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La raison est-elle la reine des facultés ?

Publié le 27/02/2008

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Qu'est-ce que proprement une faculté? Nous pourrions dire qu'il s'agit avant tout d'une capacité formelle et innée qui nécessite un donné particulier pour s'accomplir et se développer. La mémoire, pour prendre cet exemple, n'est pas ce qu'on pourrait appeler « absente » de l'esprit juste né: cependant, elle n'est là, pourrions-nous dire, que dans un état proche du possible. Elle existe potentiellement, bien que l'acquis soit nécessaire à son développement. En ce sens, la notion de faculté est à la croisée des chemins, entre une puissance innée et proprement humaine, et une actualisation acquise qui revient à la charge de l'environnement. Le nouveau-né peut parler, peut se souvenir (...); mais sans processus d'apprentissage préalable, sans un donné de l'expérience, il n'y parviendra jamais. Que cette dernière soit potentiellement présent au début de l'existence est une chose: mais qu'entendons-nous par capacité formelle? Ce pouvoir que représente la faculté n'a pas son propre fond. Il n'y a rien dans la mémoire de manière a priori, si ce n'est ce qu'on y mettra a posteriori. Une faculté est avant tout une forme de traitement du donné. Elle ne possède rien en propre et se contente d'organiser les flux sensoriel, de les classer, et, pour certaines même, de les stocker. La raison serait donc l'une de ces facultés, capable de traiter l'information en provenance de l'extérieur. Cependant, pourquoi profiterait-elle d'un statut particulier? Pourquoi ne serait-elle pas à ranger avec les autres sur le même pied? Ce signale-t-elle parmi les autres par une particularité précise? L'idée de royauté, renvoie par contraposition à l'idée de sujet. En effet, un roi, une reine, ont des sujets. Un sujet, du latin subjectum, c'est ce qui se tient proprement « en-dessous de »: mieux, il y a dans l'idée de royauté une incommensurabilité intrinsèque. Entre le plus haut des sujets, et le roi, il reste toujours un écart infranchissable le plaçant dans l'espace de l'inatteignable. La raison, par comparaison, jouirait donc d'une place unique au sommet d'une chaîne verticale de facultés, introduisant ainsi une rupture radicale entre elle et les autres. Elle aurait en charge de commander, de gouverner cet ensemble avec lequel elle ne se mélange précisément pas. Elle en commanderait le fonctionnement, les autres se soumettant à cette souveraineté impeccable. Peut-on pousser plus en avant l'analogie politique? La souveraineté dont jouit la royauté est un espace impossible à partager, un espace qui représente proprement l'ensemble des voix sinon discordantes des gouvernés, leur donnant ainsi une unité. En effet, il existe une dualité propre au corps du roi: par-delà le corps physique perdure un corps éternel symbolisant l'unité profonde du peuple. La raison exerce-t-elle son pouvoir sur les autres facultés tout en leur conférant une unité? Peut-on proprement dire que sans la raison, l'exercice des facultés se ferait de manière chaotique, qu'il n'adviendrait aucune synthèse permettant au sujet de la connaissance d'avoir une expérience unifiée de la réalité?

« similaires, en saisie les points communs, l'essence propre, cette raison embrasse le temps, c'est ce qu'il est advenuepour prévoir ce qu'il adviendra.

Ce que les autres facultés ne font que récolter, ordonner, la raison s'en saisie enétendant son pouvoir supérieur via un traitement à partir d'autres traitements préalables par d'autres facultés. Hegel: un pouvoir qui s'exerce malgré nous 2. Nous avons évoqué plus haut une analogie entre raison et souveraineté.

La souveraineté se dessine comme unchamp unique qui confère une unité des voix sinon discordantes et conflictuelles.

La souveraineté est doncl'émanation d'une unité jugulant ainsi les violences privées.

C'est précisément la place que lui accorde Hegel lorsqu'ilparle de ruse de la raison .

A travers les multiples conflits qui peuplent le monde, émane une unité qui s'installe progressivement et malgré même les protagonistes de ces-dits conflits.

La raison apparaît en ce sens dans unetrajectoire historique: elle est à chaque fois le dernier mot d'une guerre incessante.

Pour comprendre cela, partonsd'une phrase d'Hegel: « Rien de grand ne s'est accompli, dans le monde, sans passion ».

