Devoir de Philosophie

Ma morale est-elle affaire de sentiment ou de raison ?

Publié le 12/03/2005

Extrait du document

morale

- Il paraît difficile cependant d'accepter cette thèse. Si le sentiment et, à plus forte raison, la sensibilité sont insuffisants pour guider notre conduite, à plus forte raison sont-ils incapables de fournir le principe même de l'évaluation. L'évaluation est un jugement et, bien qu'il puisse être, en fait, largement influencé par l'affectivité, le jugement est, en droit, un acte proprement intellectuel et, en tout état de cause, l'affectivité ne saurait le fonder en raison.

B. - Elle le peut encore moins quand il s'agit d'un jugement de valeur.

L'ordre des valeurs est essentiellement normatif. Or, comme l'a fait observer E. BRÉHIER (dans la Revue de Métaphysique et de Morale, juill. 1939, p. 409), « la norme ne dérive pas du sentiment lui-même, mais d'un principe étranger au sentiment et qui, seul, peut le qualifier.

La morale repose sur la sympathie, qui a un rôle directement pratique. C'est ce sentiment et lui seul qui peut régler nos actions. C'est lui qui pousse chaque être à dépasser la sphère de ses intérêts égoïstes. Mais, c'est pure hypothèse de penser que l'homme éprouve naturellement un sentiment moral, une sympathie pour ses semblables. Il n'y a de moralité que là où il y a volonté d'obéir à une loi rationnelle.

  • I) La morale est affaire de sentiment.

a) Le sentiment moral est d'ordre naturel. b) L'intérêt ne détermine pas l'action morale. c) La morale est question d'approbation.

  • II) La morale n'est pas affaire de sentiment.

a) La morale ne préexiste pas à elle-même. b) Il existe une législation universelle. c) Le devoir est fondé en RAISON.

.../...

morale

« « Il est donc bien certain que la pitié est un sentiment naturel qui, modérantdans chaque individu l'activité de l'amour de soi-même, concourt à laconservation mutuelle de toute l'espèce.

C'est elle qui nous porte sansréflexion au secours de ceux que nous voyons souffrir : c'est elle qui, dansl'état de nature, tient lieu de lois, de moeurs et de vertu, avec cet avantageque nul n'est tenté de désobéir à sa douce voix : c'est elle qui détourneratout sauvage robuste d'enlever à un faible enfant, ou à un vieillard infirme, sasubsistance acquise avec peine, si lui-même espère pouvoir trouver la sienneailleurs ; c'est elle qui, au lieu de cette maxime sublime de justice raisonnée,Fais à autrui comme tu veux qu'on te fasse, inspire à tous les hommes cetteautre maxime de bonté naturelle bien moins parfaite, mais plus utile peut-êtreque la précédente, Fais ton bien avec le moindre mal d'autrui qu'il estpossible.

C'est en un mot dans ce sentiment naturel, plutôt que dans desarguments subtils, qu'il faut chercher la cause de la répugnance que touthomme éprouve à mal faire, même indépendamment des maximes del'éducation.

Quoiqu'il puisse appartenir à Socrate et aux esprits de sa trempe,d'acquérir de la vertu par raison, il y a longtemps que le genre humain neserait plus, si sa conservation n'eût dépendu que des raisonnements de ceuxqui le composent.

» Rousseau. MODELE. Dans ce texte, Rousseau fait l'apologie de la pitié.1) La pitié est définie tout d'abord comme le sentiment naturel.2) Puis, la pitié est décrite en ses différentes fonctions.3) Rousseau indique la supériorité de la maxime qu'elle inspire.4) Il ait de cette maxime le fondement de la morale. 1) Dans la forme d'une argumentation qui s'achève (« donc ») Rousseau affirme que « la pitié est un sentimentnaturel ».

On sait que Rousseau opposera constamment ce qui est de l'ordre de la nature et ce qui est de l'ordre dela société (du social, ou du civil).Cette succession historique (supposée) a son équivalent à l'intérieur de l'homme.

