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Peut-on partager des intérêts ?

Publié le 03/09/2012

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Le premier enjeu est que cette construction est le seul moyen pour les hommes de prendre véritablement en charge leur destin, ce qui est en jeu est le sens même de la politique. Parce que au fond, il n’y a de politique que là où une liberté s’exerce collectivement pour définir les conditions de la vie commune. Lorsque cette liberté décline, lorsque elle déserte l’espace commun pour trouver refuge dans l’individu, on assiste inévitablement à un retrait du politique. Exemple en Grèce après le 5°après JC avec le déclin de la cité. Déclin à cause des guerres du Péloponnèse qui divisent les grecs et imposent une tyrannie à Athènes et aussi à cause de l’envahissement de la Grèce par les Macédoniens. La liberté n’est alors vécue par les individus comme quelque chose d’individuel et non plus politique. Ce retrait du politique est aussi observable dans le monde contemporain où l’économie de marché devient triomphante et impose ses lois de manière aussi implacable que la nature impose les siennes et où l’ordre qu’elle engendre est considéré comme sans alternative et qui opère donc à la manière du destin. La tentation est d’abandonner aux puissances du marché la maitrise de notre monde pour ne plus exercer notre liberté que dans l’espace clos des jouissances privées. Mais alors le commun nous échappe et avec lui la maitrise de notre devenir. Alors quel est le sens du politique, de l’action politique ? Permettre aux hommes de récupérer la maitrise de l’ordre humain et de le construire en produisant les figures du commun (les formes de la vie commune). Le second enjeu est qu’elle permet à l’individu de sortir de cet état de solitude qui ne convient qu’aux dieux et aux brutes (Aristote). Les choses communes deviennent le centre d’une relation à travers laquelle l’individu réalise sa propre humanité dans le rapport aux autres. Cette relation, Aristote la définie sous la figure de l’amitié qui consiste dans une mise en commun (Ethique à Nicomaque). Il observe que les dieux n’ont pas d’amis car se suffisent entièrement à eux-mêmes (existence autarcique). Les brutes n’ont pas d’amis car n’ont pas le sentiment de leur propre insuffisance. Mais l’homme a besoin d’amis et ne peut s’accomplir lui-même que dans la relation a l’autre, relation dont l’amitié est le paradigme repose sur une mise en commun. Cette mise en commun est essentielle : « personne ne choisirait de posséder tous les biens de ce monde pour en jouir seul «. Dans une telle jouissance solitaire, l’homme serait comme amputé d’une partie de lui-même et privé d’un bien dont la valeur est inestimable, celui que procure l’amitié. La plus parfaite autarcie, quand il s’agit de l’homme, trouve son insuffisance dans sa propre perfection. 

« un mythe car pour D « là ou l'intérêt règne seul comme rien ne vient réfréner les égoïsmes en présence, chaque moi se trouve vis à vis de l'autre sur le pied de guerre.Et toute trêve à cette éternelle antagonisme ne serait être de longue durée.

».concluons donc en disant que si les intérêts divisent et opposent les H, ils ne peuvent en aucune manière faire l'objet d'un partage et par conséquent servir de base àl'organisation de la vie commune et à la construction des liens sociaux.TRANSITIONil y a un pb : si les intérêts se rattachent à la recherche de ce qui est avantageux, il apparaît que rien ne paraît plus préjudiciable aux intérêts que le conflit/la discordeet la guerre.

Autrement dit rien n'est plus contraire à l'intérêt des intérêts que leur propre opposition.

Contradiction : si l'on fait de l'intérêt une source de division alorsil faudrait admettre que l'intérêt ne peut poursuivre sa propre fin qu'en créant des conditions qui sont contraires à la fin qu'il poursuit.

Mais alors l'intérêt est animépar une logique autodestructrice qui le rend parfaitement inintelligible.

Il est incompréhensible que les H, mus par leurs intérêts, agissent d'une manière qui va àl'encontre de ces intérêts.

Par conséquent, ou bien on maintient que les intérêts opposent les H mais cela signifie qu'on ne peut plus rattacher à la notion d'intérêt larecherche de ce qui est avantageux, or c'est là la définition.

OU BIEN, les intérêts sont effectivement liés à la recherche de l'utile et alors ils devraient former aucontraire un principe de cohésion.

Il est dans l'intérêt des intérêts que les H s'unissent plutôt que de se diviser.

Dans ces conditions, ne peut on pas envisager lapossibilité d'une convergence des intérêts c-a-d la possibilité pour les intérêts particuliers de s'articuler les uns aux autres sous l'idée d'un intérêt commun. II.

Il est possible de partager des intérêtsQue les intérêts rassemblent plutôt qu'ils ne divisent, c'est ce que suggérait déjà Platon dans la République.

Ce qu'il nous dit c'est que les besoins et intérêtsindividuels ne peuvent être satisfaits que dans le cadre d'une communauté où la complémentarité des métiers répond à la diversité des besoins.

