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Le religieux et l'antireligieux dans la pensée des Lumières françaises.

Publié le 27/02/2008

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Il ne s?agit plus d?être croyant pour être vertueux lorsque déjà l?on fait le bien ; la foi n?est plus le seul critère du moralement méritoire, et l?intellectualisme moral, subsistant encore chez Descartes, est dépassé par une valeur nouvelle et inexpugnable : la conscience. Car ce n?est plus le contenu de connaissance qui doit être vrai pour que l?agir soit bon ? certitude et évidence dans la raison ultime se fonderait en le divin, mais la responsabilité devient l?inerradicable fondement de la valeur humaine.   Au sein du tumulte des luttes théologiques pour le pouvoir se profile avec Voltaire la possibilité du déisme comme solution aux controverses. Posé en termes épistémiques, le religieux est rationalisé et rendu raisonnable en devenant déisme. Il est cette religion sans dogme à laquelle aboutit la raison dans son impuissance à saisir le principe du tout comme ordre. Avec Maupertuis s?opère une transition de la théologie en un déisme dont le statut épistémique est transcendantal. Directeur mais non-constitutif, le principe de moindre action et l?optimisation de la relation de causalité (la théorie héritée de Malebranche et Leibniz de la simplicité des voies corrélée à la richesse des effets) est d?une application générale et d?une simplicité extrême. Etant si digne de la sagesse du divin, son application postulée comme organisatrice d?un tout inaccessible dans le détail fait du religieux une théologie transcendantale, un principe rationnel législateur du réel, et condition de sa compréhension par l?homme. Ainsi pour Buffon, face à l?incoercible complexité du réel, qui dans son investigation nous est toujours relatif, l?unité de son principe d?organisation doit être pensée bien que le point de vue divin sur un univers unique et unitaire reste inaccessible (d?Alembert). En conséquence, le religieux déiste des Lumières s?inscrit dans le prolongement de la reconnaissance des limites de la raison humaine face à l?ordre dont la raison ne peut être atteinte.

« inaccessible (d'Alembert). En conséquence, le religieux déiste des Lumières s'inscrit dans le prolongement de la reconnaissance des limites de la raison humaine face à l'ordre dont la raison ne peut être atteinte.

Toute religion couve ainsi un fondsdéiste comme expression de sa rationalité raisonnable.

Et le déisme peut être fidéisme en tant que condition depossibilité de se référer à la totalité de l'extérieur comme ordonné en son principe.

Le religieux rationnel etraisonnable, conséquence du raisonnement et du constat de sa propre impuissance, devient l'indémontrable (lefidéisme) du plus intime (la conscience intérieure des limites de la raison) : la religion s'approfondit en un senstranscendantal. La conscience déjà opérante chez Bayle comme lieu de la responsabilité morale authentique devient avec Rousseau dans Julie ou la nouvelle Héloïse le fondement de la valeur et de l'authenticité de l'homme qui face au monde pense l'ordre naturel.

La conscience est ce terme auquel aboutit la réflexion sur le religieux par-delà lacritique et l'exclusion de la superstition fanatique et avide de puissance.

La proximité avec l'intérieur le plus intimeproduit la connaissance de soi par resserrement sur soi.

Et de l'exercice de la méditation est généré par leresserrement un sentiment de proximité avec le divin et l'origine des valeurs.

Cœur et sentiments sont alors lesprincipes opérateurs d'une conversion de la raison qui saisit le fondement intérieur de sa valeur par lareconnaissance de sa naturalité.

L'exercice méditatif de la raison permet ainsi d'accéder à l'unité de la totalité del'être comme conscience par l'expérience du sentiment exprimant l'authenticité de la valeur de l'homme.

Le cœurdoué de sentiment convertit la froide raison au religieux comme principe de sa vertu.

Et la théologie s'humanise endevenant le fait de l'homme juste et raisonnable, conscient et sensible.

Le mal contre lequel s'insurge la consciencerévoltée de Bayle, face à l'argumentaire abstrait de théodicée qui en rend raison selon des principes métaphysiqueset généraux, est alors assumé avec Voltaire ( Candide ) comme responsabilité humaine principalement.

Le cœur religieux de Rousseau se distingue alors de l'institution de la religion, et ainsi, dans la conscience, s'élabore lemouvement de la vie spirituelle et les fondements critiques d'une foi non dogmatique. En conclusion, il nous est à présent possible de dissoudre le paradoxe consistant à faire de l'énoncé (le conjoncteur entre contradictoires) une proposition inclusive : religieux et antireligieux peuvent se conjoindre dans lapensée des Lumières une fois les nuances relatives à l'acception des termes restituées.

Le religieux de l'antireligieuxn'est pas celui auquel aboutit par-delà la critique le rétablissement du religieux en la conscience.

La polysémie duterme ayant été expliquée – l'extériorité institutionnel de la superstition fanatique avide de pouvoir politique enopposition avec l'intériorité authentique de la conscience religieuse vertueuse – nous pouvons dès lors comprendreque la conscience relie Bayle à Rousseau dans le cadre d'une réflexion critique sur la religion dont seule la morale estjuge de la valeur.

Mais comprendre la permanence de la préoccupation pour le religieux a nécessité une transitionpar la dimension épistémique qui, prenant conscience de la finitude de la rationalité humaine, retourne à la questiondes valeurs morales (l'authenticité de la conscience) comme principe et terme de la réflexion des Lumières sur lereligieux.

Vertu et religieux peuvent à nouveau se confondre lorsque être religieux signifie l'authenticité de laconscience intérieure.

Défaite de la métaphysique dogmatique, la religion répond au besoin du cœur finissant parcomprendre que Dieu lui est intérieur (Kant, Œuvres posthumes ).. »

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