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La liberté peut-elle s'affirmer sans violence ?

Publié le 29/10/2009

Extrait du document

• Devant l'intitulé du sujet se présentent immédiatement à vous un certain nombre de connaissances (apprises en cours), d'une part sur la liberté, d'autre part sur la violence. Jetez-les immédiatement et succinctement sur le papier. Efforcez-vous essentiellement de construire des définitions précises des deux notions en jeu, liberté et violence. Bien entendu, il ne s'agit nullement de juxtaposer deux dissertations sur chacun de ces thèmes pour les relier ensuite, mais bien de dessiner une problématique précise. Il faut donc opérer la synthèse des deux concepts de liberté et de violence. Pour assurer cette liaison, réfléchissez sur le sens de s'affirmer. S'affirmer, c'est se manifester de façon indiscutable, extérioriser son être et sa nature. Dès lors, la conception de la liberté qui semble à première vue utilisable dans le contexte est certainement celle de Hegel : la liberté, chez Hegel, ne se manifeste vraiment (à un certain niveau tout au moins) que par la violence. La liberté, c'est la négativité, elle ne peut s'affirmer et se construire sans violence. Il semble qu'ainsi vous soyez en mesure de faire démarrer votre dissertation en centrant vos analyses sur une « liberté-négativité «.

• Le plan le plus adapté au sujet est le plan de type dialectique, par thèse, antithèse et synthèse, permettant d'unifier des visions tout à fait opposées sur ce problème. Mais vous pouvez le compléter par des éléments d'analyse progressive, la synthèse étant d'autant plus cohérente qu'elle débouche sur une violence positive, au sens plein et réel du terme. Dès lors, les deux concepts de liberté et de violence se modifient progressivement dans la dissertation. Remarquons que notre plan prend la forme (non-oui-synthèse) et non la forme (oui-non-synthèse). • Il est paradoxal que la liberté, état de celui qui choisit lui-même, puisse s'affirmer en niant cet état lui-même dans la personne d'autrui : le sujet pose donc un problème que vous devrez résoudre dans ce devoir.   

« la présence d'autrui constitue un obstacle au pour-soi.

D'où la lutte.

D'où la violence.

D'où la contrainte opérée surl'autre.

Comme on l'a remarqué, le mot d'ordre à l'égard d'autrui pourrait ici être la parole de Diogène à Alexandre : «Ôte-toi de mon soleil ! » Ainsi s'engage, dans la violence, la lutte des libertés.

L'exercice et l'affirmation de la libertésont inséparables de la lutte, du conflit et de la violence car autrui me met en danger.Autrui, ou le péril extrême.

Dans ces conditions, la liberté, c'est le négatif, c'est-à-dire la violence.Ainsi, au niveau individuel, il semble bien que la « liberté-négativité » ne puisse s'affirmer sans violence et contrainteopérée sur autrui.

L'homme, comme l'ont montré Hegel et Sartre, ne se reconnaît comme pure conscience de soilibre que s'il nie l'autre et est reconnu par lui.

Mais ces analyses sont également valables au niveau historique.

Leshommes, pour se faire libres dans l'histoire, pour y conquérir leur liberté, ne sauraient échapper au règne de laviolence et affirmer sans elle leur autonomie.

La liberté s'arrache à l'aliénation par la révolte.

Ainsi, la foule, en 1789,s'empare de la Bastille.

Ce faisant, la liberté du groupe échappe à la passivité aliénante par la révolte, la lutte, laviolence, c'est-à-dire une action de contrainte opérée sur l'autre, en l'occurrence le pouvoir royal.

Sartre adéveloppé abondamment ces thèmes dans la Critique de la raison dialectique.

L'action commune, pour échapper àl'asservissement, aux aliénations, au destin, pour récupérer la liberté compromise, comporte inexorablement uneviolence : il s'agit d'une violence active où les êtres découvrent l'impossibilité où ils sont de vivre une vie impossible.Par la violence, les révolutionnaires échappent au destin historique et récupèrent la liberté compromise.

En prenantla Bastille, le peuple se libère du destin. B) Critique et antithèse.

Liberté et raison (une liberté sans violence). Néanmoins, cette assomption et cette actualisation de la liberté dans la violence posent problème, que ce soit surle plan individuel ou historique.

Cette liberté contre autrui, cette liberté-négativité qui débouche sur le conflit avecl'Autre, tombent sous le coup d'un certain nombre d'objections et de critiques.

Notons, tout d'abord, que cetteliberté-négativité est une « liberté contre ».

Se faisant et se construisant dans la violence, elle réalise un nettoyagepar le vide.

