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La question "qu'est-ce que l'homme ?" peut-elle recevoir une réponse scientifique ?

Publié le 17/01/2022

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Les sciences humaines furent donc conduites à considérer les faits humains comme:- des choses mesurables et quantifiables (cf. Durkheim). On assiste, par exemple, à l'apparition d'une sociologie (qu'A. Comte appelait une « physique sociale «) basée sur la statistique sociale, ou d'une psychologie fondée sur une psychométrie mesurant les phénomènes en intensité, en fréquence ou en durée ;- des phénomènes obéissant aux lois d'un déterminisme mécanique.Un double écueilLes sciences humaines d'inspiration positiviste prétendent donc ramener la réalité humaine à des normes expérimentales et objectives dont elles proclament l'universalité. Ce faisant:- Elles réduisent l'homme à un pur objet, une chose parmi les choses, ce qu'il n'est pas puisque sa réalité dernière est d'être sujet. L'homme en effet n'est pas simplement un objet de la connaissance, quelque chose qui peut être connu; il est le sujet de cette connaissance, celui qui connaît. Or, en ne considérant de l'homme que ce qui est objectivable, ces sciences n'atteignent jamais le sujet humain en tant que conscience.- Elles morcellent l'homme réduit à une chose en une multitude de fragments, d'aspects, dont chacun fait l'objet d'une science particulière. Mais elles se révèlent incapables de reconstituer ce qu'elles ont brisé en en rendant compte au sein d'une science unitaire de l'homme.

■ Un constat : « Une chose est certaine : c'est que l'homme n'est pas le plus vieux problème ni le plus constant qui se soit posé au savoir humain. « (M. Foucault, Les Mots et les choses, p. 398). Pendant longtemps en effet, dans l'ordre du savoir, l'homme n'a pas constitué un domaine spécifique, et il a fallu une profonde réorganisation du champ de la connaissance pour qu'il fît l'objet d'une science, ou plutôt d'une multitude de sciences, celles que l'on appelle « humaines «. ■ Le problème : Mais la question se pose de savoir si, en adoptant les méthodes des sciences de la nature, les sciences humaines nous permettent vraiment de connaître l'homme dans toute sa spécificité, c'est-à-dire de savoir si en prenant l'homme pour objet la science peut ne pas nier sa valeur de sujet, et apporter ainsi une réponse suffisante à la question « Qu'est-ce que l'homme ? «

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« L'homme, conscience productrice de sens Retrouver le sujet Nous avons vu que les sciences humaines positivistes, dans leur souci d'objectivité rigoureuse, considéraient l'hommecomme un pur objet et non comme un sujet, le dépouillant du même coup de ce qui lui est propre (la conscience avec sesintentions et ses significations), et qu'elles devenaient ainsi les sciences de l'homme sans l'homme.

C'est le désir deretrouver l'homme et de le comprendre comme sujet, c'est-à-dire dans sa spécificité profonde et essentielle, qui a orientécertains courants des sciences humaines vers une approche plus phénoménologique en n'abordant plus l'homme commeune simple chose, mais en tenant compte du fait qu'il vit dans et par un monde de significations (cf.

dans des directionsdiverses, la psychologie de la forme, la psychanalyse, l'anthropologie culturelle, etc.).La vérité de l'homme ne saurait désormais être ramenée à la vérité d'une chose ou à celle d'un organisme dénué depensée comme tendaient à le faire les sciences humaines positivistes du XIXe siècle. Expliquer, mais aussi comprendre Dans ces conditions, les sciences humaines ne peuvent plus se borner à imiter les sciences de la nature, dans la mesuremême où ces dernières ne cherchent qu'à expliquer, non à comprendre les phénomènes, pour reprendre la distinctionétablie par Dilthey.

