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LES CONDITIONS DE L'INVENTION

Publié le 16/03/2011

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   A) Le problème de l'inconscient dans l'invention    Le moment le plus haut de l'invention est l'inspiration : là-dessus, Ribot disait :    « Considérée sous son aspect positif, l'inspiration présente un caractère très net, elle ne dépend pas de la volonté individuelle. Comme pour le sommeil, ou la digestion, on peut essayer de procédés qui la provoquent, la favorisent, la maintiennent, mais on n'y réussit pas toujours. Les inventeurs, grands et petits, ne tarissent pas en plaintes sur les périodes de stérilité qu'ils subissent malgré eux. Les plus sages attendent le moment, les autres essaient de lutter contre le mauvais sort, et de créer contre nature. «    Considérée sous son aspect positif, l'inspiration a deux marques essentielles : soudaineté; impersonnalité.

« tranches de savoir, mais d'une mémoire sélective, qui de l'amas des connaissances antérieures rappelle le souvenirutile.

Il faut de l'imagination, c'est-à-dire l'aptitude à réaliser des combinaisons nouvelles, mais aussi et surtout unjugement permettant de discerner celles de ces combinaisons qui seront fécondes.

Le rêveur, pseudo-inventeur,abonde en combinaisons nouvelles, mais il est incapable de discerner et de sélectionner celles qui ont de l'avenir.

«Inventer, c'est discerner, choisir.

» D) Rôle de l'activité Sans doute l'inspiration a-t-elle les trois caractères montrés par Ribot, mais avant l'inspiration, il y a un travail, uneffort, absolument indispensable; Victor Hugo avait tout jeune écrit des milliers de vers; on connaît les innombrablesesquisses de Bach, et le mot de Newton : « J'ai trouvé ma loi en y pensant toujours.

» Le travail préalable àl'invention ne peut pas être un simple travail d'assimilation, d'entassement de connaissances; s'il débouche sur uneinvention, c'est qu'il a été une succession d'ébauches, de synthèses, une série d'esquisses. De même qu'il est nécessaire avant l'invention, le travail est nécessaire après, car l'invention n'est pas achevée, engénéral, avec l'inspiration : elle apporte des matériaux qu'il faut juger, par rapport auxquels il faut prendre du recul.C'est vrai en science, où l'invention de l'hypothèse annonce une longue période de vérification mais aussi dans l'art :« Le premier vers est porté par les dieux »...

mais tous les autres restent à faire.

En résumé, il est vrai que lesracines de l'inspiration plongent dans l'inconscient, mais il y a aussi la nécessité d'une conscience claire pour juger leproduit de cette activité inconsciente.

La phase d'inspiration se situe entre deux phases de travail, et ce qu'elle ad'inconscient est analogue à ce qu'a de caché le cours d'eau souterrain après une perte et avant sa résurgence. E) Rôle de la société dans l'invention 1° Les thèses en présence : a - La thèse individualiste : Gabriel Tarde : « Que nos sciences aient commencé par être une poussière de petites découvertes éparses et sans liens qui sesont groupées ensuite, groupements dont chacun a été lui-même, une découverte, en petites théories, elles-mêmesfusionnées plus tard en théories plus vastes, confirmées ou rectifiées par une multitude d'autres découvertes, enfinreliées précisément par des arches d'hypothèses jetées vers elles, hautes inventions de l'esprit unitaire, qu'il en soitainsi, cela est indiscutable : il n'est pas de loi, il n'est pas de théorie scientifique, comme il n'est pas de systèmephilosophique qui ne porte encore écrit le nom de son inventeur; tout est d'abord d'origine individuelle, nonseulement tous les matériaux, mais tous les plans, les plans de détail et d'ensemble, tout, même ce qui estmaintenant répandu dans tous les cerveaux cultivés, a débuté par être le secret d'un cerveau solitaire d'où cettelampe agitée, timide, a rayonné à grand-peine dans une étroite sphère à travers les contradictions jusqu'à ce que,fortifiée en se répandant, elle soit devenue une lumière éclatante. Mais s'il est évident que la science s'est construite ainsi, il n'est pas moins certain que la construction d'un dogme,d'un corps de droit, d'un gouvernement, d'un régime économique, s'est opérée pareillement et s'il y a des doutespossibles en ce qui concerne la langue et la morale, parce que l'obscurité de leur origine et la lenteur de leurstransformations les dérobent à nos yeux dans la plus grande partie de leur cours, combien n'est-il pas probable queleur évolution a suivi la même voie...

N'est-ce pas par de minuscules créations d'expressions imagées, de motsnouveaux, ou de sens nouveaux, que notre langue autour de nous s'enrichit, et chacune de ces innovations, pourêtre d'ordinaire anonyme, en est-elle moins une initiative personnelle, imitée de proche en proche, et n'est-ce pasdes bonheurs d'expressions pullulant en chaque langue que les langues s'empruntent réciproquement pour grossirleurs découvertes et assouplir, sinon compliquer, leur grammaire, n'est-ce pas aussi par une série de petites révoltesindividuelles contre la morale, ou de petites additions individuelles à ses préceptes, que cette morale subit delourdes modifications, et est-ce qu'on ne va pas, à travers les phases successives d'une ère très antique où leslangues étaient innombrables mais très pauvres, chacune parlée par une peuplade..., où les morales étaient aussitrès nombreuses, très dissemblables, et très simples, à notre époque où un petit nombre de langues très riches etde morales très compliquées sont en train de se disputer l'hégémonie future. Ce qu'il faut accorder aux adversaires de la théorie des causes individuelles, c'est qu'on l'a faussée en parlant degrands hommes, là où il fallait parler de grandes idées, et même de petites idées, d'infinitésimales innovationsapportées par chacun de nous à l'œuvre commune.

La vérité est que tous ou presque tous nous avons collaboré àces gigantesques édifices qui nous dominent, et nous protègent.

Chacun de nous, si orthodoxe soit-il, a sa religion àsoi, et si correct qu'il puisse être, sa langue, sa morale à soi; le plus vulgaire des savants a sa science à lui, et demême qu'il a sa petite invention, consciente ou inconsciente, qu'il ajoute au legs séculaire des choses sociales dontil a le dépôt passager, il a aussi son rayonnement imitatif dans sa sphère plus ou moins bornée mais qui suffit àprolonger sa trouvaille au-delà de son existence éphémère, et à la recueillir pour les ouvriers futurs qui la mettronten œuvre; l'imitation qui socialise l'individuel perpétue de toutes parts les bonnes idées, et en les perpétuant lesrapproche et les féconde.

» Critique.

— Il y a quelque équivoque dans la pensée de Tarde : certains textes finissent par présenter l'inventioncomme : « le bénéfice le plus net du fonctionnement prolongé de l'imitation ». « Plus se diversifient ces suggestions, qui souvent se, contrarient et plus s'accentue l'importance du caractère. »

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