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Peut-on opposer créer et produire ?

Publié le 19/12/2005

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Au sens large et courant, «produire«, c'est «faire exister (ce qui n'existe pas encore« (Petit Robert). «Produire« est donc très souvent, dans nombre d' expressions, à peu près synonyme de «créer«. Toutefois on oppose également fréquemment ces deux termes. Par exemple, on oppose la «production«, entendue comme quelque chose de mécanique, à la «création« entendue comme invention artistique. Mais d'autres oppositions sont possibles. La réflexion pourra se borner à creuser seulement l' une d' elles ou en examiner plusieurs, successivement ou simultanément. Et puisque l'on demande simplement si on peut opposer produire et créer, il n' est pas interdit de chercher des oppositions originales, que l'on définira soi-même. Introduction Nous employons souvent «créer« et «produire« comme des synonymes. Nous dirons ainsi qu'un événement historique a créé ou produit une situation nouvelle, qu'un auteur a produit ou créé une oeuvre, que le travail produit ou crée des richesses, etc. Cependant, nous ne dirons jamais qu'un arbre a créé un fruit, mais qu'il l'a produit. Il semble donc que l'on puisse introduire quelques différences entre produire et créer. Essayons de déterminer lesquelles


« du besoin.

C'est pourquoi Marx, lecteur de Hegel, a pu poser le travail comme étant l'essence même de l'homme (cf. Manuscrits de 1844).

Le travail humain, nous dit Marx, se distingue de laproduction animal dans la mesure où l'animal ne produit que sous l'empire dubesoin, tandis que l'homme ne travaille véritablement et pleinement quelorsqu'il est libéré du besoin.

C'est pourquoi dans le travail chaque hommepeut s'affirmer librement lui-même en même temps qu'il affirme l'essence del'homme en général.

Car si dans mon travail j'objective «ma production, monindividualité, sa particularité», dans la jouissance qu'autrui aura du fruit demon travail, je jouis «d'avoir objectivé l'essence de l'homme, donc d'avoirprocuré l'objet qui, lui, convenait aux besoins d'un autre être humain».

Ainsi jeconfirme et réalise directement dans mon activité individuelle «mon essencevraie, mon essence humaine, mon essence sociale».

Dans le travail créateurl'homme se reconnaît donc pleinement, à la fois comme individu et commeêtre social. • Le travail aliéné, simple productionCependant la positivité du travail, dans lequel l'homme s'autoréalise ets'enrichit, peut se transformer en négativité et en appauvrissement.

En effet,Marx y a insisté, lorsque le travail n'est une simple simple nécessité physiqueimposée au travailleur pour assurer ses besoins vitaux, il devientessentiellement une peine.

Alors l'homme ne peut plus se reconnaître dans untravail qui ne fait plus appel au)forces essentielles, à l'intelligence et àl'originalité de l'individu.

Parce qu'il n'est pas libre, parce qu'il ne répond plus à une volonté et une intention du travailleur, ce travail est exécuté comme mécaniquement et ses productions nesont en effet que des productions, non pas des créations.b) Production technique et création artistiqueEnfin, on peut utiliser la distinction entre «créer» et «produire» pour distinguer l'art (au sens restreint de productionde belles oeuvres) de la technique.

On parlera alors de «création artistique» et de «production technique».

Onpourra notamment fonder une telle distinction en faisant de la création artistique l'oeuvre du génie : c'est la thèsede Kant (pour son exposition cf.

sujet n° 10), reprise sous une autre forme par Alain, qui écrit : « Toutes les foisque l'idée précède et règle l'exécution, c'est l'industrie.

Et encore est-il vrai que l'oeuvre souvent, même dansl'industrie, redresse l'idée en ce sens que l'artisan trouve mieux qu'il n'avait pensé dès qu'il essaye ; en cela il estartiste, mais par éclairs.

Toujours est-il que la représentation d'une idée dans la chose, je dis même d'une idée biendéfinie comme le dessin d'une maison, est une oeuvre mécanique seulement, en ce sens qu'une machine bien régléed'abord ferait l'oeuvre à mille exemplaires.

Pensons maintenant au travail du peintre de portrait ; il est clair qu'il nepeut avoir le projet de toutes les couleurs qu'il emploiera à l'oeuvre qu'il commence ; l'idée lui vient à mesure qu'ilfait ; il serait même plus rigoureux de dire que l'idée lui vient ensuite, comme au spectateur, et qu'il est spectateuraussi de son oeuvre en train de naître.

Et c'est là le propre de l'artiste..

(Système des Beaux-Arts, I, 8.) ConclusionIl est possible d'opposer de multiples manières «produire» et «créer».

Mais toutes ces oppositions s'articulent alorsautour d'une distinction fondamentale : la création est une production qui relève d'un sujet libre, c'est-à-dire d'uneintelligence produisant volontairement et de manière désintéressée, parce que dégagée de la nécessité comme dubesoin.. »

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