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Le bonheur est-il hors de prix ?

Publié le 27/02/2008

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En effet, le bonheur n?est pas un état immédiatement donné à l?individu, il ne suffit pas de vivre et d?avoir la conscience de notre existence pour être heureux, mais le bonheur apparaît bien comme le résultat de diverses conditions matérielles. Dans un poème intitulé Le Mondain, Voltaire écrit cette phrase fameuse : « J?aime le luxe ». Pour Voltaire et tout un courant de pensée du XVIIIe siècle, la félicité humaine dépend immédiatement du confort et des conditions matérielles de la vie. Ceci nous permet de voir que les conditions matérielles du bonheur peuvent devenir hors de prix : si le bonheur réside dans le confort, nous sommes toujours capables d?accroître la qualité de notre vie ; et s?il réside pour nous dans la bonne opinion que se font les autres de nous-mêmes, dans l?orgueil qu?autrui me permet de ressentir en m?accordant son estime, nous voici devant un gouffre qu?il ne nous sera jamais possible de combler. Oui, le bonheur est bien hors de prix, lorsque nous le faisons consister dans des biens matériels et moraux qui ne dépendent pas de nous.         Le bonheur accessible de la philosophie stoïcienne               Cependant, il est possible de voir que le bonheur cesse d?être hors de prix, lorsque nous le faisons consister, non dans des conditions qui ne dépendent pas de nous, mais uniquement dans ce qu?il nous appartient de maîtriser. Pour Epictète, dans son Manuel, il existe une différence intrinsèque entre ce qui ne dépend pas de nous (la mort, la réputation, la fortune?) et ce qui dépend entièrement de nous (le rapport moral que nous soutenons à ce qui nous arrive de nécessaire). Dans le cadre de cette philosophie, le bonheur cesse d?être hors de prix, puisque les conditions nécessaires à l?expérience du bonheur cessent d?être inaccessibles : bien au contraire, il nous suffit de cultiver un rapport d?acceptation à la nécessité, qui est le degré supérieur de la liberté, et la véritable condition du bonheur.   Les conditions du bonheur peuvent être hors de prix car le bonheur est avant tout affaire privée               Cependant, il faut bien avouer que cette définition des conditions nécessaires au bonheur ne peut entièrement nous satisfaire : certains d?entre nous ne sauraient être heureux dans le dénuement, même en cultivant un rapport d?acceptation à leur infortune, notamment parce que leur conformation physique leur interdit l?inconfort et la frugalité. Par conséquent, si le bonheur est « cet accord d?un être avec la vie qu?il mène » nous dirons que le bonheur n?est pas intrinsèquement hors de prix, mais qu?il peut l?être.

« a) Le bonheur, inaccessible en raison d'une déficience de la nature humaine ? Nous prendrons la question « le bonheur est-il hors de prix ? » dans un autre sens au sein de cette seconde partie.En effet, nous ne nous demanderons plus si les conditions nécessaires au bonheur sont hors de prix, mais si lebonheur lui-même est intrinsèquement hors de notre atteinte.

Nous commencerons par nous demander si cettedifficulté provient d'une déficience de la nature humaine, qui la rendrait imperméable aux impressions durables dubonheur.

Robert Mauzi, dans un ouvrage intitulé « L'idée du Bonheur dans la littérature et la pensée Française au XVIIIème siècle » cite cette phrase d'une dame vivant durant les Lumières, nommée Madame de Puisieux : « le bonheur est une boule après laquelle nous courons tant qu'elle roule et que nous poussons du pied quand elles'arrête » [1] .

Pour Madame de Puisieux, c'est la nature humaine qui rend le bonheur inaccessible, parce qu'il constitue le moteur de l'existence, moteur qui ne doit jamais cesser de nous mouvoir.

