Ne désirons-nous que le bien ?
Publié le 12/02/2019
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Subjective, l’estimation est-elle fiable pour le sujet désirant lui-même ? Cela semble nécessaire, puisque, dans le cas contraire, il cesserait automatiquement de ressentir son désir. Mais, plus précisément, on peut s’interroger sur la permanence de la valeur attribuée à l’objet du désir : ce qui a d’abord été estimé positivement ne peut-il se révéler négatif ?
Les épicuriens, si soucieux de tenir à l’écart tous les motifs de douleur et d’insatisfaction, nous en avertissent : certains plaisirs se transforment rapidement en souffrances. S’ils ont raison - et bon nombre d'exemples simples confirment qu’ils ont raison, à commencer par le trop « bon repas » qui provoque une indigestion -, cela signifie que l'estimation initiale, qui détermine la quête de ce qui peut satisfaire le désir, a été mal faite, trop hâtivement ou superficiellement. Dès lors, il conviendrait, avant de satisfaire le désir, de s’interroger sur la constance de la qualité positive que nous attribuons à son objet.
«
CORRIGÉ
[Introduction] Désirer, c'est chercher une satisfaction qui puisse combler ce que je
ressens comme un «manque>>.
De cc point de vue élémentaire, le désir
apparaît comme signalant un déséquilibre chez celui qui le connaît, et la
satisfaction marquerait son retour à un équilibre, même si ce demier n'est
que momentané.
Il semble alors normal que la satisfaction soit bénéfique,
et qu'elle soit obtenue parce que ce qui était désiré était en principe
«bon>> pour le sujet.
Mais c'est bien Je sujet lui-même qui définit ce qu'il
cherche, et du même coup sa qualité.
On suppose en général que cette
qualité ne peut être que positive, mais son estimation peut sembler fragile
ou mal fondée dans la mesure où elle est subjective.
Si nous ne désirons
que les choses que nous estimons bonnes, il faut tenter de comprendre ce
qui fonde l'estimation, et si la qualité qu'elle affirme a quelque chance de
durer.
[1.
Le désir ne vise que le bien]
Dans Ménon.
Socrate fait admettre à son interlocuteur qu'il est impos
sible que nous désirions des choses que nous jugerions mauvaises.
En
effet, désirer quelque chose, c'est désirer qu'elle advienne.
Or, nous ne
voulons pas subir le maJ, sous quelque aspect que ce soit.
En consé
quence, tout ce que nous désirons doit être classé du côté du « bon >> ou
du «bien ».
On retrouve dans ce passage le postulat platonicien (et socra
tique) selon lequel nul ne peut être méchant volontairement, et l'on
constate que ce caractère « involontaire >> du mal, ou cette « innocence >>
de J'homme dans son surgissement, s'applique, non seulement à ce que la
volonté implique en fait de moralité, mais bien dès le niveau, plus élémen
taire et moins moral, du désir.
On a sans doute intérêt à distinguer le désir de la volonté au sens fort :
le premier ne vise que la satisfaction individuelle, alors que la seconde se
soucie d'autrui.
Le désir, de ce point de vue, est lié à une attitude égoïste,
même s'il est stimulé par le désir de l'autre : une chose me semble sans
doute d'autant plus désirable que je sais qu'elle a déjà suscité le désir
d'un autre: il n'en reste pas moins que la satisfaction que j'attends de sa
possession me conceme en priorité, indépendamment de ce qu'a pu être
(ou de ce que pourrait être) la satisfaction de l'autre.
Désirant, je n'ai en
vue qu'un enrichissement de mon e)(istence.
C'est pourquoi il semble que mon désir ne peut être déterminé que par
des choses que j'estime bonnes.
Cela signifie qu'elles sont bonnes pour
moi, et que c'est en fonction de ma situation actuelle que je les >.
»
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