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Ignacio Ramonet affirme : Ainsi s'établi la trompeuse illusion que voir c'est comprendre.

Publié le 27/02/2008

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illusion
L?avantage est que l?homme peut désormais voir venir ses prédateurs de loin (et aussi libérer ses mains pour s?en servir à saisir des objets, fonction jusque là conférée à sa bouche, laquelle, libérée de cette tâche, est prête à la parole).             C?est donc à l?origine pour une raison d?adaptation que l?homme privilégia le sens visuel (il existe d?autres types de vision que celles humaines et dont nous n?avons qu?une mince idée, ainsi la vision de certains insectes et celle très perçante des oiseaux de proie, qui ne peut être réduite à une amélioration quantitative de notre indice de précision). Nous pouvons remarquer que l?importance, vitale, de la vision, n?a pas une fonction purement préventive (apercevoir le danger) mais également attractive, et que l?homme partage avec de nombreuses espèces. En effet, même lorsque l?homme est sorti de l?état sauvage, le sens visuel demeure le plus sensible à la séduction. La mode et le maquillage sont rien moins que des adaptations humaines de l?utilisation par l?animal des propriétés esthétiques de la nature dans une visée de séduction.             Enfin, l?art ou la science seraient impossibles sans la vision (hormis la musique, la question se pose aussi pour les mathématiques), elle est l?outil dont les premier scientifiques, médecins et astronomes, se servaient le plus pour construire leurs systèmes. Sans vision il n?y a aucune possibilité d?observation scientifique ni d?ouvrage artistique ; on peut tout aussi bien prendre le monde contemporain pour témoigner de l?importance de la vision par le biais d?une réflexion sur la notion d?image en politique ou dans l?appréhension de la violence et de la sexualité. Le perfectionnement des technologies de l?image nous enfoncent dans une ère du voyeurisme interactif.         II- Voir c?est comprendre : une illusion.               Il est frappant, à la lecture des écrits sur le corps humain publiés dans l?Antiquité (par exemple Hippocrate et Aristote) de voir combien les propriétés du corps et son fonctionnement sont inférés à partir d?observations purement phénoménales, dénuées de présuppositions théoriques et qui, pour un esprit non scientifique, peuvent être saisissantes de naïveté.
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« fois une machine et qui, en la regardant simplement, resterait bien incapable de lui assigner la fonction qu'elleremplit.

III- Difficultés. Cependant, que la dissociation entre savoir et vision soit nécessaire à l'établissement rationnel de laconnaissance, il n'est pas interdit d'inclure des nuances et des limites à une telle nécessité.

En effet, on risque deglisser la pente du positivisme et de se rendre aveugle à une certaine richesse de la vision.

Merleau-Ponty donnel'exemple, dans La structure du comportement du bébé qui a un mois à peine est capable de réagir de manière censée aux expressions qu'il lit sur le visage de sa mère.

Un bébé de quinze mois ouvre la bouche si je prends par jeu l'un de sesdoigts entre mes dents et que je fasse mine de le mordre.

Et pourtant,il n'a guère regardé son visage dans une glace, ses dents neressemblent pas aux miennes.

C'est que sa propre bouche et sesdents, telles qu'il les sent de l'intérieur, sont d'emblée pour lui desappareils à mordre, et que ma mâchoire, telle qu'il la voit du dehors,est d'emblée pour lui capable des mêmes intentions.

La «morsure» aimmédiatement pour lui une signification intersubjective.

Il perçoit sesintentions dans son corps, mon corps avec le sien, et par là mesintentions dans son corps.(...) En tant que j'ai des fonctions sensorielles, un champ visuel,auditif, tactile, je communique déjà avec les autres, pris aussi commesujets psychophysiques.

Mon regard tombe sur un corps vivant en traind'agir, aussitôt les objets qui l'entourent reçoivent une nouvelle couchede signification: ils ne sont plus seulement ce que je pourrais en fairemoi-même, ils sont ce que ce comportement va en faire.

Autour ducorps perçu se creuse un tourbillon où mon monde est attiré et commeaspiré: dans cette mesure, il n'est plus seulement mien, il ne m'est plusseulement présent, il est présent à x, à cette autre conduite quicommence à se dessiner en lui.

Déjà l'autre corps n'est plus un simplefragment du monde, mais le lieu d'une certaine élaboration et commed'une certaine «vue» du monde.

Il se fait là-bas un certain traitementdes choses jusque-là miennes.

Quelqu'un se sert de mes objets familiers.

Mais qui? Je dis que c'est unautre, un second moi-même et je le sais d'abord parce que ce corps vivant a même structure que le mien.J'éprouve mon corps comme puissance de certaines conduites et d'un certain monde, je ne suis donné àmoi-même que comme une certaine prise sur le monde; or c'est justement mon corps qui perçoit le corpsd'autrui et il y trouve comme un prolongement miraculeux de ses propres intentions, une manièrefamilière de traiter le monde ; désormais, comme les parties familières de mon corps forment un système,le corps d'autrui et le mien sont un seul tout, l'envers et l'endroit d'un seul phénomène et l'existenceanonyme dont mon corps est à chaque moment la trace habite désormais ces deux corps à la fois. Les analyses de Sartre, si belles soient-elles, ne prennent pas en compte l'aspect charnel de la rencontre d'autrui:dans sa description, un pur regard désincarné m'impose brutalement le statutd'objet, de chose.

Merleau-Ponty, réagissant contre ce type d'analyse, tente au contraire de fonder au niveau ducorps la rencontre d'autrui.

Mais on ne revient pas pour autant à Husserl: il ne s'agit pas de mon corps mais de ladimension corporelle en général, telle que moi et les autres y participons. L'argumentation générale du texte s'appuie sur un exemple.

Le geste de « morsure » (seulement esquissé par unmouvement des dents: « Attention, je vais te mordre ») est immédiatement compris par l'enfant, mais sansraisonnement aucun (il n'a pas « comparé» sa bouche avec celle de l'adulte pour savoir que les deux bouches seressemblent et peuvent mordre toutes les deux).

Le geste de morsure est donc immédiatement perçu comme unepossibilité de son propre corps (« Mon corps aussi sait mordre »).

Ainsi, il n'y a pas un «tu peux mordre » opposé àun « je peux mordre », mais une possibilité générale de « mordre » qui réside dans mon corps et dans le corps del'autre.

Cette possibilité, puisqu'on en perçoit l'existence dans tous les corps, est donc la propriété d'une dimensioncorporelle en général.Or, pour Merleau-Ponty, c'est à ce niveau de corporéité anonyme, pré-personnelle (en tant qu'elle n'est pas«mienne» exclusivement, pas plus que «sienne») que s'établit la possibilité de communication avec autrui.Le paragraphe suivant reprend la démonstration sur l'exemple plus général de la perception du comportementd'autrui (par exemple, je vois quelqu'un porter des paquets, s'impatienter devant un magasin, etc.).

Cetteperception se fait par un décentrement du Je: je comprends ce qui se passe là-bas parce que je m'y projette, parceque je n'y assiste pas comme à un spectacle objectif auquel je resterais étranger, me contentant de regarder deloin et de juger.

J'y vois toujours le prolongement d'une activité dont je ressens immédiatement en moi la possibilité(mon corps aussi connaît la lourdeur des paquets à porter, le désagrément d'une attente trop longue, etc.).. »

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