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Le libre arbitre est-il une illusion ?

Publié le 06/01/2010

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  • LIBRE ARBITRE. Liberté de choix, ou d'indifférence.

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« Qu'appelle-t-on le libre arbitre ? Le libre arbitre pose la volonté comme cause première des actions des hommes.

Il peut s'agir de se déterminer en l'absence de causes apparentes ou deraisons précises.

À l'inverse, nous pouvons décider de choisir le contraire de ce qui paraît raisonnable.

Dans les deux cas, c'est bien la volonté pure quisemble être la cause originelle de notre action. La figure qui revient systématiquement pour illustrer le libre arbitre est celle forgée par un philosophe scolastique du )(Ive siècle, Jean Buridan : elleprésente un âne qui, placé devant un seau d'eau et une botte de foin, ne peut se décider pour l'un ou l'autre et, en conséquence, meurt de faim.

Si cettehistoire semble peu vraisemblable, elle sert d'argument pour démontrer que l'homme, parce qu'il est doué de raison, ne peut mourir d'une telle manière.Toutefois, même si l'homme opère ses choix de façon rationnelle, il peut se trouver dans la situation de l'âne de Buridan, et ne pouvoir utiliser sa réflexionpour faire un choix entre deux choses d'égale valeur.

Il peut encore, selon un exemple choisi par Descartes, se trouver à la croisée de chemins, perdu dansune forêt et sans argument rationnel pour décider d'aller à gauche plutôt qu'à droite.

En de pareils cas, c'est la spécificité de l'homme, la raison, qui setrouve mise en échec.

Mais celles ci n'est pas la seule caractéristique de l'homme.

La liberté différencie l'homme de l'animal et fait du premier un être quise détermine de manière autonome.

Si l'on considère que la liberté consiste à prendre une décision sans l'appui d'autre puissance que la sienne propre, onpeut alors avancer l'idée que décider, c'est créer : en ce sens, nos actes créent bien une nouvelle causalité. Lorsque la raison se trouve impuissante à nous éclairer dans nos choix, sommes-nous, à l'exemple de l'âne de Buridan, condamnés à ne plus rien pouvoirfaire ? Pour le philosophe, l'animal ressemble à une machine perfectionnée qui obéit aux lois de la nature et n'a donc pas le pouvoir d'improviser : si la loinaturelle est tenue en échec, alors l'organisme qui en dépend est lui aussi immobilisé.

Cela ne peut arriver à l'homme, qui, lui, pense ses actes.

Lorsqu'il n'ya pas matière à réflexion, la liberté consiste alors non pas à décider, mais à trancher en l'absence de toute raison, par l'effet de la seule volonté.

C etteliberté fait alors exister quelque chose qui ne peut exister qu'en vertu de sa seule puissance.

On la nomme la « liberté d'indifférence » puisqu'elle relève dela pure volonté, sans aucune raison.

Descartes écrira, dans ses Méditations métaphysiques (1641), qu'a elle est le plus bas degré de la liberté» et qu'elle«fait paraître plutôt un défaut dans la connaissance, qu'une perfection dans la volonté ». Selon Descartes, le pouvoir même de douter est le fruit d'une décision.

et c'est bien parce que la volonté peut soutenir le doute infiniment que lesméditations peuvent s'accomplir.

Si le doute cesse généralement lorsque des arguments sont avancés, si la volonté se soumet habituellement à la raison,cette volonté infinie et autonome peut toutefois continuer de nier.

Descartes va jusqu'à prétendre que, placés devant la vérité, nous pouvons encore rejetercelle-ci à la condition de fermer les yeux.

N'est-ce pas ce qui se produit dans l'action morale ? Nous voyons ce qu'il faut faire et nous choisissons de faireautrement.

« La grandeur de la liberté consiste, affirme Descartes, ou dans une grande facilité que l'on a à se déterminer, ou dans le grand usage de cettepuissance positive que nous avons de suivre le pire, encore que nous connaissions le meilleur.

