Devoir de Philosophie

Hume et le sentiment du moi

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

hume
Pour ma part, quand je pénètre le plus intimement dans ce que j'appelle moi, je bute toujours sur une perception particulière ou sur une autre, de chaud ou de froid, de lumière ou d'ombre, d'amour ou de haine, de douleur ou de plaisir. Je ne peux jamais me saisir, moi, en aucun moment sans une perception et je ne peux rien observer que la perception. Quand mes perceptions sont écartées pour un temps, comme par un sommeil tranquille, aussi longtemps je n'ai plu: conscience de moi et on peut dire vraiment que je n'existe pas Si toutes mes perceptions étaient supprimées par la mort et que je ne puisse ni penser, ni sentir, ni voir, ni aimer, ni haïr après la dissolution de mon corps, je serais entièrement annihilé (1) et je ne conçois pas ce qu'il faudrait de plus pou faire de moi un parfait néant. Si quelqu'un pense, après un réflexion sérieuse et impartiale, qu'il a, de lui-même, un connaissance différente, il me faut l'avouer, je ne peux:: raisonner plus longtemps avec lui. HUME

Dans le cadre de cet extrait, Hume tente de caractériser l'expérience par laquelle je tente de me saisir, par laquelle je tente de saisir mon moi. Puis-je d'ailleurs le saisir en lui-même, épuré de toutes sensations, de toutes émotions? Lorsque je mène une introspection, m'est-il possible de rencontrer cette substance propre qu'est l'ipséité, cette essence même de ma subjectivité à son état pure?

La réponse de Hume est négatif, et cet extrait tente de justifier une telle position qui rentre en pleine opposition avec celle que, Descartes avant lui, tentait de défendre. En effet, ce texte peut être perçu comme une réponse empiriste au cogito innéiste cartésien, un cogito où le sujet fait précisément l'expérience de cette irréductible substance pensante qu'est le moi dans son plus pure état. Le moi, pour Hume, est toujours occupé à ressentir quelque chose, à penser quelque chose, de telle sorte que ces idées, ces sentiments, sont autant de barrages pour une saisie du moi dans son plus sincère éclat.

 

hume

« Lorsque Hume s'exerce à l'introspection il nous dit qu'aussitôt il « bute sur une perception particulière ».

il s'agit de faire ici un détour par la deuxième des Méditations Métaphysiques de Descartes.

Lorsque ce dernier énonce: « il faut donc conclure et tenir pour certain que cette proposition: je suis,j'existe, est nécessairement vraie chaque fois que je la prononce ou que je laconçois en mon esprit », il illustre par là sa stratégie susbtantialiste: il veut faire de la conscience que j'ai de moi-même l'expérience même de masusbtance pensante ( res cogitan ).

Comment comprendre cela? Lorsque j'ai une idée, quelque soit son objet, qu'il s'agisse de quelque chose de bien réelou encore d'une chimère, elle a quelque chose de commun avec toutes lesautres idées que je peux avoir: sa forme .

En effet, il y a plein de pensées qui peuplent ma vie mentale, mais lorsque j'ai conscience de l'une d'elle, i-e quej'ai conscience qu'il s'agit d'une pensée en générale, je saisis alors sa forme,sa nature idéelle .

C'est parce que j'ai conscience d'une pensée que cette pensée est une idée car je saisis en elle sa forme idéelle, ce qu'elle a decommun avec toutes les autres idées.

Or, il se trouve que pour Descartescette nature idéelle est porteuse d'un contenu fondamental: cette matièredans laquelle se constitue chacune de mes pensées, cette matière métaphysique , c'est ma substance pensante.

Et en ce sens, chacune de mes idées n'est qu'une modification de cette substance pensante.

Je peux ainsi,selon Descartes, faire l'expérience de mon ipséité la plus pure tout simplement en ayant une perception immédiate et interne de chacune de mes pensées. Pour Hume, ce geste cartésien qui consiste à faire de la conscience de mes pensées l'expérience de ma sustancepensante est proprement illusoire.

Je ne peux me représenter une telle abstraction.

A chaque fois que je tente deme saisir comme moi, une perception ou une émotion vient s'interposer comme un voile entre ma recherche et monipséité.

