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Kant et l'autorité d'autrui

Publié le 27/02/2008

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Kant et l'autorité d'autrui Lorsque, dans les matières qui se fondent sur l'expérience et le témoignage, nous bâtissons notre connaissance sur l'autorité d'autrui, nous ne nous rendons ainsi coupables d'aucun préjugé ; car, dans ce genre de choses, puisque nous ne pouvons faire nous-mêmes l'expérience de tout ni le comprendre par notre propre intelligence, il faut bien que l'autorité de la personne soit le fondement de nos jugements. - Mais lorsque nous faisons de l'autorité d'autrui le fondement de notre assentiment (*) à I'égard de connaissances rationnelles, alors nous admettons ces connaissances comme simple préjugé. Car c'est de façon anonyme que valent les vérités rationnelles ; il ne s'agit pas alors de demander : qui a dit cela ? mais bien qu'a-t-il dit ? Peu importe si une connaissance a une noble origine ; le penchant à suivre l'autorité des grands hommes n'en est pas moins très répandu tant à cause de la faiblesse des lumières personnelles que par désir d'imiter ce qui nous est présenté comme grand. Kant (*) donner son assentiment : approuver et tenir pour vrai.
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« tellement évident qu'on n'envisage pas de pouvoir penser autrement.

Quand nous nous en remettons à l'avis d'unepersonne que nous estimons plus compétente que nous dans tel ou tel domaine, quand par exemple un élève faitconfiance à son professeur, s'agit-il d'une attitude de soumission intellectuelle ? Est-ce forcément par crédulité qu'ilreprend à son compte le savoir qu'on lui transmet ? Évidemment non.

Notre raison doit savoir reconnaître ses limiteset admettre qu'en certains domaines, il convient de s'en remettre à l'instruction de certaines personnes.

Cetteattitude ne consiste donc pas à intérioriser des préjugés.

Elle n'est pas l'expression d'une abdication de la raison.C'est au contraire la raison elle-même qui d'une part reconnaît ses propres insuffisances et qui d'autre part examineles indices permettant de conclure à la compétence de la personne que l'on écoute.

On ne se fie pas de manièrenécessairement aveugle ou définitive aux conseils d'autrui.

En nous en remettant ainsi, de manière raisonnable, àl'autorité d'autrui, « nous ne nous rendons ainsi coupables d'aucun préjugé ».b.

En revanche, en ce qui concerne l'exercice de ma raison (analyse, raisonnement, argumentation,démonstration...), ce que Kant appelle dans le texte les « connaissances rationnelles », rien n'autorise jamais à m'enremettre à autrui.

Même s'il est plus intelligent, plus savant, même si son autorité est reconnue de tous, rien ne doitnous faire renoncer à l'usage de notre propre jugement sur toutes les questions qui réclament une élucidationrationnelle.

Dans le domaine du raisonnement, la croyance n'est jamais légitime.

Il arrive pourtant souvent que notreintelligence soit dépassée par des constructions rationnelles qui ne sont pas à sa portée.

En mathématiques parexemple, la définition de certaines notions peut échapper, certaines démonstrations ne pas être comprises.

Neconviendrait-il pas alors d'admettre comme vraies ces propositions sur lesquelles nous butons mais que des espritsplus puissants que les nôtres sont parvenus à dominer ? Kant soutient dans notre texte que la raison ne doit jamaisabdiquer en son domaine.

Autrement dit, vis-à-visd'une connaissance rationnelle qu'on ne comprend pas, il faut non pas la croire vraie mais l'admettre comme unesimple hypothèse, comme une vérité susceptible d'être établie un jour comme telle par ma propre raison.

On retombedans le préjugé dès que l'on fait d'une vérité rationnelle un objet de croyance.

Car alors, cette vérité ne suscite plusl'effort de sa vérification : elle est admise « comme simple préjugé ».

C'est ce qui est arrivé à l'un des postulatsd'Euclide (IIIe siècle av.

J.-C.) qui a été admis comme vrai, donc cru, pendant des siècles.