Le bonheur n'est pas en lui-même inaccessible, mais ce sont les individus qui se rapportent à lui comme à quelque chose d'hors de prix et horsd'atteinte.

b) Le bonheur, inaccessible en raison de sa nature même ? Cependant, nous pouvons nous demander si ce n'est pas le bonheur lui-même qui est hors de prix, en raison de sa nature même : bien souvent nous ne connaissons jamais « le » bonheur, mais des momentsde bonheur épars.

Pour Pascal, le bonheur terrestre n'est qu'un divertissement, c'est-à-dire un moyen adopté parles hommes pour oublier qu'ils sont mortels.

L'ennui est hautement insupportable à l'homme, parce qu'alors, l'absence de tout désir fait place à la considérationde soi-même et à la conscience de sa vanité.

Dès lors, on comprend que tout homme cherche à se divertir, c'est-à-dire à se détourner de la pensée affligeante de sa misère.

Nos désirs, pour autant qu'ils nous portent à croire queleur réalisation nous rendrait heureux, sont l'instrument majeur de cette stratégie.

L'imagination, qui institue desbiens comme désirables, en est l'auxiliaire indispensable.

La vérité du désir n'est donc pas dans son objet mais dansl'agitation qu'il excite : « nous ne recherchons jamais les choses mais la recherche des choses » (773).

Mais ledivertissement n'est qu'un cache-misère.

Préférable à l'accablement de l'ennui, il s'avère sur le fond tout aussinuisible.

Faire obstacle à la considération de sa misère, c'est se priver des moyens de la dépasser. En ce sens, le bonheur nous manque toujours parce qu'il n'appartient pas à la vie terrestre : dans une perspectivechrétienne, on dira qu'il n'y a de véritable bonheur que céleste, lors de la réunion de l'être à son créateur divin.

c) Le bonheur est hors de prix au sens où il est le souverain bien Mais contre cette perspective chrétienne, nous affirmerons en un autre sens que le bonheur est hors de prix : au sens où rien ne saurait lui être préféré, au sens de « souverain bien » que lui donnait Epicure. Affirmant que le bonheur est hors de prix, nous ne voulons pas dire qu'il nousest inaccessible, mais qu'il est l'objet le plus précieux que nous puissionsconquérir sur terre.

Afin de prouver qu'il n'appartient pas au domaine de lachimère, de l'impossibilité, nous pouvons nous référer à des preuvesempiriques, c'est-à-dire à des preuves appartenant au domaine del'expérience : des êtres qui ont écrit l'histoire de leur vie en nous montrantqu'elle a été heureuse, et en quoi leur bonheur a consisté, comme c'est le casde Giacomo Casanova dans ses Mémoires , peuvent nous le montrer.

Pour ce dernier, le bonheur n'est pas impossible, mais hors de prix dans le sens où l'ondit de quelque chose qu'elle est hautement désirable, qu'on ne peut lui donnerun prix tellement le sien est grand.

Finissons sur un extrait de l' Histoire de ma vie de Casanova, où l'auteur fait l'inventaire des conditions nécessaires à son bonheur, conditions qui ne nous paraitront nullement « hors de prix » : « J'aimais, j'étais aimé, je me portais bien, j'avais beaucoup d'argent,et je le dépensais, j'étais heureux, et je me le disais, riant des sotsmoralistes qui disent qu'il n'y a pas de véritable bonheur sur la terre ».

Conclusion : L'expression « le bonheur est il hors de prix ? » peut s'entendre en deux sens : le premier est que les conditions nécessaires au bonheur sonthors de prix, inaccessibles.

Nous avons vu que la définition du bonheur étantsubjective, nous ne pouvions dire que ces conditions étaient nécessairement « hors de prix ».

Mais cette questionpeut s'entendre comme une interrogation sur la nature même du bonheur : celui-ci est peut être hors de prix,chimérique, en raison de sa nature même ou d'une déficience de la nature humaine.

Cependant, certains êtres nousprouvent qu'il n'y a que de « sots moralistes » qui prétendent que le bonheur est « hors de prix », inaccessible…. »

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