Le fondement de lasociété c'est pour P le besoin économique.

Nos intérêts ne peuvent alors n'être que satisfait que dans le cadre d'une société.

Le partage des intérêts ne peut doncs'effectuer que dans un contexte social de production où l'activité des uns répond aux besoins des autres et réciproquement.

La cité que décrit P c'est la cité del'harmonie parfaite des intérêts dans laquelle le partage pe entendu en 2 sens à la fois sous la forme d'une répartition des tâches et sous forme d'une participation dechacun à l'oeuvre de tous.

Et s'il y a partage des intérêts c'est au sens où l'intérêt de chaque individu est ordonné à l'intérêt du tout.L'individu ne produit pas pour son compte exclusivement.

Il produit pour les autres et chacun produisant pour tous, recevra en échange le produit du travail desautres.

Il s'agit donc de faire correspondre à la diversité des besoins, une multiplicité de métiers complémentaires.

L'intérêt que nous partageons concerne cettecorrespondance et il implique que les individus agissent les uns pour les autres dans un rapport d'inter-dépendance organique où l'intérêt des parties est subornée àl'intérêt du tout.

Cette subordination se traduit dans le texte de P dans l'idée que chacun doit se cantonne rigoureusement à la fonction spécialisée qui caractérise sonmétier.En arrière plan de l'analyse de P il y a bien évidemment un modèle organissiste de la société qui pose la prévalence du tout sur les parties.

Mais ne pourrait on pasenvisager que l'intérêt du tout procède de l'intérêt des parties, c-a-d de l'intérêt de chaque individu ? N'est il pas possible de déduire l'idée d'un accord ou d'un partagedes intérêts d'une analyse de ce qu'est l'intérêt individuel ? Cela suppose de reconsidérer la notion d'intérêt en la différenciant de ce qui en l'H est véritablementsource d'opposition : les passions.

C'est précisément ce que suggère Spinoza dans l'Ethique : « en tant que les H sont dominés par des sentiments qui sont despassions, ils peuvent s'opposer les uns aux autres ».

Le véritable moteur de l'insociabilité sont les passions. Montesquieu dans l'esprit des lois remarque la dissociation entre intérêt et passion « il est heureux pour les hommes d'être dans une situation où pendant que leurspassions leur inspirent la pensée d'être méchant ils ont pourtant intérêt de ne pas l'être ».

les hommes s'opposent en tant qu'ils sont animés par des passions et non pasen tant qu'ils poursuivent leurs intérêts, bien plus, la considération de l'intérêt est ce qui doit conduire les hommes à maitriser leurs passions.

Hirschman, Les passionset les intérêts sur la naissance du capitalisme, il souligne que l'intérêt est un élément clef d'une stratégie de neutralisation des passions.

Le problème est comment fairepour que les hommes s'accordent les uns avec les autres dès lors qu'ils sont aminés par des passions qui les poussent à s'opposer ?Réponse traditionnelle de type politique, en terme de contrainte et de coercition : il faut un pouvoir fort, capable de susciter la crainte et de conduire les hommes às'accorder malgré eux Hobbes (17°).

Les passions doivent jouer les unes contre les autres : aux passions qui conduisent les hommes à s'entre-détruire on oppose unepassion dont la force l'emportera sur toutes les autres et qui amènent les hommes à s'accorder pour se concerter.

Cette passion est la peur de la mort, la crainte de lamort violente.

Cette peur de la mort doit être suscité par un pouvoir absolu, pouvoir de donner la mort (pouvoir du Léviathan).

On ne sort cependant pas du cadrepassionnel, on ne fait que faire jouer les passions entre elles.Avec l'avènement du capitalisme, un autre type de réponse apparaît et s'organise autour du « paradigme de l'intérêt » (Hirschmann).

Il s'agit de solliciter en chacun unnouveau type de motivation centrée sur la considération du profit et l'amour du gain.

Il permet de surmonter l'opposition traditionnelle entre la raison et les passions,il parvient à conjuguer la passionnel et le rationnel : le passionnel et le rationnel sont dans les intérêts.

L'intérêt permet donc de sortir de la puissance aveugle despassions et de la lucidité d'une raison sans force.

L'intérêt va emprunter à la passion son énergie, à la raison sa clairvoyance.

C'est pourquoi Hirschmann écrit« l'intérêt est censé participer de ce qu'il y a de meilleur dans chacun des 2 types : on reconnaît en lui, à la fois, la passion de l'amour de soi anobli et maitrisé par laraison et la rasions orientée et aminée par l'amour de soi ».

Dans l'intérêt la passion et la raison sont réconciliées ; la raison déploie son activité sous la forme decalculs.

On voit donc que ce qui constitue la configuration propre de l'intérêt est l'articulation entre un élément passionnel (l'amour de soi c'est-à-dire ce qui poussel'homme à parvenir à ses besoins, à se conserver) et un élément rationnel (élément de calcul).

