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L'inconscient peut-il être un alibi ?

Publié le 08/03/2005

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(« Introduction à la psychanalyse »). Le but de la cure est donc de faire que le patient, au lieu de subir un conflit dont il n'a pas la maîtrise, puisse prendre conscience de celui-ci. Un conflit qui existe mais n'est pas posé ne peut être résolu. Seule la claire conscience des désirs qui agitent le patient, et des choix qu'il doit faire entre ses désirs et ses normes, peut amener à la guérison. REFOULEMENT : Action par laquelle des pulsions ou désirs inconscients sont arrêtés, par la censure du surmoi, dans leur manifestions conscientes. Supprimer le refoulement conduit à remplacer une censure dont je n'ai pas conscience, par un jugement et un choix conscient : « En amenant l'inconscient dans la conscience, nous supprimons les refoulements [...] nous transformons le conflit pathogène en un conflit normal, qui, d'une manière ou d'une autre, finira bien par être résolu. » Autrement dit, la cure n'a d'autre but que de remplacer chez le patient le ça, l'inconscient, par la conscience. De favoriser le jugement et le choix et d'éliminer un conflit vécu mais ni connu ni maîtrisé. Le psychanalyste n'a donc pas à trancher le conflit à la place de son patient, ni à transformer celui-ci.

Il est fréquent, en justice, de voir des prévenus et leurs défenseurs invoquer des motifs psychologiques ou même psychanalytiques au titre de circonstances atténuantes. Ce criminel aurait eu une enfance malheureuse et difficile... Le libellé, qui demande si pareil recours peut aller jusqu'à l'excuse, n'échappe pas à cette tonalité judiciaire. L'inconscient peut-il me disculper, m'ôter toute responsabilité ? Les forces pulsionnelles de mon psychisme pèsent-elles sur mon agir et donc ma responsabilité ? Si la question se pose, c'est qu'en recourant à l'inconscient on recourt à une théorie déterministe, qui nie la liberté de la pensée et de l'action humaines. Mais n'y a-t-il pas un peu trop de facilité à instrumentaliser ainsi la théorie, à en faire le moyen magique d'échapper à nos responsabilités ? Sartre parlait, à cet égard, de "mauvaise foi". Même en prenant en compte une théorie « dure « de l'inconscient, faut-il conclure que ma pensée et mon action perdent toute liberté ou est-ce que j'en demeure au contraire irréductiblement responsable ?

« Pour Freud , o a surestimé le rôle de la conscience dans la vie de l'âme, et ainsi on s'est privé des moyens : ¨ De comprendre bon nombre de phénomènes comme les lapsus et les rêves ; ¨ De soigner un certain nombre de maladies, qui ne peuvent s'expliquer que par le conflit psychique qui agite lepatient. Adopter l'hypothèse de l'inconscient permet de comprendre et de guérir, c'est un gain de sens et de pouvoir.

Le butde la psychanalyse est alors de faire en sorte que l'individu, au lieu de subir les forces qu'il ignore et ne contrôle pas, puisse recouvrer sa liberté. En effet, la psychanalyse découvre que « Je est un autre » pour reprendre Rimbaud .

Il y a en moi un autre , un ensemble de forces, un inconscient qui me pousse à agir malgré moi.

Je subis un conflit dont je n'ai pas conscience,qui est souvent la trace d'un choc vécu durant l'enfance.

En ce sens je suis un être passif et agi, qui n'a ni lecontrôle de lui-même, ni de son passé, un être scindé.

Le but de la cure est de faire en sorte que je prenneconscience de ce conflit, que je reprenne la maîtrise de mon histoire.

Au lieu de subir ce que je ne connais pas, jechoisirai en toute conscience.

Au lieu de la « politique de l'autruche » de l'inconscient, il y aura le choix d'un sujet maître de lui-même. Enfin, notre passage est important en ce que Freud y explique les résistances à la psychanalyse.

« Dans le cours des siècles, la science a infligé à l'égoïsme naïf de l'humanité deux graves démentis ».

Avec Copernic , elle a montré à l'homme qu'in n'était pas au centre de l'univers.

