Devoir de Philosophie

Le langage chez Platon

Publié le 20/08/2011

Extrait du document

langage

 Ce n'est pas un hasard si Platon (427 – 347 av. J.-C.), fidèle disciple du père de la philosophie (Socrate), a transmis sa pensée par le biais de dialogues. C'est la forme même du langage philosophique tel que son maître le concevait et l'appliquait. La philosophie n'est pas tant discours de vérité et de sagesse, mais avant tout questionnement. C'est sur cette base – héritée de l'activité socratique de dialoguer avec les athéniens dans la rue – que Platon définit à la fois le but et la méthode philosophique passant par le langage : la dialectique.

langage

« et c'est là ce qu'ils appellent enseigner la sagesse On dirait un homme, qui, après avoir observé les mouvementsinstinctifs et les appétits d'un animal grand et robuste, par où il faut l'approcher et le toucher, quand et pourquoi ilest farouche et paisible, quels cris il pousse en chaque occasion, et quel ton de voix l'apaise ou l'irrite, après avoirappris tout cela avec le temps et l'expérience, en formerait une science qu'il se mettrait à enseigner, sans avoird'ailleurs aucune règle sûre pour discerner, parmi ces habitudes et ces appétits, ce qui est honnête, bon, juste, dece qui est honteux, mauvais, injuste; se conformant dans ses jugements à l'instinct de l'animal, appelant bien toutce qui le flatte et lui fait plaisir, mal tout ce qui le courrouce, juste et beau tout ce qui satisfait les nécessités de sanature, sans faire d'autre distinction, parce qu'il ne sait pas quelle différence essentielle il y a entre ce qui est bonen soi et ce qui est bon relativement, qu'il ne l'a jamais connue, et qu'il est hors d'état de la faire connaître auxautres.

» (République, 1.

VI, 493.) Celui qui parle pour flatter les opinions d'autrui ne cherche pas à séparernettement les idées ; il les confond les unes avec les autres; aussi le sophiste aime-t-il les longs discours, espérantqu'emporté par le flot des images et des raisonnements l'esprit de l'auditeur ne saura plus à quoi se rattacher ; ledialecticien, au contraire, use de phrases courtes et nettes,, dont chacune ne comporte qu'un sens facile àreconnaître, et il ne consent à avancer dans son discours qu'après avoir obtenu l'adhésion de son interlocuteur.

Lerhéteur parle devant de grandes assemblées, où se trouvent réunis pêle-mêle des gens de tout âge, de touteprofession, de toute condition ; il faut que dans son discours il y ait pour ainsi dire un mot à l'adresse de chacun , ilest visible que, dans un temps aussi court et en parlant devant un si grand nombre d'hommes, il ne peut prétendre àconvaincre tous ceux qui l'écoutent ; il ne peut les amener tous à lui, c'est donc lui qui doit se plier servilement àtoutes leurs exigences.

Le dialecticien admet dans ses entretiens l'ignorant comme le savant, l'esclave commel'homme libre ; mais il ne se prend qu'à un adversaire à la fois, n'ayant pas de cesse tant qu'il ne l'a pas forcé às'incliner devant la vérité.

Du reste, c'est pour eux-mêmes, pour faire triompher leur opinion que parlent le sophisteet le rhéteur; ils craignent de lasser, en la retenant, l'attention de leur auditeur; ils déploient devant lui toutes leursgrâces, et s'efforcent de l'éblouir.

Le dialecticien n'a sur la question qu'il traite aucune idée préconçue ; commeSocrate, il ne sait rien ; s'il risque une hypothèse, c'est pour l'examiner en toute liberté d'esprit; il ne met rien au-dessus de la vérité et, si son interlocuteur lui démontre qu'il se trompe, il est prêt à reconnaître son erreur, sachantbien que le plus grand service qu'on puisse lui rendre est de le débarrasser d'une illusion.

Ce n'est pas l'amour de ladispute qui le pousse ; il ne cherche pas à humilier son adversaire, mais au contraire à le rendre meilleur; ce qui lefait parler c'est l'amour, l'amour de la vérité et l'amour des hommes.

Pour le but qu'il se propose, si une longue suitede raisonnements subtils est nécessaire, il ne craindra pas de paraître trop long en s'y engageant.

Il ne reculera pasdevant l'effort d'attention et de mémoire nécessaire à tout exercice philosophique ; à travers les anxiétés du douteet les longueurs de la recherche, il marchera obstinément, en dépit de toutes les opinions et de toutes les autorités,porté par la seule force de la raison, vers la vérité entrevue. Plus pénible et plus austère que l'art du sophiste ou du rhéteur, l'art de la dialectique est aussi plus sur et méritemieux le nom d'art.

Les arts de flatterie n'ont pas de principes rigoureux ; les règles qu'ils donnent sont le résultatd'une longue expérience des choses et des hommes; l'application en réussit parfois, mais non toujours; ce sont desarts empiriques, où la chance joue un grand rôle.

La dialectique, au contraire, ne laisse rien au hasard ; le principequi la règle, le principe de non-contradiction, en vertu duquel une chose ne peut pas être dans le même temps etdans le même sens elle-même et son contraire, est de telle nature qu'aucun fait ne peut l'établir, et qu'aucun faitnon plus ne peut le détruire.

Le dialecticien emploie deux procédés : la synthèse et l'analyse.

Les choses tellesqu'elles nous apparaissent sont très diverses; si l'on considère par exemple les sons émis par le larynx de l'homme,les variétés en sont indéfiniment multiples.

Savoir que la voix est multiple, et qu'aussi, en tant que voix, elle estune, n'est pas avoir atteint un haut degré de science.

Mais dans cette diversité reconnaître, comme l'a fait, dit-on,l'Égyptien Teuth, les trois grandes espèces des voyelles, des consonnes et des semi-voyelles; puis, dans chacunede ces idées, discerner celles des lettres élémentaires qui y sont comprises, c'est là faire œuvre de véritablelinguiste et, sans en avoir conscience, appliquer les procédés même de la dialectique.

Étant donnée une multiplicitéd'objets, la synthèse consiste à y démêler une idée une qui les embrasse tous ; mais il ne faut pas s'en tenir là IIfaut reprendre cette idée et la diviser de nouveau suivant ses articulations véritables, eu prenant garde de ne pas,comme un mauvais anatomiste, mutiler quelqu'une des idées qui y sont comprises.

Ordinairement, et pour plus desûreté, on divisera l'idée du genre en deux, procédé appelé dichotomie ; cependant, si la nature des choses réclameune division en un plus grand nombre d'espèces, il ne faudra pas craindre de compliquer l'opération, pourvu que l'onconserve un souvenir exact du nombre des divisions pratiquées.

Il faut aller ainsi progressivement de l'un au multipleet du multiple à l'un ; mais l'on ne sera dialecticien qu'autant que l'on sera capable de dire, h chaque moment de ladialectique, à quelle distance pour ainsi dire on se trouve de chacun des termes extrêmes, et par combiend'intermédiaires on en est séparé.

Le dialecticien est celui qui sait composer et décomposer les idéesméthodiquement, progressivement, en orientant sans cesse ses idées au milieu des autres.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles