Lévi-Strauss: Culture et coutumes
Publié le 27/02/2008
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- Tout jugement culturel est par essence relatif, c'est-à-dire toujours ethnocentré et donc potentiellement porteur d'un jugement de barbarie sur l'autre.
La possibilité du jugement de barbarie surl'autre émerge en même temps que le jugement de la valeur culturelle. - Preuve de la relativité du jugement de barbarie = certains us et coutumes sont interprétés comme barbares à une certaine époque de l'histoire alors qu'ils sont conçus comme hautement cultivés à un autremoment. - Si la culture est pour ainsi dire l'idéal normatif universel que poursuit l'humain, et ce par quoi l'homme se définit dans son humanité, la barbarie serait tout aussi universelle que la culture.
La barbarie comme faitguette toujours, de l'intérieur, toute culture dès lors que toute culture se pose en s'opposant à son autre =elle définit ipso facto l'autre comme barbare quand elle se pose comme culture. - Je qualifie de barbare ce qui échappe à mon logos, c'est-à-dire à ma logique = est barbare ce qui est lointain, extérieur, étranger à moi.
Le barbare est à la fois ce qui est autre que moi et en même temps ce quim'est indifférent, c'est-à-dire ce que je peux dénigrer impunément.
Le barbare, c'est l'autre dans son altéritéindifférente qui n'a aucun rapport avec moi ; c'est celui qui n'a pas le même monde, avec lequel je ne peuxrien partager.
Le barbare n'est pas celui qui n'a pas de loi, mais celui qui n'obéit pas à ma loi, celui quitransgresse l'ordre axiologique de ma culture, de mon logos (mais non pas celui qui transgresse tout ordre). - Tout jugement ethnocentré, porté par l'identique sur le différent, consiste à rejeter potentiellement la barbarie sur l'autre. - Mais pour Lévi-Strauss, le vrai barbare n'est pas tant celui qui est jugé tel en vertu de ses pratiques, que celui qui juge l'autre barbare en se prenant lui-même comme unique norme morale. - Dès lors, le concept de barbarie est inopérant, il se détruit lui-même dès lors qu'il prend conscience de son absolue relativité ® le jugement de l'anthropologue, par processus de distanciation d'avec sa propre culture, peut parvenir à voir cette absolue relativité. - De là, est barbare non pas celui qui se comporte de façon étrange par rapport à ma propre culture, mais celui qui juge l'autre barbare et qui se faisant révèle à l'anthropologue que le concept de barbarie estinopérant. - On comprend alors que, dans un troisième degré, est barbare celui qui croie à la barbarie.
Comme simple potentialité, c'est-à-dire tout homme croyant naïvement que la barbarie est un concept valide est barbare. - « Nous nommons barbares tout ce qui n'est pas nous » = tout jugement de barbarie sur autrui témoigne du relativisme essentiel auquel seul l'anthropologue pourrait s'arracher.
Lorsqu'on a pas conscience de cerelativisme, alors il y a deux conséquences :1) on est soi-même barbare 2) on juge autrui comme barbare en se jugeant soi-même comme aulne de la civilisation. Conclusion : - Vieille tendance de chaque culture à se prétendre la plus « civilisée » et qualifier ce qui est hors d'elle de « barbare ». - En réalité, jugement de valeur culturelle est toujours relatif, il porte toujours en germe celui de jugement de barbarie, comme risque. - La notion de barbare est inopérante, sans fondement, car tout entière relative.
Celui qui croit à la barbarie est donc le véritable barbare. - On peut se demander comment remédier à cette croyance : peut-être peut-on invoquer le devoir moral de se cultiver soi-même.
[1] Lévi-Strauss fait ici allusion à la Controverse de Valladolid : elle porta en 1550 sur le statut des Indiensd'Amérique et opposa le dominicain Bartolomé de Las Casas et le philosophe Sepulveda devant un légat du papedans une église de Valladolid..
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