Elle comporte parfois un aspect nihiliste, que l'on ne saurait sous-estimer.

Souvenons-nous de Mathieudans Les chemins de la liberté, faisant feu sur l'ennemi, dans une jouissance de destruction.

Cet aspect nihiliste,que Sartre avait parfaitement mis en évidence, peut, sans doute, nous conduire à nous demander s'il n'est pas uneautre liberté, s'affirmant sans violence, excluant la contrainte et préférant le dialogue à la pure puissancedéchaînée.Nos libres projets peuvent s'actualiser à travers la non-violence et le dialogue.

Ce passage de la Violence à la Raisonpermet alors de construire une liberté plus authentique et plus vraie que la liberté envisagée précédemment.

Quandles hommes discutent, quand ils n'obligent plus l'autre à penser comme soi-même, quand ils s'efforcent deconvaincre et désirent une adhésion libre, alors se fait jour une autre forme de liberté.

Cette liberté nouvellecomporte un aspect plus rationnel et une forme qui s'apparente à l'universel.

Liberté qui s'ouvre à la raison, aulogos, à l'Idée universelle.

Quand Socrate dialogue avec ses juges eux-mêmes, alors il affirme une authentique formede liberté apparentée à l'universel.

Cette liberté-ci est la liberté rationnelle du philosophe.

« La philosophie dans sonensemble refuse de valider le droit du plus fort; elle pourrait se définir comme le passage de la violence à la raison.

»Ici la liberté, loin de s'affirmer dans la violence, de se construire dans la puissance déchaînée et corrompue, semanifeste dans la raison.

Dès lors, la liberté cesse d'être cette capacité négatrice de l'homme à l'égard du donné, àl'égard d'autrui, à l'égard du monde.

Une autre liberté se dessine et se construit, une liberté de raison, de maîtrisede soi, de dialogue et de réflexion.

Songeons ici à la liberté éthique du sage kantien, obéissant à la loi moraleuniverselle, La liberté cesse d'être ontologiquement négativité pour devenir raison, logos, universalité.

La violenceest une puissance déchaînée que la raison ne domine pas.

Dès lors, la liberté ne doit-elle pas répudier totalement laviolence?Ainsi, à la liberté-négativité se substitue maintenant une liberté conçue comme autonomie vraie, rejetanttotalement pour se manifester l'usage de la violence et de la contrainte.

Cette « liberté pratique », au sens kantiendu terme, ne peut faire usage de quelque pouvoir corrompu, à base de colère et d'impatience.

En effet, son motd'ordre n'est plus : « Ôte-toi de mon soleil! », mais bien : « Agis de telle sorte que tu traites autrui toujoursessentiellement comme une fin, et jamais comme un moyen.

» Dès lors, une liberté-autonomie, obéissance à la loiuniverselle, semble repousser totalement l'impure violence, la contrainte formée de colère et d'amour de soi. C) Synthèse.

Bonne et mauvaise violence. Néanmoins, nous ne saurions en rester au stade du déchirement et opposer ainsi, d'une part, cette « liberté-négativité » qui se trouve et se conquiert dans l'impure contrainte physique ou morale tendant à faire à autrui cequi est contraire à sa volonté et, d'autre part, une « liberté-autonomie » excluant toute violence.D'une part, la liberté, comme l'a montré Hegel, est essentiellement un processus et un mouvement.

Dès lors, laliberté se confond avec le dynamisme spirituel, avec le chemin que suit l'Esprit, elle ne peut être étudiée et compriseindépendamment du chemin de l'Esprit parcourant la série de ses formations.

Aussi la conception de la « liberté-négativité » ne peut-elle être complètement rejetée.

C'est sans doute à travers l'itinéraire où l'Esprit se retrouve lui-même que se construit progressivement une liberté pratique faite de rationalité.

Il est donc permis de réunifiernégativité et liberté universelle.

Cette réunification a l'avantage de nous présenter et de nous donner à voir non pasune liberté rationnelle et universelle gommant toute particularité, mais une liberté rationnelle incluant les différences.La vraie liberté de raison se construit et se pétrit.

Elle est processus.D'autre part, cette liberté rationnelle conçue comme processus spirituel peut prendre comme matériau et médiationla violence - non point n'importe laquelle.

Ici il convient de distinguer une bonne et une mauvaise violence.

Laviolence avait jusqu'ici été examinée d'un seul bloc et d'une manière unilatérale.

Or sans doute faut-il ne pointconfondre la contrainte de l'égoïsme, la puissance déchaînée de l'individu privilégiant ses purs intérêts individuels etla violence incluant elle aussi l'universel et la valeur.

Ces notions restaient mêlées et confondues durant la première. »

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