Comment comprendre cette sentence si souvent détournée de son véritable sens? Parce qu'au départ de la confrontation, les opinionssont plurielles, elles rentrent bientôt les unes et les autres en contradictions, elles s'affrontent.

Comprenons bienque ce qui s'affronte alors ce sont des visions d'une seule et même chose.

Or, pour Hegel, c'est de ce choc desparticuliers, de ces opinions relatives en l'occurrence, que va naître la vérité. Dans la Raison dans l'histoire , Hegel parle du droit qui a pour fonction de faire que les relations inter-humaines soient régies par la justice.

Sauf que ce n'est jamais le cas: chacun défend ses intérêt particuliers, les lois elles-mêmesétant faites par des privilégiers dans le but d'assurer leur domination et leurs privilèges.

Mais, parce qu'il existe unerésistance de la part des exploités, il s'installe peu à peu un équilibre entre ces intérêts, et donc une société un peuplus juste.

Si l'on transpose cet exemple à la connaissance, on découvre que les différents chocs entre les opinionsfont naître au fil de l'histoire un équilibre compris comme vérité.

En somme, l'opinion n'est ici obstacle à la vérité qu'àpartir du moment où elle est seule, à partir du moment où on ne la croise pas avec d'autres opinions afin de créerprogressivement une ligne médiane et véridique. Ce sont en somme les différend qui génèrent la vérité.

Loin de la dispute d'argument, du retranchement sur l'uniquechamp de la raison, on saisit que chacun, guidé par sa propre passion, entendons ses intérêts collectifs, contribuepourtant à l'avènement de la vérité au sein du monde, une vérité qui se dévoile progressivement dans l'histoire.Hegel parle en ce sens d'une ruse de la raison, d'une raison qui ne se montre qu'en se jouant de nos passions, denos intérêts strictement individuels.

Ainsi, même en s'éloignant du champ de la raison, même en s'enfouissant dansles particularités les plus radicales et les plus conflictuelles, on comprend que la trajectoire finale signale toujoursune obéissance à la raison, une raison qui ne ruse que pour mieux régner.

Bientôt, chaque conflit s'estompe tandisqu'apparaît une unité synthétique, un équilibre signalant qu'un feu quelque part sur la terre s'est éteint.

Lasouveraineté a précisément cette charge de faire cesser la violence par l'unité qu'elle confère.

De cela, on affirmeraencore une fois la royauté indéniable d'une raison rusée. Kant: la raison comme faculté morale et épistémique 3. Tout ce que je perçois, je le perçois toujours à travers un filtre que Kant nomme les formes a priori de la sensibilité (a priori en ce sens qu'elles précèdent toutes perceptions), et qui est composé du temps et de l'espace.

Nous ne pouvons échapper à cela, nous voyons tout dans l'espace et le temps, c'est là la condition même de toutphénomène : un cèdre dans cette forêt, ce visage dans le métro, les étoiles dans le ciel...

Ce qu'est la chose en soi, le noumène , eh bien pour Kant nous n'en savons rien.

Pour le savoir, il faudrait pouvoir sortir de cette posture qui nous enferme dans l'espace et le temps pour pouvoir vérifier si la chose en soi est bien conforme à la représentationque je m'en fait.

Invitons-nous donc à cet itinéraire kantien de la connaissance.

Que se passe-t-il exactement? Cette chose en soi rentre donc dans notre représentation à travers l'espace et le temps: elle devient unphénomène .

Puis, elle est analysée, pourrions nous dire, par ce que Kant appelle les catégories a priori de l'entendement .

En effet: imaginons que nous soyons de purs être sensibles, des êtres qui n'analysent rien, qui se contente seulement de recueillir le donnée sensible: nous n'aurions accès qu'à une sorte de magma continue de matière sans aucune cohérence.

Nous ne verrions ni chaise, ni bureau: seulement une sorte d'écoulement dematière.

Nos catégories de l'entendement vont trier ce donné sensible brut pour en faire quelque chose.

Elles vontassembler, séparer, trier, exprimer des rapports à l'intérieur des phénomènes.

Ainsi, une chaise, un bureau vontapparaître.

Ces catégories a priori de l'entendement nous permettent tous simplement de construire un objet , quelque chose d'individuel dans ce chaos magmatique.

C'est pourquoi on parle de catégorie objective , parce qu'elles. »

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