Peut-on être heureux sans désirer ?
Publié le 27/02/2008
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«
successeurs d'Alexandre le Grand.La « Lettre à Ménécée » est une description de la méthode apte à nous procurer le bonheur .
Car si tous les hommes cherchent le bonheur , ils sont, selon le mot d'Aristote, comme des archers qui ne savent pas où est la cible, incapables de la définir et de l'atteindre.Epicure commence par expliquer que nous n'avons rien à redouter des dieux, vivants bienheureux qui ne se soucient pas des hommes, et que la mort n'est rien pour nous.
Débarrassés du souci du jugement divin et de la survie del'âme, nous sommes alors aptes à bien vivre notre vie présente.
Bien vivre notre existence veut dire parvenir aubonheur ici-bas, et cela n'est possible que par un bon usage des plaisirs et des désirs. L'homme est un être de désir, et selon qu'il parvient ou échoue à satisfaire ses désirs, il est heureux ou misérable.Or, le bonheur est d'abord l'absence de souffrance physique ou psychologique.
C'est pourquoi Épicure déclare : « Une théorie non erronée des désirs sait rapporter tout choix à la santé du corps et à la tranquillité de l'âme puisquec'est là la perfection même de la vie heureuse.
Car tous nos actes visent à écarter la souffrance et la peur.
»Eprouver du plaisir, c'est d'abord combler un manque : boire quand on a soif, se rassurer quand on a peur.
En soi, unplaisir est toujours bon, une souffrance, un désir non comblé, toujours mauvais.Ainsi Epicure nous incite à classer nos désirs, et à adopter face à eux une stratégie telle que nous serons facilement comblés et rarement insatisfaits.Il y a d'abord les désirs naturels (dont certains sont naturels et nécessaires et d'autres seulement naturels) ; etensuite les désirs vains.
Les désirs naturels et nécessaires comprennent tous les désirs tels que, s'ils ne sont passatisfaits, nous mourons (boire, manger, dormir).
Les désirs seulement naturels peuvent être le désir de manger telou tel plat, ou encore le désir sexuel, etc.Mais il importe de comprendre qu'il y a des désirs vains ; désir de richesse, de gloire, d'immortalité, etc.
Ces désirsont une particularité importante ; ils sont insatiables, illimités, ils n'ont jamais de fin.Quand je connais un désir naturel, il cesse d'être dès qu'il est satisfait.
Une fois que j'ai mangé, je n'ai plus faim.
Cesplaisirs sont naturels parce qu'ils sont bornés : ils ont une limite naturelle.
A l'inverse, les désirs non naturelspeuvent être dits vains parce qu'ils ne seront jamais comblés ; ils résident dans le principe du « toujours plus »,l'illimité.
L'homme qui veut être riche, admiré, aimé, n'en a jamais fini de son désir.Il est facile de comprendre que si je veux parvenir au bonheur , à la santé du corps et à la tranquillité de l'âme, je dois éliminer les désirs vains.
Le plaisir naît de ce qu'un désir est comblé.
Mais les désirs vains sont par définitionillimités.
Le plaisir que leur satisfaction procure est illusoire et ne sert qu'à les relancer.
A peine comblé, je veuxautre chose, je veux plus ; je ne cesse de désirer, donc de manquer, donc de souffrir.
L'homme des désirs vains, du« toujours plus », Platon le comparait déjà à un panier percé ; se condamner à ne jamais être comblé.La première et principale leçon d'Épicure est donc celle-ci : ne pas céder aux désirs vains ; se contenter des désirsnaturels.
Vivre en accord avec la nature consiste d'abord à ne pas céder au vertiges des désirs illusoires.
Épicure lesnomme vains, notre époque parlerait d'une course à la consommation.Il y a plus.
Certes tout plaisir est un bien en soi.
Mais certains plaisirs peuvent se révéler nuisibles.
Certes toutesouffrance est un mal, mais endurer certaines douleurs peut se révéler utile.
Il ne faut pas rechercher tout plaisir, nifuir toute douleur : il faut savoir raisonner, calculer les conséquences.
Il ne faut pas céder à l'attrait de l'immédiat,mais avoir une certaine intelligence du plaisir.
On voit que nous sommes loin de l'image du « bon vivant », de celuiqui jouit de façon primaire de tous les plaisirs qui s'offrent à lui.Epicure va même jusqu'à prôner une certaine austérité.
Il faut dit-il « savoir se suffire à soi-même » ; cela veut dire savoir se contenter de peu.
Car « Tout ce qui est naturel est aisé à se procurer, mais tout ce qui est vain estdifficile à avoir.
»L'habitude de vivre simplement met à l'abri des coups du sort, tandis que l'habitude de vivre richement y rend plusvulnérable.
De plus l'habitude, par exemple, d'une bonne table, de mets précieux, transforme ce qui était au départun plaisir (manger tel plat raffiné) en habitude voire en besoin.
Privé de ce superflu dont je me suis rendudépendant, je vais en souffrir par ma propre faute.
Par contre, le sage épicurien se réjouira d'une table somptueuse,mais ne souffrira pas de son absence ; car il a compris que ce n'est pas l'objet qui crée le plaisir, mais la cessationdu désir, du manque.
Naturellement, ce n'est pas tel grand vin qui me fait plaisir, mais de ne plus avoir soif.S'habituer aux grands crus, c'est se condamner et à y trouver moins de plaisir, et à souffrir si pour une raison oupour une autre on ne peut plus s'offrir ce produit et à ne plus être capable d'apprécier une boisson plus « ordinaire».Ce souci d'autarcie, d'une vie simple qui nous rende le plus indépendant possible du hasard, des coups du sort, desautres, s'explique en partie par l'époque troublée, instable pendant laquelle Epicure écrit ; une époque où les solidarités traditionnelles de la cité grecque se défont, où la politique est instable, où l'économie ne l'est pas moins.Mais cela n'invalide en rien le raisonnement d' Epicure , lequel dément l'interprétation déjà présente à son époque de sa doctrine : « Quand nous disons que le plaisir est notre but ultime, nous n'entendons pas par là le plaisir desdébauchés ni ceux qui se rattachent à la jouissance matérielle, ainsi que le disent ceux qui ignorent notre doctrine,ou qui sont en désaccord avec elle ou qui l'interprètent dans un mauvais sens.
Le plaisir que nous avons en vue estcaractérisé par l'absence de souffrances corporelles et de troubles de l'âme.
Ce ne sont pas les beuveries et lesorgies continuelles des jeunes garçons et des femmes, les poissons et les autres mets qu'offre une table luxueuse,qui engendrent la vie heureuse, mais la raison vigilante qui recherche minutieusement les motifs de ce qu'il fautrechercher ou éviter, et qui rejette les vaines opinions grâce auxquelles le plus grand trouble s'empare de l'âme.
»
Ceux qui vivent en cédant à l'attrait du plaisir immédiat, qui cultivent les désirs vains, qui accordent une importanceextrême aux objets de leurs désirs, ceux-là n'ont rien compris au plaisir, et se condamnent à la souffrance.La vraie philosophie du plaisir est celle, apparemment austère, d' Epicure .
Celle qui prône le plaisir, mais guidé par la raison vigilante.
Si le véritable épicurisme semble austère, proche de l'ascétisme, on conclura par une sentenced'Epicure : « Dans les autres occupations, une fois qu'elles ont été menées à bien avec peine, vient le fruit ; mais,.
»
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