» Une volonté peut donc choisir délibérément le malpour le mal en vue d'affirmer sa liberté absolue.

Le libre arbitre repose donc principalement sur la volonté pensée comme créatrice et échappant à toutedétermination.

On peut alors dire du libre arbitre qu'il est double : il est à la fois décision et décision de décider. La critique du libre arbitreNous nous croyons libres, et nous éprouvons cette autonomie de notre volonté comme une sorte d'évidence.

Il se pourrait malgré tout que ce ne soit qu'uneillusion, liée à notre ignorance des causes qui nous font agir. SPINOZAL'existence du libre arbitre, c'est-à-dire de la totale liberté de notre volonté, après avoir été hautement affirmée par Descartes, a été mise en cause parSpinoza de la manière la plus radicale.

Pour Spinoza, en effet, «l'homme est une partie de la Nature» (l'Éthique, 1677).

Les êtres humains se trouventdonc, comme toutes les autres parties de la Nature, soumis au déterminisme : leurs comportements comme leurs désirs et leurs décisions découlent decauses précises.

Si les hommes se croient libres, c'est parce qu'ils ignorent les causes qui les font agir.

Le libre arbitre est donc, selon Spinoza, uneillusion qui provient de notre ignorance : ne sachant pas, la plupart du temps, quelles sont les causes qui motivent nos décisions, nous nous imaginonsque nous d écidons «par nous -mêmes ».

LeibnizCette critique du libre arbitre s'est ensuite prolongée chez Leibniz, en fonction de deux principes fondamentaux.

Le «principe de raison suffisante» veutque tout ce qui arrive en ce monde ne soit pas le produit du hasard, mais possède une raison d'être.

Notre volonté, si l'on applique ce principe, n'est doncpas cause d'elle-même.

Ce que nous pensons avoir décidé librement découle d'un élément particulier, même si celui-ci nous échappe.

L'autre principeest que «la nature ne fait pas de saut», ce qui signifie que tout événement découle de manière nécessaire de ce qui le précède.

En ce sens, l'idée d'uncommencement radical des actes libres et l'affirmation que la volonté en est la seule cause participent plus • de l'illusion que de la connaissance.

Cetteanalyse peut se comprendre de manière simple à partir d'un exemple concret.

Lorsque, dans un ensemble de pièces de monnaie identiques, nous enprenons une pour régler un achat, nous pourrions penser que c'est, là aussi, la volonté qui détermine nos actes et que, sans elle, rien ne se ferait.

Or ilnous faut constater que cette situation est totalement déterminée.

La raison qui nous fait choisir telle ou telle pièce de monnaie ne relève pas d'un choix.D'abord parce que la rapidité de ratte ne laisse pas le temps de la réflexion.

Ensuite parce que la répartition des pièces dans la main se présente selonun ordre qui peut nous influencer : nous prendrons la pièce qui est plus près de nos doigts, par exemple, en fonction donc d'une configuration spatiale quia sa propre raison d'être et qui est indépendante de notre volonté.

Action morale et responsabilitéQuelle que soit la diversité des analyses, toutes les critiques du libre arbitre présentent la même démarche, qui consiste toujours à replacer notre volontéet ses décisions dans des ensembles plus vastes — lois de la nature, séries causales, automatismes physiques ou psychiques.

Dès qu'elle n'est plusconsidérée comme un monde à part, souverain et autonome, notre volonté voit son indépendance et son pouvoir illimité remis en cause.

Le problème capitalqui reste à résoudre, si l'on admet cette critique du libre arbitre, se situe dans le domaine de l'action morale et de la responsabilité éthique.En effet, si le libre arbitre n'existe pas et si toute décision se trouve entièrement soumise à un enchaînement de causes qui agissent sur notre volonté,comment tenir qui que ce soit pour responsable? C omment porter un jugement moral sur les actes de qui que ce soit? Le problème est posé par Kant, quiaffirme que, même si les actes d'un homme étaient entièrement explicables, il faudrait malgré tout le considérer comme autonome sur le plan de la volonté.. »

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