Avec Darwin , elle est en train de montrer que l'homme est un animal comme les autres, qu'il y a en lui une origine animale. Ces deux sciences ont blessé l'orgueil humain, ont montré à l'homme que son sentiment de supériorité était naïf eterroné.

C'est pourquoi les thèses de Copernic valut un procès à Galilée , devant l'Inquisition en 1633.

C'est pourquoi les thèses de Darwin sont jugées à l'époque scandaleuse.

Les hommes refusent ce qui les blesse et y opposent une farouche résistance.

Or, continue Freud : « Un troisième démenti sera infligé à la mégalomanie humaine par la recherche psychologique de nos jours qui se propose de montrer au moi qu'il n'est seulement pasmaître dans sa propre maison. » L'individu est pluriel : il n'est pas seulement une conscience maîtresse d'elle-même ; il subit un inconscient qui lepousse à agir malgré lui.

Redécouvrir et explorer cette zone d'ombre en nous, cette force qui nous rend passif, cedéchirement de l'homme reste le principal acquis de la psychanalyse. 2.

Même à admettre l'hypothèse, l'inconscient ne fait pas pour autant destin. Lier systématiquement l'hypothèse d'un inconscient à l'abandon possible de nos responsabilités, ce n'est finalementrien d'autre que dévoyer l'esprit de la théorie de l'inconscient.

D'abord parce qu'on n'y peut recourir que pour savoir,pour se connaître, non pour l'instrumentaliser ; ensuite parce que sa valeur tient aussi à ce qu'elle peut nouspermettre de reconquérir notre inconscient, et de guérir peut-être de ce dont nous souffrons. Là où « ça » était, « Je » dois devenir (Freud). Dans la trente et unième des « Nouvelles conférences d'introduction à la psychanalyse » (1932), intitulé « Ladécomposition de la personnalité psychique », Freud décrit le but du traitement psychanalytique par cette formule :« Là où « çà » était, « je » dois devenir », où le « ça » représente l'inconscient.

Il est remarquable que la traductionde la phrase allemande ait prêté à controverses.Pour comprendre l'enjeu de cette phrase, il faut garder à l'esprit que la psychanalyse, avant d'être une discipline,voire une science, est avant tout une thérapie, une façon de guérir des patients.Dans notre texte, Freud affirme « C'est que l'être humain tombe malade en raison du conflit entre les revendicationsde la vie pulsionnelle et la résistance qui s'élève en lui contre elles ».

La maladie provient d'un conflit entre lesnormes « éthiques, esthétiques et sociales » et des désirs qui « semblent remonter d'un véritable enfer ».Or ces désirs censurés ne sont pas plus conscients que la censure elle-même.

Le malade subit donc un combatinterne dont il n'a ni la maîtrise, ni la connaissance : « La psychanalyse entreprend d'élucider ces cas morbidesinquiétants, elle organise de longues et minutieuses recherches, elle se forge des notions de secours et desconstructions scientifiques et, finalement peut dire au moi : « il n'y a rien d'étranger qui se soit introduit en toi,c'est une part de ta propre vie psychique qui s'est soustraite à ta conscience et à la maîtrise de ton vouloir.

»En quoi consiste alors le traitement ? A traduire l'inconscient en conscient : « On ne prête pas assez attention danscette affaire à un point essentiel, à savoir que le conflit pathogène des névrosés n'est pas comparable à une luttenormale que des tendances psychiques se livrent sur le même terrain [...] Il y a lutte entre des forces dontquelques-unes ont atteint la phase du [...] conscient, tandis que les autres n'ont pas dépassé la limite del'inconscient.

C'est pourquoi le conflit ne peut aboutir que lorsque les deux se retrouvent sur le même terrain.

Et jecrois que la seule tâche de la thérapeutique consiste à rendre cette rencontre possible.

» (« Introduction à lapsychanalyse »).Le but de la cure est donc de faire que le patient, au lieu de subir un conflit dont il n'a pas la maîtrise, puisseprendre conscience de celui-ci.

Un conflit qui existe mais n'est pas posé ne peut être résolu.

Seule la claireconscience des désirs qui agitent le patient, et des choix qu'il doit faire entre ses désirs et ses normes, peut amenerà la guérison.. »

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