Nous pourrions dire que Hume énonce en substance, et ce avant Husserl, que toute conscience estconscience de quelque chose.

Lorsque je me pense, je me pense entrain de penser à quelque chose, ou entrain de ressentir quelque chose.

Si l'on me demandait de me représenter mon moi dans son essence même, i-e sous uneforme épurée, susbtantielle, je n'y parviendrai pas.

Mon esprit est toujours pré-occupé, entendons par là qu'il esttoujours occupé à percevoir quelque chose lorsque je suis éveillé et que je tente de m'en saisir.

La réflexivité parlaquelle l'esprit fait retour sur lui, saisit toujours un esprit entrain de s'affairer dans le monde ou entrain d'éprouverquelque chose, au point que je ne puis même être certain qu'il existe bien un moi substantiel en deça de sesreprésentations ou des affections. « Quand mes perceptions...

raisonner longtemps avec lui »: conscience et existence II. Hume nous invite à présent à envisager la réciproque de son raisonnement.

Il nous disait dans un premier temps quela conscience de soi bute toujours sur un esprit en activité.

A présent, il précise que c'est précisément parce qu'il ya activité de l'esprit que nous avons conscience de nous-même en activité.

L'esprit ne peut se penser qu'enmouvement, et c'est parce qu'il y a ce mouvement qu'il y a conscience de soi.Qu'advient-il lorsque je m'endors? Jene perçois plus rien de l'extérieur, je suis dans une sorte d'autarcie psychique.

Et en même temps, je ne me perçoispas non plus moi-même.

Le sommeil équivaut à une petite mort pendant laquelle je m'oublie simplement.

Parce queje ne peux saisir que l'esprit qui perçoit quelque chose, cette cessation de la perception fait disparaître touteconscience de soi.

Or, avoir conscience de soi, c'est avoir conscience qu'on existe.

En effet, si nous n'avions pas laréflexion, nous serions hâpé par le présent, affairé tout entièrement à notre tâche.

Ainsi, la tique qui est en suspendsur sa tige et qui lache prise dès qu'elle ressent la présence de follicules sébacés propres aux mammifères, estentièrement vouée à sa tâche.

Et en ce sens, elle n'a pas conscience de son existence, elle se contente d'agirsimplement. La conscience de soi fait surgir un nouveau type de représentation: l'esprit fait de ses opérations un théâtre poursa propre vue: il devient alors à la fois sujet et objet.

Et dans ce retour sur lui-même, il a alors une vision de luientrain d'exister, entrain de s'occuper à sa tâche.

Nous pourrions ici faire la distinction entre être en vie et exister. La tique est en vie, en ce sens qu'elle n'a aucune conscience d'elle-même mais se contente de s'affairer pourrépondre à ses besoins.

A contrario , l'homme, parce qu'il se regarde entrain de regarder, parce que son esprit peut s'élever au carré, existe proprement, au sens où il a conscience de ses activités mentales, il a une représentationde lui-même entrain de former des représentations.

Mais le message de Hume, c'est de dire que cette conscience desoi vient précisément du fait que l'esprit est mise en branle par quelque chose.

Si je ne percevais rien, si je neressentais rien, je n'aurais alors conscience de rien, même pas de moi entrain d'exister.

En effet, je ne peux mereprésenter un esprit en soi comme chez Descartes.

Cette représentation est impossible parce qu'elle est vide,abstraite.

Saisissons ici la place de l'image dans la pensée humienne.

Celui-ci pense les idées comme dérivant toutesd'objets empiriques et constatables.

Or la pensée ne travail que par l'image.

Je ne peux me représenter le conceptde triangle: j' imagine toujours un triangle en particulier.

Pour Descartes, si l'imagination existe, elle ne recouvre pas toute l'activité cognitive.

Je peux ainsi très bien penser un chiliogone (figure géométrique à mille côtés) bien que je ne puisse me représenter une telle figure par image.

On peut comprendre en ce sens pourquoi une idée comme lasubstance pensante est envisageable pour le philosophe français, et non pour Hume qui instaure une placeprivilégière à l'image dans la cognition.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles