Le bouton, la fleur et le fruit

Le bouton, la fleur et le fruit

Le bouton disparaît dans l'éclosion de la fleur, et on pourrait dire que le bouton est réfuté par la fleur. De même par le fruit la fleur est dénoncée comme un faux être-là de la plante ; et le fruit prend la place de la fleur comme sa vérité. Ces formes ne sont pas seulement différentes, mais encore elles se refoulent comme mutuelle­ment incompatibles. Mais leur nature fluide en fait en même temps des moments de l'unité organique dans laquelle elles ne s'opposent pas seulement, mais dans laquelle l'une est aussi nécessaire que l'autre et cette égale nécessité constitue seule la vie du Tout.

Hegel, Préface de la Phénoménologie de l'Esprit,

trad. J. Hyppolite, Aubier.

Quant aux journées révolutionnaires, elles marquent bien que le dépassement, par négation de l'ancien et affirmation du nouveau, n'a rien d'une poussée sereine, réglée par une nécessité organique. La volonté politique, ou éthique, crée du neuf, en arrachant le devenir social à la logique de sa repro­duction indéfinie. Il en est de même, selon Marx, du processus grâce auquel le capitalisme a été humanisé par les lois sociales qui en tempérèrent la sauvagerie spontanée. La négation de la négation ne pouvait alors venir que de la volonté de résistance. C'est que le « libéralisme « refusait comme par instinct toute règle qui limiterait l'exploitation. Et par « instinct « égale­ment, il tend à supprimer les règles conquises contre lui pour retrouver le libre déploiement de ses esprits animaux. La dia­lectique ici porte ses fruits amers, quand l'histoire semble faire retour en deçà de ses propres acquisitions.

Il est cependant un domaine de l'histoire humaine où la métaphore hégélienne peut prendre une portée originale. C'est celui de l'aventure philosophique, comme plus générale­ment celui de la culture. La succession des systèmes de pensée, décrite de l'extérieur, dément de prime abord l'unité pro­fonde de la démarche philosophique, tant les penseurs sem‑