Il y a en lui ce qui est de l'ordre dela nature (inné) et ce qui a sa source dans la société (l'acquis).

Rousseau estime que ce qui est de l'ordre dusentiment (la pitié) est déjà là, en l'homme, au niveau de l'homme naturel, et donc premier (et par là mêmeantérieur) à la raison qui, elle, est seconde (et par là même postérieure), de l'ordre de l'homme civilisé.Ainsi, Rousseau, au niveau de l'homme « naturel », distingue-t-il un sentiment égoïste (« l'amour de soi ») et unsentiment altruiste (« la pitié »).

Il les comprend comme antagonistes, et s'équilibrant l'un l'autre (« la pitié [...]modérant dans chaque individu l'activité de l'amour de soi-même »).Sans que Rousseau soit très explicite sur ce point, on peut imaginer que l'amour de soi conduit l'homme au repli etl'éloigne de ses semblables (à moins que l'amour de soi ne le conduise à vouloir imposer sa volonté par la force).

Aucontraire, la pitié nous ouvre vers autrui et conduit à nous rapprocher des autres hommes, nos semblables, nosfrères.

Chacun, éprouvant de la pitié pour l'autre, est enclin à le protéger et à lui porter secours.

Ainsi, la pitiéconcourt-elle « à la conservation mutuelle de l'espèce ». 2) Aussi Rousseau se livre-t-il à une célébration de la pitié, en décrivant ses différentes fonctions.

Plus exactement,il croise les descriptions concrètes avec les fonctions abstraites.

Ainsi la pitié est reliée à la souffrance (« c'est ellequi nous porte [..] au secours de ceux que nous voyons souffrir ») ou bien elle est pensée comme frein à l'injustice(« c'est elle qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à un faible enfant [...] sa subsistance acquise avecpeine »).Mais, à chaque fois, une fonction de la pitié est indiquée : à la suite de la souffrance, Rousseau montre que la pitiéjoue dans l'état de nature le même rôle que la loi joue dans l'état de société (« la pitié tient lieu de lois, de moeurs,et de vertu »).

De même, à la suite de l'injustice, Rousseau montre que la pitié débouche sur une maxime valabledans l'état de nature (« une maxime de bonté naturelle ») autrement plus efficace que la maxime qui a cours dansl'état de société.A chaque fois, la pitié est un sentiment immédiat (« sans réflexion »), à l'opposé de ce que serait une raisonnaissante qui pèserait le pour et le contre, les avantages et les inconvénients.

La pitié s'oppose même à l'instinct.En effet, elle est même capable de nous « détourner » du mouvement instinctuel qui nous ferait prendre ce qui est àportée de main (« c'est elle [la pitié] qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à un faible enfant...

»), instinctpar lequel le fort est tenté d'opprimer le faible.A chaque fois, la pitié est un sentiment qui naît du spectacle d'autrui –à l'opposé de l'amour de soi à qui l'existenced'autrui importe peu.

Tout d'abord par une sorte de sympathie (empathie) devant la souffrance d'autrui (« ceux quenous voyons souffrir »), ressentie vraisemblablement comme une souffrance que nous ressentons dans notre proprecorps.

Le « secours » que nous portons à autrui est un secours que nous porterions spontanément à nous-mêmes.

Iln'est certainement pas ici (ce qui se passera au contraire plus tard avec Bentham) lié à un calcul (plus ou moinsrationnel).En effet, Rousseau indique que ce mouvement de la pitié est « sans réflexion ».

Il n'est possible qu'au prix d'unesympathie universelle où chaque individu est en même temps tous les autres.Si la pitié est un sentiment premier (qui joue pleinement son rôle dès l'état de nature), c'est aussi un sentimentproprement humain, qui s'oppose à l'instinct (naturel lui aussi, mais strictement animal).

Là encore, la pitié inonde. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles