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Le souci du bonheur est-il étranger à la morale ?

Publié le 17/03/2004

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morale

ÉPICURE lui-même fait consister le bonheur dans l'absence de douleur et la tranquillité de l'âme : « ne pas souffrir dans son corps et ne pas être troublé dans son âme «, telle est selon lui la vraie félicité et, tout comme PLATON, il déclare que, même soumis à la torture, jusque dans le taureau de bronze où le tyran Phalaris le fait brûler à petit feu, le sage est encore heureux. Quant aux Stoïciens, on sait que c'était un axiome de leur morale que « le sage seul est heureux «. La plupart des métaphysiciens modernes s'expriment de même. « Les devoirs que chacun se doit à soi-même, écrit MALEBRANCHE à la fin de son Traité de Morale (II, chap. 14), peuvent se réduire en général à travailler à notre bonheur et à notre perfection «, le bonheur consistant dans « la jouissance de plaisirs capables de contenter un esprit fait pour posséder le souverain bien «. LEIBNIZ (Nouv. Essais, liv. I, chap. II) déclare que « la nature a mis dans tous les hommes l'envie d'être heureux « et que cette tendance innée coïncide avec l'inclination vers le bien.

  • I) Le souci du bonheur n'est pas étranger aux exigences de la morale.

a) Le bonheur est le bien suprême. b) Rien n'est plus important que d'être heureux. C) La quête du bonheur est toujours une conquête morale.

  • II) Seule la raison pratique peut fonder l'action morale.

a) L'idée de bonheur est trop subjective pour fonder une morale. b) Bonheur et vertu sont inconciliables. c) Se rendre digne du bonheur ?

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morale

« moderne, p.

492-493).

On peut dire en effet que tous les philosophes anciens identifient le bonheur et la vertu et,tout au moins, les considèrent comme coïncidant nécessairement.

Le bonheur, dit PLATON (Rép., I, 354 a), est laconséquence nécessaire de la vertu, parce que celle-ci est le bien naturel de l'âme, et le juste peut être maltraitéet même supplicié : il jouira du vrai bonheur (Ibid., 362 a).

ARISTOTE désigne de même le bonheur comme la fin, lesouverain bien de l'homme; car l'être qui agit selon sa nature est vertueux, la vertu consistant, pour chaque être, àaccomplir l'oeuvre qui lui est propre, et, en même temps, il y trouve la joie la plus élevée et la plus agréable (Eth.Nic., 1106 a).

ÉPICURE lui-même fait consister le bonheur dans l'absence de douleur et la tranquillité de l'âme : « nepas souffrir dans son corps et ne pas être troublé dans son âme », telle est selon lui la vraie félicité et, tout commePLATON, il déclare que, même soumis à la torture, jusque dans le taureau de bronze où le tyran Phalaris le fait brûlerà petit feu, le sage est encore heureux.

Quant aux Stoïciens, on sait que c'était un axiome de leur morale que « lesage seul est heureux ».La plupart des métaphysiciens modernes s'expriment de même.

« Les devoirs que chacun se doit à soi-même, écritMALEBRANCHE à la fin de son Traité de Morale (II, chap.

14), peuvent se réduire en général à travailler à notrebonheur et à notre perfection », le bonheur consistant dans « la jouissance de plaisirs capables de contenter unesprit fait pour posséder le souverain bien ».

LEIBNIZ (Nouv.

Essais, liv.

I, chap.

II) déclare que « la nature a misdans tous les hommes l'envie d'être heureux » et que cette tendance innée coïncide avec l'inclination vers le bien.On connaît enfin la célèbre proposition de SPINOZA (Éthique, V, prop.

42) : « La béatitude n'est pas la récompensede la vertu; c'est la vertu elle-même »; car la béatitude ne consiste en rien d'autre qu'en l'amour intellectuel de Dieu(Ibid., prop.

36).On le voit : cette conception du bonheur n'a rien d'empirique; elle distingue nettement le bonheur du bien sensible.Il s'agit, en réalité, de la béatitude, c'est-à-dire de cet état idéal du sage qui a réalisé son essence ou a atteint lafin à laquelle il est destiné.

Il y a, à la base de cette conception, toute une métaphysique sous-jacente.

Oncomprend dès lors comment le bonheur ainsi défini peut être identifié avec le souverain bien et avec la vertu ou lasagesse. B.

— LE BONHEUR SENSIBLE.

De cette conception, il faut distinguer celle des empiristes modernes, pour lesquels lebonheur est une somme de plaisirs.

Cette façon d'entendre le bonheur est beaucoup plus proche de la conceptionvulgaire, qui admet difficilement qu'on puisse être heureux dans la souffrance.

Mais cette conception empiriste semêle parfois, comme chez ÉPICURE, à la conception métaphysique, et, à l'intérieur même de celle-là, bien desdistinctions sont encore possibles.1° Il y a lieu de distinguer d'abord les plaisirs physiques et les plaisirs de l'âme et de l'esprit.

En général, leseudémonistes ont privilégié ces derniers, mais ils n'ont pas nécessairement exclu les premiers : « Je ne saurais, ditÉPICURE, quelle idée je pourrais me faire du Bien, si je supprimais les plaisirs du boire et du manger, de Poulie et dela vue, et ceux d'Aphrodite », ce qui ne l'empêchait pas de soutenir que le sage peut être heureux avec un peu depain et un peu d'eau et de mener lui-même une vie très tempérante, presque austère. 2° Tandis que certains n'ont tenu compte, comme BENTHAM, que de la quantité des plaisirs, J.

Stuart MILL a définile bonheur comme « une vie aussi riche que possible en plaisirs, au double point de vue de la quantité et de laqualité ».

Cette notion de la qualité des plaisirs étant posée, MILL en vient à dire que « le bonheur qui est lecritérium du bien n'est pas le bonheur même de l'agent, mais celui de tous les intéressés » et que, d'autre part,comme l'expérience nous montre que le désintéressement et la vertu sont les meilleurs moyens d'obtenir le bonheur,il peut se produire un transfert des sentiments qui fait que « ce qui était d'abord désiré comme moyen, en vient àêtre désiré en soi », de telle sorte que la recherche du bonheur fait place à la recherche de la vertu et que c'est là,en définitive, le meilleur moyen d'être heureux. 3° Il y a enfin une troisième distinction, qui est peut-être plus importante encore.

On peut se représenter le bonheurd'une façon statique et presque négative.

C'était la conception d'ÉPICURE : ne pas souffrir, tel était son but, et ilconseillait au sage, en conséquence, de vivre simplement au milieu d'un petit cercle d'amis, sans se marier nis'occuper des affaires publiques ni avoir aucune ambition.

Avouons que c'est là une conception du bonheur assezmesquine, mais assez courante chez « des gens découragés et las, qui n'ont plus de force et d'espérance que cequ'il en faut pour vivre au jour le jour ».

Mais il est une autre conception, positive et dynamique, du bonheur.

C'estce qu'a bien exprimé le moraliste BERSOT (1816-1880) : « Osons dire, écrit-il, la vérité sur le bonheur.

On se lereprésente ordinairement comme un état fixe, comme un repos; or, l'homme est un être vivant, son bonheur estdonc de vivre, et la vie est un mouvement, par conséquent un effort, un regret, une espérance et une crainte » (Unmoraliste, p.

21), et BERSOT, citant le mot de PASCAL : « Nous ne cherchons jamais les choses, mais la recherchedes choses », rappelle l'exemple de tous ces grands hommes qui veulent toujours aller « plus loin » et qui netrouvent leur bonheur que dans l'action. II.

Bonheur et moralité. Que penser maintenant du bonheur pris comme but de la vie? Tout dépend évidemment de la conception que nousnous en faisons.A.

— Reconnaissons toutefois que, de même que l'intérêt avec lequel on l'a d'ailleurs parfois confondu, le bonheurreprésente déjà un objectif supérieur au plaisir.

Tous les philosophes eudémonistes l'ontreconnu : pour être heureux, il faut savoir renoncer à certains plaisirs ou tout au moins établir entre eux unehiérarchie.

La notion du bonheur introduit ainsi une certaine unité dans la conduite, par opposition à l'impulsivité del'instinct qui ne recherche que le plaisir immédiat. B.

— Il va de soi, d'autre part, que, si le bonheur est conçu sous la forme de la béatitude, il s'identifie alors avec les. »

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