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N'y a-t-il que le présent qui soit estimable ?

Publié le 11/02/2011

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I. ANALYSE DU SUJET. CONSEILS. REMARQUES DE MÉTHODE    • Ce sujet, très classique, fait appel à vos connaissances sur le concept de temps, à travers les dimensions du passé, du présent et du futur.    • Distinguez bien les deux sens du mot « présent « :    - le présent, instant fugitif entre passé et futur    - le présent, en tant que durée    • L'intitulé du sujet pose ainsi le problème de la possibilité réelle de séparer passé, présent et futur, eu égard à l'identité même du moi.    • Le plan sera ici de type dialectique :    - Thèse : le présent est seul digne d'estime;    - Antithèse : le passé et le futur sont, au moins autant que le présent, dignes d'estime;    - Synthèse : ces trois moments du temps forment notre moi et sont donc tous dignes d'estime.   

« souvent valorisé.

Ainsi en est-il du présent en la première acception de ce terme, c'est-à-dire comme instant etmoment idéal, comme limite fragile entre le passé et l'avenir.

Chaque instant ne possède-t-il pas une qualité digned'être retenue et goûtée dans sa plénitude et sa densité? On peut songer ici au Gide des Nourritures terrestres, àson appel à la joie de l'instant.

Nos désirs changeants, multiples, doivent ainsi, sans être enchaînés par unesuccession temporelle contraignante, trouver satisfaction.

Seul alors vaut le présent, mobilité des sensations,jouissance éphémère et toujours renouvelée.

Mais on peut également, quand on parle du privilège du présent conçucomme instant, penser au stade esthétique de Kierkegaard, stade du désir immédiat et de la jouissance.

Ainsi DonJuan (celui de Mozart) est-il, aux yeux de Kierkegaard, l'être de l'instant, du désir, du présent seul digne d'êtreretenu, de la jouissance immédiate répudiant et bannissant toute fidélité qui aliène au passé. Ainsi seul l'instant semble digne d'estime.

L'instant présent, c'est la beauté de la sensation immédiate, l'explosion dudésir fuyant.

Le passé nous lie et nous fige.

Le futur est inquiétant parce qu'il contient notre mort.

Dès lors, carpediem ! jouis du moment présent et de l'instant qui passe...

Telle semble être la leçon qui se dégage de l'examen duprécaire temps humain.

Dans cette hypothèse, seul le présent semble digne d'être retenu et estimé. Mais le présent peut aussi solliciter notre attention et mériter notre estime non plus comme fragile instant, non-pluscomme moment fugitif du plaisir ou de la joie, mais comme durée empiétant sur mon passé et mon futur, commeépaisseur actuelle du vécu.

Ainsi pensait Montaigne.

En effet, la vie de l'insensé se porte tout entière vers l'avenir.Il se dirige béant vers les réalités inconnues, celles à venir.

Au lieu de jouir, il se détourne du présent, seul digned'être estimé.

Mais que fait-il alors? Il échange le vrai, l'authentique existence, contre un fantôme illusoire, contreune image vaine et inconsistante.

Le présent, c'est la durée, le fruit qu'il faut cueillir.

Ainsi, répète Montaigne sansarrêt, il faut jouir du présent, de la durée actuelle, non point se jeter dans l'imagination creuse de l'avenir nipoursuivre quelque chimère, ou quelque ombre.

Le présent, aux yeux de Montaigne, c'est la durée, la présence, cequi est offert dans sa densité et sa réalité à la conscience du sujet.

A cette densité du présent s'oppose lecaractère impalpable de l'avenir.

Ainsi l'insensé existe-t-il dans la non coïncidence avec soi et néglige-t-il le présentpour se faire conscience malheureuse.

Il poursuit, dans l'inquiétude, un avenir qui n'est qu'un vain fantôme et qu'unechimère.

Le présent, loin d'être une poussière d'instants, est le lieu de la plénitude, il représente une duréeconcrète.

«Vivre est chose exclusivement présente ». Ainsi seul l'acte présent de vivre semble-t-il digne d'estime et devoir être retenu.

Seul il est une valeur et incarne lavaleur.

La sagesse consiste à vivre au présent.

Au contraire, l'insensé confère aux autres dimensions temporellesune densité et une épaisseur qu'elles ne sauraient avoir.

Le vrai présent, c'est l'acte du présent, l'acte de se faireheureux en échappant au précaire avenir. Si cette conception semble retenir ce qu'il y a de plus dense et de plus concret dans notre existence, si elle paraîtrépudier et repousser les tentations de la conscience malheureuse, néanmoins il est permis de s'interroger sur lesprésupposés de cette vision et de la soumettre au soupçon. B) Critique et antithèse Cette vision d'un présent concret, lieu non seulement de mon plaisir, mais de ma joie, s'opposant aux vaines imagesdu passé et du futur, véritable présence de mon être qui se ramasse en lui-même et se rassemble au lieu de seperdre et de s'égarer en d'inconsistants fantômes, cette vision peut être remise en question.

Non il n'y a pas que leprésent qui soit digne d'estime et qui représente une valeur. Car le présent, s'il est instant (première conception) se révèle bien décevant.

Pris dans la poussière et l'émiettementde l'immédiat, notre moi se perd dans trop de possibles, il s'égare en eux, sans pouvoir précisément se rassembler.C'est ce qu'a remarquablement souligné Kierkegaard : le moi de « l'esthéticien », celui qui expérimente tous lespossibles et préfère infiniment le présent instantané à la temporalité unifiée, ce moi n'est que désespoir etsouffrance.

L'âme de l'esthéticien est comme un désert aride, une mélancolie incurable le mine : le présent - conçucomme instant - n'a pas une valeur et ne saurait être considéré comme digne d'estime en tant que tel. Mais qu'en est-il alors du présent conçu comme durée, ce présent qui semble dessiner la vie concrète etsubstantielle, ce présent vers lequel Montaigne se tournait pour construire une sagesse? Ce présent - notons-le -se passéifie sans cesse.

Il n'existe pas en tant que tel, il s'irréalise et se transforme en passé.

Par conséquent, il y aen lui un aspect fantomatique et une dimension d'irréalité tout aussi remarquables qu'en ce qui concerne le passé etle futur : sa vérité concrète et actuelle n'est peut-être bien qu'une illusion.

Dès lors, il n'y a pas davantage d'êtreen lui que dans les autres dimensions temporelles et il n'est nulle raison de le considérer comme plus digne d'estimeet de valeur que le passé et l'avenir. Mais il faut aller plus loin et découvrir dans le passé, mais aussi dans le futur, des dimensions authentiques sanslesquelles aucun être humain ne saurait se construire.

Examinons chacune de ces deux dimensions sous son aspectpositif et digne d'être retenu.

Le passé, tout d'abord : il représente le temps écoulé, dans son irréversibilité, tempsqui se situe par rapport au présent et à l'avenir dont il est corrélatif.

Or le passé possède de multiples fonctions etdans le psychisme individuel et dans la mémoire collective.

Loin d'être le réservoir de ce qui est mort, il estprofondément utile à la vie et permet à l'homme de s'orienter lucidement dans l'existence.

Se tourner soit vers sonpassé, soit vers le passé de l'humanité, permet de mieux s'identifier et de mieux comprendre le présent et l'actuel.Que serait un peuple qui oublierait son passé et son histoire? Ce serait un peuple mort, coupé de ses racines et de. »

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