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La lumière de l'évidence est suffisante de A. ARNAULD et P. NICOLE

Publié le 08/01/2020

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Comme il ne faut point d’autres marques pour distinguer la lumière des ténèbres, que la lumière même qui se fait assez sentir, ainsi, il n’en faut point d’autres pour reconnaître la vérité que la clarté même qui l’environne, et qui se soumet l’esprit et le persuade malgré qu’il en ait : de sorte que toutes les raisons de ces philosophes1 ne sont pas plus capables d’empêcher l’âme de se rendre à la vérité, lorsqu’elle en est fortement pénétrée, qu’elles sont capables d’empêcher les yeux de voir, lorsqu’étant ouverts ils sont frappés par la lumière du soleil.

Mais parce que l’esprit se laisse quelquefois abuser par de fausses lueurs, lorsqu’il n’y apporte pas l’attention nécessaire, et qu’il y a bien des choses que l’on ne connaît que par un long et difficile examen, il est certain qu’il serait utile d’avoir des règles pour s’y conduire, de telle sorte que la recherche de la vérité en fût plus facile et plus sûre. Car puisque les hommes se trompent quelquefois dans leurs jugements, et que quelquefois aussi ils ne s’y trompent pas, qu’ils raisonnent tantôt bien et tantôt mal, et qu’après avoir mal raisonné ils sont capables de reconnaître leur faute, ils peuvent remarquer, en faisant des réflexions sur leurs pensées, quelle méthode ils ont suivie lorsqu’ils ont bien raisonné, et quelle a été la cause de leur erreur lorsqu’ils se sont trompés, et se former ainsi des règles sur ces réflexions pour éviter à l’avenir d’être surpris.

Antoine Arnauld (1612-1694) et Pierre Nicole (1625-1695), La logique ou l’art de penser (1662), Flammarion, 1970, p. 40.

La philosophie de Descartes inaugure, au XVII3 siècle, toute une tradition qui, prenant appui sur « l'ordre des géomètres », fera de l'évidence intellectuelle la norme parfaite du vrai. La vérité esta elle-même sa propre marque. On trouve ainsi cette référence à l'évidence chez Spinoza, chez Malebranche, chez Pascal ou, comme dans le texte qui suit, dans la Logique de Port-Royal, écrite à la fin du XVIIe siècle.

« Comme il ne faut point d'autres marques pour distinguer la lumière des ténèbres, que la lumière même qui se fait assez sentir, ainsi, il n'en faut point d'autres pour reconnaître la vérité que la clarté même qui l'environne, et qui se soumet l'esprit et le persuade malgré qu'il en ait: de sorte que toutes les rai­ sons de ces philosophes 1 ne sont pas plus capables d'empê­ cher l'âme de se rendre à la vérité, lorsqu'elle en est forte­ ment pénétrée, qu'elles sont capables d'empêcher les yeux de voir, lorsqu'étant ouverts ils sont frappés par la lumière du soleil.

Mais parce que l'esprit se laisse quelquefois abuser par de fausses lueurs, lorsqu'il n'y apporte pas l'attention nécessaire, et qu'il y a bien des choses que l'on ne connaît que par un long et difficile examen, il est certain qu'il serait utile d'avoir des règles pour s'y conduire, de telle sorte que la recherche de la vérité en fût plus facile et plus sûre.

Car puisque les hommes ~e trompent quelquefois dans leurs jugements, et que quelque­ fois aussi ils ne s'y trompent pas, qu'ils raisonnent tantôt bien et tantôt mal, et qu'après avoir mal raisonné ils sont capables de reconnaître leur faute, ils peuvent remarquer, en faisant des réflexions sur leurs pensées, quelle méthode ils ont suivie lorsqu'ils ont bien raisonné, et quelle a été la cause de leur erreur lorsqu'ils se sont trompés, et se former ainsi des règles sur ces réflexions pour éviter à l'avenir d'être surpris.

Antoine ARNAULD (1612-1694) et Pierre NICOLE (1625-1695), · La logique ou l'art de penser (1662), Flammarion, 1970, p.

40.

POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE Il n'y a pas besoin, pour savoir que nous avons une idée vraie, de recourir à un indice extérieur à cette idée.

Son évi­ dence {sa «clarté») est absolument suffisante pour recon­ naître sa vérité, et distinguer ainsi le vrai du faux - de même que la lumière suffit pour voir et se distinguer elle-même des ténèbres.

1.

Il s'agit ici des sceptiques.. »

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