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L'Idéalisme selon LACHELIER

Publié le 06/06/2011

Extrait du document

« Dans certains états d'extrême distraction... nous voyons les objets flotter comme dans un rêve... Mais, la pensée fait de ce rêve une réalité ; et non seulement notre perception devient pour nous... un fait vrai et qui le sera toujours à titre de fait passé, mais le groupe entier des qualités sensibles nous semble sortir de notre conscience pour se fixer dans une étendue extérieure à elle : elle devient pour nous une chose, un être, qui existe en lui-même, qui existait avant notre perception et qui continuera d'exister, après que nous aurons cessé de le percevoir... Il y a donc réellement en nous une conscience intellectuelle, qui n'ajoute rien au contenu de la conscience sensible, mais qui imprime à ce contenu le sceau de l'objectivité... « Si le monde sensible apparaît à tous les hommes comme une réalité indépendante de leur perception, ce n'est pas sans doute parce qu'il est une chose en soi, extérieure à toute conscience : c'est donc parce qu'il est l'objet d'une conscience intellectuelle qui l'affranchit en le pensant de la subjectivité de la conscience sensible. «

J. LACHELIER, Psychologie et métaphysique. Introduction.

Je suis au repos au bord de la mer. Mes yeux sont ouverts et je vois les vagues qui déferlent. Mais en même temps ma rêverie m'entraîne. Il arrive un moment où je ne sais plus dans cette « pensée « qui m'occupe ce qui en elle est vrai ou fictif. Un auteur de la fin du siècle dernier, J. LACHELIER, posait, en 1885, dans un ouvrage intitulé Psychologie et métaphysique, le problème de la réalité du monde extérieur en partant de ce même fait. Il s'exprimait ainsi : « Dans certains états... Comment faut-il comprendre ce passage et que faut-il en penser ?

« extérieure indépendante du temps : la chose existe, existait et existera indépendamment de notre perception.d) Mais la rectification faite par l'auteur vient alors comme tranchante et ferme, en vertu du principe idéaliste.

Leraisonnement n'est pas complet ; il ne contient que la deuxième partie qui est l'application de ce principe.

Complet, ils'exprimerait ainsi : « Si le monde sensible apparaît à tous les hommes comme une réalité indépendante de leurperception, cela ne peut être parce qu'il est une chose en soi.

En effet, comment pourrions-nous vérifier cette 4.

chose en soi » ? La pensée ne peut sortir d'elle-même pour voir hors d'elle-même s'il existe une chose en soi.

Ilreste donc que ce caractère objectif que nous prêtons à notre connaissance sensible soit l'oeuvre de la conscienceintellectuelle : c c'est parce qu'il est l'objet d'une conscience intellectuelle qui l'affranchit, en le pensant, de lasubjectivité de la conscience sensible.

» II.

— Critique du texte Telle est la pensée de LACHELIER, qui sur ce point est commune à toute l'école idéaliste.

Mais faut-il admettre cettepensée ? Que valent les arguments ? A.

— ConcessionsC'est tout d'abord l'argument fondamental que nous devons envisager.Il n'est pas exprimé dans ce passage ; mais nous l'avons vu, il commande toute la valeur de l'affirmation.Il faut avouer que ce qui fait sa force, c'est qu'il apparaît, au premier abord, comme une simple application duprincipe élémentaire auquel tous les autres se ramènent : le principe d'identité : la pensée ne peut être que pensée; on ne peut identifier pensée et non pensée...

Et si le principe signifie : le contenu de la pensée estnécessairement pensé, on ne peut qu'approuver cette affirmation.De plus, il est certain que l'analyse de notre pensée sur le caractère objectif du réel apparaît bien comme unjugement de réalité (ce que LACHELIER appelle : « conscience intellectuelle ») qui s'ajoute et s'applique auxdonnées de la perception pour interpréter celles-ci dans le sens d'un réel objectif. B.

— Réserves sur cette pensée1°) Réserves sur le principe.

— Tout le problème consiste précisément dans cette interprétation et dans le sens quenous lui donnons.Depuis Descartes, qu'on a pu appeler, pour cette raison, le père de l'idéalisme, l'idéaliste pense que le contenu de lapensée n'est rien d'autre que la pensée elle-même.

Celle-ci sans doute offre des modalités diverses,correspondantes aux « qualités » de ce que nous appelons monde extérieur.

Il reste que ce n'est qu'une pensée etqu'on ne peut faire qu'une pensée ne soit pensée...Or, c'est de là que l'on peut se séparer de l'idéalisme et même le refuser totalement.

Car, l'analyse de la penséedécouvre, non pas une pensée avec une certaine modalité, mais une pensée « de quelque chose qui n'est pas elle».

Selon le mot d'Husserl, lequel pourtant est resté dans la perspective idéaliste, e toute conscience est consciencede quelque chose ».

Si ce quelque chose n'est pas une simple modalité de la pensée, mais l'objet, le réel lui-même,en quelque sorte présent sous le mode de connaissance sans doute, mais de connaissance signifiante autre chosequ'elle-même, alors, quel besoin y a-t-il pour la pensée de sortir d'elle-même pour rejoindre cet objet ? Il est vrai lemode de l'union entre l'objet connu et la faculté de connaître demeure mystérieux.

Ce n'est pas une raisonsuffisante pour nier ce double fait qui m'apparaît comme psychologiquement évident : d'une part, je ne suis pas lacouleur que je vois, le son que j'entends ; et d'autre part, cependant, cette couleur, ce son sont en moi d'unecertaine manière comme objet de connaissance.2°) Réserves sur l'application du principe dans le texte.

— En reprenant le texte maintenant, nous pouvons préciserles points où le raisonnement de notre auteur nous paraît tributaire de cette optique erronée que nous venons designaler.a) Tout d'abord, nous ne dirons plus avec Lachelier : « Notre perception devient pour nous un fait vrai...

» Maisnous dirons qu'elle est par elle-même un réel qui s'impose à moi : pas un seul instant je ne commence par unesubjectivité que je transformerais ensuite en objectivité.

Je suis tout de suite dans l'objectif.

Seule une analyse dema con naissance me met en présence du subjectif, du rôle de mes sens dans la connaissance.

Autrement, ce sontdes instruments que j'ignore pour me situer d'emblée et invinciblement dans le monde des objets.b) Dès lors, pourquoi aller chercher, pour connaître l'objet comme objet, la conscience intellectuelle ? C'est vrai quele jugement de réalité est d'ordre intellectuel.

Mais, ce qui est non moins vrai, c'est qu'il n'est que second ; il estl'expression .consciente et seconde du réel.

L'objet se donne d'abord comme objet, avant d'être connu explicitementcomme tel.

Ce n'est pas le jugement de réalité qui fait le réel.

Il le constate seulement. Conclusion.

— Remarquons pour terminer que s'il est vrai, comme le soutient Lachelier, qu' « il n'y a pas pour nousd'existence sans l'action d'une pensée qui la connaît et qui l'affirme », cela n'est vrai que sur le plan de la penséeréfléchie.

C'est pour connaître et analyser dans une certitude réfléchie l'existence du réel que nous ne pouvons nouspasser de la conscience intellectuelle.

Dans la connaissance spontanée et première du réel, l'homme est réaliste etne peut pas ne pas l'être, puisque de par la nature même de sa connaissance, le monde est dès l'origine présent enlui.. »

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