Le silence ne dit-il rien ?
Publié le 24/03/2015
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Dissertations 57
marque la pensée de Hegel (cf.
le texte n° 2), pensée et langage sont
désignés
comme deux ensembles congruents: il n'y a pas de pensée en
dehors du langage,
ce qui fait que l'ineffable n'est que la pensée qui
« fermente».
Ainsi, puisque, pour reprendre Boileau, «ce qui se conçoit
bien s'énonce
clairement», il faut déduire que ce qui ne peut s'énoncer ne
mérite pas le nom de pensée.
Puisque tout peut être dit, le silence, lui, ne
dit rien.
b) Mais pourquoi alors avons-nous autant tendance à lier l'impossibilité
de dire avec l'idée de la plénitude du sentiment éprouvé ? Dans l'impos
sibilité de dire, Bergson voudra repérer au contraire
la présence de
l'intuition.
En posant la pensée comme « incommensurable avec le
langage», Bergson fait-il pour autant implicitement du silence une réserve
féconde ? Il faut se garder ici de confondre ineffable
et inexprimable.
La
problématique de l'ineffable renvoie à l'inadéquation du langage, alors que
l'inexprimable se définit indépendamment du langage.
S'il y a de l'inex
primable, le silence ne dit plus
ce que le langage est incapable de dire : il
dit l'incapacité de la pensée.
li -Le silence aux limites de la pensée
a) Wittgenstein clôt son Tractatus logico-philosophicus par cet apho
risme :
«ce dont on ne peut parler, il faut le taire».
Il ne s'agit pas là d'une
sorte de règle morale qu'on pourrait éventuellement enfreindre, mais d'une
constatation qui renvoie à une nécessité de fait.
Essayer de dire ce qu'on ne
peut dire, serait s'exposer à une expérience douloureuse entre toutes, celles
des limites de la
pensée.
Aussi le propos de Wittgenstein ne consiste-t-il
donc nullement dans une critique de l'insuffisance du langage.
Ce n'est pas
le langage qui est insuffisant, c'est la pensée.
Aussi le silence n'exprime-t-il
plus seulement ce que le langage ne peut pas atteindre, mais aussi une
impuissance de la pensée elle-même.
b) Cela signifie que la région extérieure au langage n'est certes pas vide,
mais qu'elle est également extérieure à la pensée.
En témoigne cet autre
aphorisme de Wittgenstein (noté 6.522 dans le
Tractatus) : « Il y a assu
rément de l'inexprimable.
Celui-ci se montre, il est l'élément mystique
».
Ce qui se montre, c'est ce qu'il serait vain de chercher à dire, c'est l'être.
A
quoi bon chercher à dire ou à penser l'être ? L'être se montre tout seul, se
désigne à nous dans le fracas d'un silence assourdissant..
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