes confrontés à un problème, à une rupture dans l'ordre de l'habitude ? [III] Enfin, si nous constations qu'il existe une corrélation entre la conscience et la faculté de choisir, comment préciser la nature de ce lien ? Avons-nous affaire à un lien causal ? I Passage de la spontanéité à l'automatisme : de la conscience à l'inconscient .

1.

Automatisme et spontanéité : Pour montrer le rôle que joue la conscience dans les processus de choix, Bergson s'appuie sur l'expérience très ordinaire du passage de la spontanéité à l'automatisme dans nos actions.

Comment interpréter ces deux termes ? On aurait tendance à qualifier de spontané tout type d'action que nous effectuons naturellement , par réflexe ou par instinct , sans y réfléchir , aveuglément , peut- être du fait de quelque règle innée de réaction aux données transmises par les sens.

Spontané serait ici le contraire de l'action volontaire et consciente.

Nous disons par exemple : « Si on m'avait posé la question, j'aurais répondu spontanément que la guillotine était un outil pénal propre au 19 e siècle », alors qu'elle fut utilisée en France jusqu'en 1977 1 .

Ou : « Quand j'ai appris que le cours de 1 En juillet 1974, Hamida Djandoubi, manutentionnaire tunisien et proxénète notoire, kidnappa Elisabeth Bousquet, sa maîtresse, la conduisit chez lui et lui infligea pendant des heures d'affreuses tortures.

Puis il la transporta (nue et sans 2. »

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