Ce
changement d'état qui caractérise le devenir interroge donc les rapports entre
l'être et le non-être. Or pour Parménide, seul l'être est, et le néant n'est
pas. La conclusion qui s'impose est que le devenir est impossible. L'être est
ici un et immuable, et c'est sa persistance même qui nous empêche de subir le
devenir.
Le problème est ici que la
réalité du monde physique, toujours changeant et en mouvement, est totalement
remise en question, ce qui semble contradictoire avec l'expérience que nous en
faisons. Platon, avec sa théorie du mélange des genres, semblait proposer une
solution médiane en ce qu'il considérait que le devenir implique le mélange
mutuel de l'être et du non-être, avec comme conséquence qu'une chose ne devient
qu'à partir du moment où elle à la fois identique et différente d'elle-même.
Mais ce mouvement, ce va-et-vient plus que difficile à concevoir que l'on se
place du côté d'Héraclite ou de Parménide, est-il passif ou peut-on penser qu'il
est actif ? En effet, si l'on veut parvenir à accepter l'idée que nous ne
subissons pas le devenir, il faut être en mesure de montrer que nous pouvons
influer sur le mouvement qui nous fait changer.
3- Possibilité d'influer sur
son devenir
Si nous devons en effet nous
réduire à accepter fatalement que nous ne faisons que subir le devenir, de
quelque manière qu'il se manifeste, nous nous retrouvons dans une position guère
plus enviable que celle des choses qui composent la nature. Ne doit-on pas
plutôt voir cette capacité qu'a l'homme de se projeter dans l'avenir la clé qui
lui permet à la fois d'anticiper certains changement et de faire en sorte
d'avoir une certaine maîtrise sur le déroulement des événements qui jalonnent sa
vie ?
A l’instar de tout ce qui est, l’homme est par nature soumis au temps et donc au changement. En effet, il a été, il est et il sera, sans jamais arrêter de passer par de nombreux états différents, tout en ayant plus ou moins conscience de ces évolutions. La question est alors de déterminer dans quelle mesure l’homme subit cette série de changement que l’on appelle le devenir. Plus encore : cette inscription irrémédiable dans une dimension temporelle évolutive est-elle réellement contraignante pour l’homme ? L’est-elle uniquement ? C’est ce que nous allons essayer de déterminer.
1- Devant l’évidence des changements qui ont lieu sur nous ou autour de nous, et face auxquels on se trouve être impuissants, il semblerait dans un premier temps qu’on ne puisse pas échapper au devenir mais qu’au contraire on doive bien le subir.
2- Pourtant, au moment où nous en prenons conscience, le devenir n’est pas. Il semble alors qu’il y ait là un paradoxe de taille : comment reconnaître que l’on subit quelque chose qui n’est pas encore et dont on ne sait rien ?
3- Enfin, il faudra tout de même se demander si, par delà les ambiguïtés qui le caractérisent et en vertu de la possibilité qu’a l’homme de s’y projeter, le devenir n’est pas, finalement, un formidable moteur pour devenir maître de son destin et ne pas subir passivement les événements.