En effet, comme l'a souligné ce dernier, il existe une grande différence entre « expliquer » et «comprendre » : l'explication, qui est le propre des sciences physiques, ne vise qu'à déterminer les conditions d'unphénomène, en dégageant des lois qui ignorent le particulier en tant que tel ; la compréhension, en revanche, qui devraitcaractériser les sciences humaines, est le souci de se placer au point de vue du sujet, de la conscience, pour revivre del'intérieur les phénomènes étudiés : par la compréhension « l'esprit connaissant réussit à s'identifier aux significationsintentionnelles, essentielles à l'activité historique, concrète d'un homme » (Le Senne, cité dans Lalande, Vocabulaire de laphilosophie, s.v.

Comprendre).

Par exemple, on peut expliquer l'amour par des raisons physiologiques, psychologiques,sociologiques, etc.

; mais le savant qui étudie ce phénomène ne comprendra jamais véritablement ce qu'est l'amour tantqu'il ne l'aura pas lui-même en quelque manière éprouvé. DILTHEY: «...Nous expliquons la nature, nous comprenons la vie psychique.» La démarche propre aux sciences humaines repose sur la compréhension, non sur l'explication. «Dans les sciences de l'esprit [...] l'ensemble de la vie psychique constitue partout une donnée primitive et fondamentale.Nous expliquons la nature, nous comprenons la vie psychique.» Dilthey, Idées concernant une psychologie descriptive etanalytique (1894). • Dilthey, avec la distinction entre «expliquer» et «comprendre», essaie de penser une distinction entre: les sciences de lanature (qui tâchent d'écarter le flou interprétatif), et les sciences de l'esprit (qui admettent leur caractère interprétatifpropre, sans perdre pour autant leur statut de science).

Contrairement aux ambitions du xviie siècle, les sciences del'esprit (qu'on appellera plus tard les «sciences humaines») doivent s'affranchir du modèle géométrique pour constituerleur scientificité propre. L'homme comme limite Mais il apparaît aussitôt que pour les sciences humaines l'homme en tant que sujet est une limite au sens mathématique :le sujet est une sorte de grandeur que les sciences peuvent approcher de plus en plus près sans pourtant pouvoir jamaisl'atteindre : car comment le savant pourrait-il se mettre complètement à la place de celui ou de ceux qu'il étudie ? L'homme ou des hommes ? De plus, tout en affirmant qu'il ne peut y avoir d'action mécanique de l'environnement sur l'homme, puisque les facteursmatériels ne modifient ce dernier que dans la mesure où il leur donne une signification en les intégrant dans son universmental, les sciences humaines d'orientation phénoménologique reconnaissent elles aussi qu'il n'est pas possibled'abstraire un « fait de conscience » vécu par un individu de la situation d'ensemble de cet individu, ni cette situationd'ensemble de son contexte social et historique.Les sciences humaines s'accordent donc pour remettre en question l'unicité de l'homme et dissiper l'illusion d'une essencehumaine éternelle.

Elles entraînent l'éclatement de l'image traditionnelle de l'homme qui semble se démultiplier dansl'espace et le temps. Conclusion. S'il est peut-être excessif de dire que la question « Qu'est-ce que l'homme ? » ne peut recevoir une réponse scientifique,on doit du moins constater qu'elle n'a pas encore reçu une telle réponse, et cela essentiellement parce que les sciencesqui prennent pour objet cet être singulier qu'est l'homme devraient mais ne peuvent adopter les méthodes des sciencesde la nature.

C'est pourquoi les diverses « sciences humaines » sont encore loin de s'être chacune constituées en science,et surtout de former un ensemble harmonieux et cohérent.

Elles sont traversées par des courants contradictoires quivisent tantôt à expliquer l'homme, le réduisant du même coup à un objet, tantôt à le comprendre en rappelant qu'il estavant tout un sujet, tantôt même à le dissoudre dans une structure sans contenu.

Ainsi ne parviennent-elles pas à fonderune unique science de l'homme, capable de le saisir en sa réalité dernière : elles se bornent à nous fournir une poussièrede connaissances, précieuses certes, mais éparses et dispersées, qui ne nous donnent de lui qu'une image brouillée et nerépondent pas de façon suffisante et satisfaisante à la question lancinante « Qu'est-ce que l'homme ? ».. »

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