Il a fallu attendre le xixesiècle pour que des mathématiciens s'attachent à prouver qu'étant donné une droite et un point qui lui estextérieur, il ne passe par ce point qu'une seule parallèle à la droite.

C'est alors seulement que ce postulat a cesséd'être un préjugé mathématique. Question 3 Avons-nous raison de nous en remettre à l'autorité d'autrui ? À quelles conditions est-ce compatible avec un espritcritique qui s'efforce de penser par lui-même ? La réponse de l'auteur est claire : la confiance en l'autorité d'unautre n'est légitime que dans les domaines où le seul exercice de la raison ne suffit pas, c'est-à-dire dans lesdisciplines qui réclament de l'expérience ou de l'instruction.

Ce sont donc les limites de l'exercice de notre raison quirendent possible le recours à la compétence d'autrui, non pas l'insuffisance de cet exercice.Dans cette mesure, la confiance en l'autre peut donc être qualifiée de raisonnable.

Toutefois l'acte de confiancereprésente bien en lui-même une démission de la raison.

En effet, il consiste en un acte de croyance : ce qu'autruime dit, j'estime que c'est vrai parce que c'est lui qui me le dit.

Même si ma raison m'y autorise en reconnaissant sapropre incapacité à me guider sur cette question, même si je m'efforce de ne pas me fier à n'importe qui enm'enquérant d'indices rassurants, le rapport de confiance qui s'instaure envers autrui comporte toujours quelquechose d'aveugle.

N'ayant pas, par définition, la compétence de celui à qui je m'en remets, je ne suis pas non pluscapable de discerner avec assurance les signes extérieurs de cette compétence.

Même raisonnable et raisonnée, laconfiance comporte donc toujours un noyau irrationnel : non pas arbitraire mais dicté par l'intuition, par lesentiment.Que nous puissions ainsi croire l'autre, même raisonnablement, est un fait riche d'enseignement.

En effet, dans lesdomaines où nous n'avons pas les moyens de prononcer un jugement avisé, nous pourrions nous en remettre à l'avisd'autrui sans jamais lui faire vraiment confiance, en demeurant sceptique.

Or, le plus souvent, nous croyonsvraiment ceux à qui nous décidons raisonnablement de nous fier.

Nous faisons confiance à notre médecin, à nosprofesseurs, aux spécialistes en général.

Il faut donc admettre l'existence en nous d'une pente naturelle à croire.C'est cette tendance qui nous fait parfois projeter confusément sur la personne en laquelle nous avons confianceune foule de qualités qui lui confèrent du prestige, de la grandeur et qui la rendent admirable.

Certes la confiance enl'autre ne va pas forcément jusqu'à l'admiration, sentiment qui s'adresse à quelqu'un que l'on juge extraordinaire.L'autorité n'est pas nécessairement liée à l'admiration.

Elle émane spontanément d'une personne à qui l'on reconnaîtune compétence supérieure.

Cette distinction suffit à établir entre moi et cette personne une relation hiérarchique,une supériorité que j'admets volontiers, au moins dans le domaine de sa compétence.

Là, ses paroles auront plus depoids que celles d'un autre, je suivrai ses conseils.

L'autorité a pour effet de persuader immédiatement, sans recourirà des manipulations, à la force ou à des procédés autoritaires.

L'autoritarisme est au contraire, signalons-le enpassant, un aveu d'impuissance, le symptôme d'une absence d'autorité.Si donc faire confiance ou reconnaître l'autorité de quelqu'un revient toujours à céder à une crédulité naturelle quela raison a normalement surmonté en fixant à l'homme un idéal d'autonomie, il faut en conclure que cette confiancerenoue avec une attitude spontanée et irréfléchie qui n'est pas très éloignée de l'aveuglement du préjugé. Lorsque les matières qui se fondent sur l'expérience et le témoignage, nous bâtissons notre connaissancesur l'autorité d'autrui, nous ne nous rendons ainsi coupable d'aucun préjugés; car dans ca genre de chosespuisque nous ne pouvons faire nous-mêmes l'expérience de tout ni la comprendre par notre propreintelligence, il faut bien que l'autorité de la personne soit le fondement de nos jugements.

Mais lorsque. »

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