Peut-on définir la pensée par la seule conscience ?
Publié le 12/12/2005
Extrait du document
La première thèse assimile la pensée (cogitatio)
à l'esprit (mens) et sert à établir le dualisme : nos pensées ne peuvent
pas être identiques à des états de notre corps, parce que nous ne pouvons pas
concevoir clairement et distinctement qu'elles le soient. L'esprit est donc une
chose (une substance) essentiellement distincte du corps, dont la pensée est
l'attribut principal et dont les diverses pensées sont des modes. La seconde
thèse assimile la pensée à la conscience - ou tout au moins à tout ce qui est
susceptible d'être conscient - et donne à la notion de pensée son extension
maximale : celle-ci recouvre non seulement les « attitudes propositionnelles »,
mais également les sensations (cf. Principes de la philosophie, I,
9).
La marque distinctive de la conception cartésienne est donc que, d'une part,
elle étend à l'ensemble de ce que nous avons appelé les pensées les
caractéristiques des sensations et des expériences et, d'autre part, elle tend à
assimiler les contenus d'attitudes propositionnelles à des pensées
potentiellement réflexives : penser, ce n'est pas nécessairement penser qu'on
pense, mais c'est au moins être en mesure de le faire. On dit souvent que les
pensées sont, selon cette conception, essentiellement « privées » : leur
existence et leur nature dépendent du sujet qui les pense (les cogitationes
reposent sur le cogito). Nul autre que moi ne peut accéder au contenu de mes
propres pensées et le vérifier (c'est pourquoi l'âme, ou l'esprit, est toujours
plus « facile » à connaître que le corps, et les contenus des autres esprits
moins accessibles que les contenus de notre esprit). Il s'ensuit que j'ai
toujours une autorité ou un « accès privilégié » à ces pensées, qui les rend à
la fois transparentes et indubitables, et susceptibles d'être l'objet d'une
attention et d'une réflexion particulières.
3) L'intrication de la pensée et de la
conscience ?
Quand on se demande ce qu'est la pensée et si on peut l'attribuer à des
créatures autres que les humains, comme les animaux et les ordinateurs, on ne
pose donc pas nécessairement la même question, selon qu'il s'agit de la pensée
au sens large d'une « attitude propositionnelle » ou de la pensée au sens étroit
d'une activité consciente et réfléchie, et la réponse varie : nous sommes en
général plus disposés à attribuer aux humains la seconde, et peut- être à
attribuer aux animaux et aux ordinateurs seulement la première.
Il est difficile de réduire la pensée à la conscience, la pensée ne réduit pas à la présence de celle-ci à l’esprit, elle comporte aussi des opérations parfois assimilables à un calcul à une procédure qui a une finalité. Aussi, la multiplicité des objets, des visées auxquelles peut s’appliquer la pensée peut difficilement nous permettre de réduire la pensée à la seule conscience. Mais peut-on dissocier réellement la pensée de la conscience ?
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