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La poésie est-elle un moyen efficace d'entrer en résistance ?

Publié le 20/06/2009

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Le roman est un genre littéraire aux contours mouvants, caractérisé pour l'essentiel par une narration fictionnelle plus ou moins longue, ce qui le distingue de la nouvelle (celle-ci étant traditionnellement un genre littéraire de faible durée). Le roman peut également être défini comme un ouvrage en prose, laissant une forte place à l’imaginaire. Milan Kundera le caractérise comme « forme exploratoire de la vie « en tant qu’il se rapporte aux incarnations diverses de la vie humaine au cours de l’histoire, dont il essaye de traduire, au moins formellement, la singularité.

 

Lorsque nous utilisons le terme de sens, nous employons un terme qui réunit deux concepts. En effet, par sens on entend d’abord la signification d’un mot ou d’une chose, c'est-à-dire la définition que l’on peut en donner. Mais le sens, c’est également la direction, à savoir la finalité d’une chose, ce vers quoi elle tend.

 

La vie désigne à la fois une durée et un contenu. Elle est d’une part la durée qui s’écoule de la naissance à la mort, un espace temps singulier et propre à chaque individu. Mais elle est d’autre part la somme des expériences accumulée par l’individu durant cet espace temps que l’on nomme la « vie «, son parcours entre le pôle de la naissance et celui de la mort. Lorsque Plutarque écrit la Vie des hommes illustres, c’est en ce sens qu’il prend le terme de vie : comme l’usage et la réalisation de leur temps sur terre.

 

La question « Le roman nous aide-t- il à découvrir un sens à nos vies ? « ne saurait que nous surprendre, pourvu que nous la posions dans le cadre de l’esthétique classique. En effet, nous pouvons nous rappeler de la mauvaise réputation de ce genre littéraire, qui a duré au moins jusqu’au début du XIXe siècle, et des critiques du philosophe (et néanmoins romancier lui-même) Rousseau qui déclare dans la préface de la Nouvelle Héloïse : « Jamais fille chaste n’a lu un roman «. De ceci nous pouvons tirer que le roman non seulement ne saurait nous aider à découvrir un sens à nos vies (sens entendu comme direction et comme signification) mais qu’il est au contraire profondément inutile car il décrit des vies passées, le plus souvent sans rapport avec les nôtres, et plus grave encore, nous donne de la vie une image trompeuse en faisant de celle des personnages fictifs de véritables destinées. Cependant nous verrons que le roman a bel et bien un rôle dans la découverte du sens de nos vies, puisqu’il nous aide à leur attribuer une direction en exerçant nos facultés herméneutiques ; et, allant plus loin, le roman est également  utile pour la découverte de la signification de nos vies, puisque pour reprendre le mot de Proust dans Le temps retrouvé : « Tout lecteur quand il lit est lecteur de lui-même «.

 

La question au centre de notre réflexion sera donc de montrer dans quelle mesure le roman est un moyen adéquat pour déterminer l’orientation et la signification de nos vies.

« b.

Le roman nous donne une conception trompeuse, car téléologique de nos vies Mais si nous comprenons le terme « sens » non comme signification mais comme « direction », nous dirons que leroman est loin de nous aider à découvrir le sens de nos vies.

En effet, le roman est cet univers où toutes les actionsdes personnages sont orientées vers une fin, où chaque acte est signifiant.

La vie d'un personnage de roman estdistincte de celle d'un être réel, c'est un destin.

Voici ce qu'écrit Camus à ce propos : « Qu'est-ce que le roman, en effet, sinon cet univers où l'action trouve sa forme, où les mots de la vie sontprononcés, les êtres livrés aux êtres, où toute vie prend le visage du destin.

Le monde romanesque n'est que lacorrection de ce monde-ci, suivant le désir profond de l'homme.

Car il s'agit bien du même monde.

La souffranceest la même, le mensonge et l'amour.

Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces.

Leur univers n'est niplus beau ni plus édifiant que le notre.

Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin et il n'est mêmejamais de si bouleversants héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leur passion, Kirilov et Stavroguine, MmeGraslin, Julien Sorel ou le prince de Clèves.

C'est ici que nous perdons leur mesure, car ils finissent alors ce quenous n'achevons pas ».

« Roman et révolte », L'homme révolté , p.

664-666. Or, loin d'être à l'image de la vie des héros de roman, nos vies, nos vies d'hommes, ne sont nullement des destinées.Nos actes ont des conséquences que nous ne pouvons soupçonner ; nulle intelligence ne guide notre bras, nosprises de décision, ni ne place sur notre route des évènements qui nous sont favorables et préparent notre avenir.Une vie humaine, c'est une lutte avec le hasard, et non une destinée qui s'accomplit.

Or, en nous donnant une idéede la vie humaine qui fait d'elle une destinée, les romans sont loin de nous aider à découvrir un sens à nos vies : ilssont au contraire des obstacles à une compréhension du hasard qui décide d'elles.

II.

Le roman nous aide à découvrir une direction à notre vie a.

Les capacités herméneutiques du lecteur exercées sur le roman Néanmoins, nous ne serions en demeurer à une semblable thèse.

En effet, nous dirons que l'œuvre littéraire a un rôleexploratoire et prospectif qui nous exerce à découvrir une direction dans nos vies.

En effet, Kundera rappelle quedans une conférence, Heidegger déplorait que la philosophie ne se soit pas suffisamment consacrée à l'explorationde la vie humaine.

Kundera rétorque que la Littérature, et tout particulièrement le roman, se sont chargés de cettetache depuis Cervantès et son Don Quichotte .

En effet, pour Kundera le roman est la forme littéraire qui se tourne vers l'existence humaine et cherche à en découvrir le sens et la valeur.

Chaque époque étant distincte de laprécédente, chacune appelle un effort nouveau, une nouvelle tentative pour découvrir la singularité et lasignification propre qui lui appartient.

Nous dirons donc qu'une œuvre littéraire ne nous donne pas de leçons, maisqu'elle met en scène une démarche exploratoire et interrogative de l'existence humaine.

C'est parce que l'œuvrelittéraire ne délivre pas un message univoque, mais se réfracte en une pluralité de significations, qu'elle exercel'esprit de l'homme, qu'elle entraine ses capacités herméneutiques qu'il peut ensuite utiliser pour découvrir un sens àsa propre vie.

b.

Le roman comme un supplément à l'expérience individuelle Il semble donc que nous pouvons à bon droit affirmer que les romans nous aident à découvrir une direction à nosvies, car ils sont le moyen de la transmission d'un savoir être, d'un savoir vivre en société, par la transmission depréceptes moraux.

Une telle thèse pourra être confirmée si nous considérons l'œuvre de l'abbé Prévost.

En effet,dans sa préface à Manon Lescaut , l'abbé Prévost définit ainsi l'utilité que son œuvre peut avoir pour un lecteur : « Chaque fait qu'on y rapporte est un degré de lumière, une instruction qui supplée à l'expérience ; chaqueaventure est un modèle d'après lequel on peut se former : il n'y manque que d'être ajusté aux circonstances oùl'on se trouve ».. »

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