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Le BONHEUR au Moyen-Age: Faut-il chercher son bonheur ou son salut ?

Publié le 10/09/2018

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Faut-il chercher son bonheur ou son salut ? (Moyen Âge - xviie siècle)

A. Introduction : le Sauveur et le péché

Avec l’apparition du christianisme, le bonheur prend une nouvelle figure : celle du salut et de la grâce.

 

En un sens, le salut est une nouvelle lecture du souverain bien antique : lui aussi doit délivrer l’homme des souffrances, du manque et de l’imperfection de sa condition ; et lui aussi promet de combler son être fragile d’une plénitude totale. Il y a, toutefois, une différence capitale entre salut et bonheur : alors que le bonheur ne peut être obtenu que par nos propres forces, le salut ne dépend pas de nous, mais de la divinité.

 

On l’a vu, les philosophes stoïciens pensaient impossible de chercher le bonheur par nos actes; du moins nos pensées et nos désirs restaient-ils à notre disposition, et c’était donc d’eux qu’il fallait attendre l’ataraxie. Même avec leur conscience aiguë du faible pouvoir de l’homme, les stoïciens postulaient toujours que le bonheur résidait par essence dans << ce qui dépend de nous » ; l’idée semblait une évidence à tous les philosophes de l’Antiquité. La figure même d’un << sauveur », d’un tiers, fût-il un dieu, qui nous apporterait le souverain bien, aurait semblé une contradiction dans les termes : si le bonheur est une activité, et même l’accomplissement de l’activité humaine par excellence, comment peut-on le recevoir passivement ?

 

Déjà, cependant, les cultes mystiques de la Grèce ancienne, tel l’orphisme, attribuaient le qualificatif de << sauveur» à certains dieux. Dans le judaïsme puis dans le christianisme, la soumission de l’homme à une rédemption qui pour l’essentiel ne dépend pas de lui se fait plus forte encore lorsque la divinité devient toute-puissante et infinie. Les Actes des Apôtres (4, 8-12) le proclament clairement : << le salut ne se trouve dans aucun autre [que Jésus-Christ] ; car il n’est dans le ciel aucun autre nom

Le bonheur terrestre, que l’on peut tenter d’atteindre en ce monde, n’est donc rien en comparaison du bonheur éternel promis au fidèle. Mais il y a plus grave : Augustin ne croit plus du tout au bonheur purement terrestre, car la nature corrompue de l’homme, laissée à elle-même, ne peut suffire à garantir la paix et la justice. Ainsi la cité terrestre n’est-elle rien sans la cité céleste, qui seule peut la racheter et lui montrer la voie du bonheur, même terrestre ; dans le christianisme, la cité céleste prend donc la place qu’occupait la nature dans les philosophies païennes comme le seul guide sûr vers le bonheur, qu’il soit individuel ou collectif. Autrement dit, ni l’homme ni l’Empire ne peuvent prétendre à un bonheur même imparfait sans la gouverne et l’inspiration de l’Église.

Le légendaire philosophe Diogène était réputé avoir rejeté toutes les conventions et les mœurs de son temps et s’être retiré de la vie sociale sans pour autant s’éloigner physiquement des hommes, puisqu’il continua de vivre dans l’Athènes antique.

 

Nicolas Poussin fait ici de lui une figure du renoncement à la société en faveur d’une vie conforme à la nature, telle que la prônaient les stoïciens (voir encadré «Vivre conformément à la nature », p. 74) : Diogène jette son écuelle, objet fabriqué par l’homme et donc obstacle à sa soumission à la nature ; le philosophe prend exemple sur son compagnon qui boit directement à la rivière. La nature est omniprésente et domine la scène ; elle est harmonieuse en elle-même mais réduit l’homme à sa juste place, toute petite.

 

Au loin, en surplomb, la cité antique rappelle ce à quoi Diogène a renoncé : la vie régie par les lois des hommes. Tout au contraire de Brueghel (voir l’illustration Kermesse), qui montrait la nature animale et effrayante de l’homme privé de contrainte sociale, Poussin invite à se délivrer des lois humaines pour parvenir au bonheur.

« In t r o du c ti o n a u th è m e 25 L'ÂGE D'OR ET LA TERRE PROMISE Présentes dans de très nombreuses cultures, les images d'un bonheur éloigné dans le temps ou dans l'espace suggèrent à la fois que le bonheur est hors d'atteinte et qu'on ne peut renoncer complètement à l'espérer.

Les mythologies situent volontiers le bonheur parfait dans une origine immémoriale à jamais perdue, qui donnerait sens à notre existence actuelle tout en la dépassant.

D'Hésiode (vue siècle avant J.-C.) à Ovide (rer siècle de notre ère), la mythologie gréco-latine décrit l'histoire de l'humanité comme une longue décadence depuis l'Âge d'or*, où les hommes vivaient en harmonie entre eux et avec les animaux.

Une nature bienveillante et un printemps permanent pourvoyaient à leurs besoins : du lait coulait dans les rivières et le miel gouttait des arbres.

L'équivalent juif, chrétien et musulman de l'Âge d'or est le jardin d'Éden : Adam et Ève, sous la garde de l'É ternel, s'y promènent dans une nudité innocente, igno­ rant tout du bien et du mal, de la sexualité et de la reproduction.

Après le péché, Dieu condamne l'espèce humaine à tirer sa subsistance de la terre et à enfanter pour se perpétuer.

L'innovation du christianisme est d'avoir situé le temps du bonheur non seulement au début, mais aussi à la fin du monde : au Paradis, du moins pour les âmes qui auront mené une vie bonne et pieuse.

L'Apocalypse de Jean (Nouveau Testament) s'accomplit par la restauration de la Jérusalem céleste qui inaugure le royaume de Dieu parmi les hommes :. »

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