Régularité de la constance et de la prévisibilité.

Alors une conditionmenée par l'intérêt paraitra beaucoup plus fiable qu'une conduite dominée par des passions.

L'avantage de l'intérêt est donc l'introduction de la stabilité là où lespassions génèrent du désordre et ainsi le contraste entre intérêt et passion est celui entre uniformité de la conduite régie par le calcul des avantages et des profits etirrégularité du comportement imprévisible et toujours excessif.

Le constat de cette opposition (uniformité et irrégularité) doit être relayé par une stratégie deremplacement c'est-à-dire par la définition d'une nouvelle normativité centrée sur les intérêts.

Passion dont on attend qu'elle libère l'homme de ses passions estl'amour du bien et le désir de l'enrichissement, qu'Hirschmann appelle une passion paisible.

Il s'agit d'une passion paisible en ce qu'elle est affranchie des désordres,de l'instabilité propre au patient, elle implique une conduite avisée, calculatrice et prudente et porte donc en elle un élément de calme, de tranquillité, d'assurance.C'est aussi une passion paisible car génératrice de paix, par son moyen, les hommes sont conduits à s'accorder, à collaborer.

Le commerce est l'activité qui permet ledéveloppement de cette passion : Hume le commerce a pour conséquence infaillible « de faire prévaloir l'amour du bien sur l'amour du plaisir » (Discours Politiques).Cet amour du gain qui pour la pensée économie est la passion raisonnée par excellence engendre des effets positifs sur le plan individuel comme collectif.L'amour du gain suscite en l'homme la frugalité en supprimant, en atténuant l'amour du plaisir et de la dépense.

Si l'amour du plaisir porte à l'excès, à la démesure,l'amour du gain au contraire porte à la frugalité, incite à l'économie et pondère la conduite des hommes : Montesquieu « l'esprit de commerce entraine avec soi celuide frugalité, d'économie, de modération, de travail, de sagesse, de tranquillité, d'ordre et de règles ».

L'intérêt qui est au cœur de l'esprit de commerce sera donccompris comme un principe capable de régler des comportements, d'introduire mesure et retenue là où les passions introduisent de l'excès et de la démesure.

L'intérêtdevient dès la fin du 16°, le principe d'une nouvelle conception de l'activité productive et notamment du travail, de manière schématique, on passe d'une conceptionpénitentielle du travail à une conception lucrative.

Le travail cesse d'être pensé sous le régime pénitentiel de la faute et du châtiment pour être pensé sous l'ordrelucratif de la production de richesse.

Le travail devient alors un facteur essentiel de progrès et d'enrichissement.Enfin, l'intérêt conduit à poser la relation d'échange comme la forme la plus avantageuse du rapport à autrui.

Parce que c'est autour de la relation d'échange que va secristalliser la convergence des intérêts, qui permet à chacun de satisfaire ses intérêts propres tout en favorisant ceux des autres.En résumé, l'intérêt participe au remodelage des conduites humaines en substituant aux passions destructrices l'amour de soi éclairé par la raison.

D'autre part, ilparticipe à la revalorisation du travail et de l'activité de production perçus comme sources d'enrichissement et de prospérité pour tous.

Enfin, il participe à l'expansiondes relations d'échanges qui servent simultanément les intérêts les plus divers.Or si l'intérêt peut jouer un tel rôle, n'est-ce pas parce que il est l'expression la plus fondamentale de notre nature ? C'est-à-dire si la conduite selon les intérêts peutavoir la régularité, la constance, l'universalité qu'on lui prête, n'est-ce pas car elle est immanente à notre nature, touche à ce que nous sommes ?Penser la recherche de l'utile, l'intérêt, comme une expression fondamentale de notre nature est une des thèses essentielles de Spinoza.

Considérons les hommes telsqu'ils sont et non pas tels que nous voudrions qu'ils soient et nous comprendrons que les hommes n'agissent jamais que par intérêt.

Le principe déterminant de laconduite humaine est le conatus (la volonté première de persévérer dans son être).

Dans Ethique 3° partie proposition 6 : « chaque chose selon sa puissance d'êtres'efforce de persévérer dans son être ».

cet effort correspond à une loi interne à la nature des êtres, qui les portent à ce conserver mais aussi à rechercher tout ce quipeut favoriser le maintien, le développement, l'expansion de sa nature, qui pour l'homme comprend aussi bien la vie que la raison.

Le conatus est la loi de l'intérêt,immanente à chaque être et n'est que l'affirmation d'une puissance d'être, d'exister.

L'homme l'expérimente sous la forme du désir, toujours positif chez Spinoza,comme la manifestation d'une puissance (rupture avec la vision traditionnelle de l'association du désir au manque de Platon).

Le désir n'est donc pas travaillé par unmanque, il n'est pas relation négative à ce que l'on est pas mais toujours relation positive à soi ; l'objet du désir est le sujet du désir.

A travers le désir, l'homme. »

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